La parole empêchée. Группа авторов. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Группа авторов
Издательство: Bookwire
Серия: études litteraires françaises
Жанр произведения: Документальная литература
Год издания: 0
isbn: 9783823300779
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de diégèse est enfreinte.

       DER LEITENDE BEAMTE steht eine Weile da und sieht und hört durch das rührende Chaos um sich herum hindurch. Was er sieht, verwandelt sich in eine Horde aufgeregt scharrender und pickender und flatternder Hühner. Was er hört, klingt jetzt wie das »Tock-tock-toack«, das sie immer machen und das ihn immer geekelt hat und das nur aufhört, wenn sie schlafen oder kurz bevor sie – Schsch!

       Eine heruntersegelnde halbausgefüllte Personenliste streift seine Wange. Die Stelle brennt wie nach einer Ohrfeige. 2

      Le premier paragraphe débute en effet sur un discours narratorial décrivant la situation du « fonctionnaire dirigeant », et ses perceptions ; il lui vient, en voyant et entendant le bruit et la fureur autour de lui, l’imageimage d’un poulailler avec le vacarme des poules grattant le sol. Le narrateur glisse peu à peu vers les réactions de dégoût du personnage inspirées par ces représentations qu’il se fait des poules, pensant que ces bruits et activités qui le révulsent ne cessent que lorsqu’elles dorment où juste avant qu’elles ne… C’est à ce moment que le fil du discours du narrateur est interrompu par la présentation d’une onomatopée, « Schsch ! », permettant au lecteur de se construire une représentation sonore d’un bruit de sifflement, frémissement, frottement, chuintement qui n’est pas encore vraiment clair : de quoi d’agit-il ? Une seule chose est sûre : l’énoncé en cours est interrompu (structure syntaxique non complétée) et le marquage intrinsèque (le tiret) induisent un empêchement par quelque objet produisant ce sifflement. Mais ce bruit est diégétique ! Il représente donc une irruption sur le plan métadiégétique (celui de la fiction du narrateur3) d’un élément diégétique venant précisément interrompre la description que le narrateur est en train de faire de la scène diégétique. C’est comme si un personnage décrit par le discours métadiégétique du narrateur en train d’être produit pour décrire ce personnage était soudainement interrompu par ce même personnage ! C’est donc une véritable entorse au pacte narratif qui se produit sous nos yeux. Pour que le lecteur puisse cependant se construire une représentation consistante de l’univers diégétique, cela ne s’arrête pas là, car sinon, si le discours narratorial était véritablement tari, le lecteur resterait suspendu dans un vide narratif bien inconfortable. Il faut donc que le discours narratif reprenne pour apporter les informations descriptives nécessaires à la complétude de la représentation : le chuintement est produit par la descente virevoltante d’une feuille de papier qui vient dans la diégèse caresser, effleurer la joue du personnage, produisant une caresse brûlante comme une gifle, ce qui, intériorisé par le personnage a bloqué la poursuite de ses réflexions sur les poules. L’on se rend à présent compte de la double nature, pour ainsi dire, du discours narratorial empêché, qui bascule en même temps, au détour d’une simple conjonction de coordination, dans une sorte de discours indirect libre, figurant le flux méandreux des pensées du personnage « das nur aufhört, wenn sie schlafen oder kurz bevor sie – ». La richesse du jeu narratif et diégétique, à la source d’un plaisir intense de lecture réjouissante et (ré)créative, est, comme on le voit alimentée par le recours à des dispositifs de marquage divers dans la présentation du discours, qu’il soit figural ou narratorial.

      3.2.1.2. Événements relatifs au déroulement de l’interaction (cadre participatif)

      Les événements déclenchant chez le locuteur des Pressions contre le dire peuvent, comme cela vient d’être vu, être contextuels, mais bien souvent ils sont plutôt cotextuels, c’est-à-dire relatifs au déroulement de l’interaction, et plus spécifiquement, au cadre participatif1.

      a. Élargissement impromptu du cadre participatif

      « C’est vous. » me dit Andrée dont la voix était projetée jusqu’à moi avec une vitesse instantanée par la déesse qui a le privilège de rendre les sons plus rapides que l’éclair. « Écoutez, répondis-je, allez où vous voudrez, n’importe où, excepté chez Mme Verdurin. Il faut à tout prix éloigner demain Albertine. – C’est que justement elle doit y aller demain. – Ah ! »

      Mais j’étais obligé d’interrompre un instant et de faire des gestegestes menaçants, car si Françoise continuait – comme si c’eût été quelque chose d’aussi désagréable que la vaccine ou d’aussi périlleux que l’aéroplane – à ne pas vouloir apprendre à téléphoner, ce qui nous eût déchargé des communications qu’elle pouvait connaître sans inconvénient, en revanche elle entrait immédiatement chez moi dès que j’étais en train d’en faire d’assez secrètes pour que je tinsse particulièrement à les lui cacher.2

      La parole de Marcel est ici empêchée par une irruption dans le cadre de l’interaction téléphonique qu’il est en train de mener avec Andrée d’un nouveau participant, Françoise, prenant ipso facto le statut de membre du pôle de réception, mais que ne désire pas voir ratifier le locuteur, ce qui le pousse immédiatement à interrompre son discours. Il faut noter que l’interjection de Marcel, ne suffirait pas à construire une telle représentation. Pour la compréhension satisfaisante (c’est-à-dire suffisamment pertinente) de la séquence, il faut bien entendu inclure le tiret et les informations narratoriales subséquentes.

      Dans le discours théâtralthéâtral, on trouve également, bien entendu, ce genre de dispositif :

      Horace, Arnolphe

      Arnolphe. Ce n’est point par le bien qu’il faut être ébloui;

      Et pourvu que l’honneurhonneur soit… Que vois-je ? Est-ce ?… Oui.

      Je me trompe. Nenni. Si fait. Non, c’est lui-même.

      Hor…

      Horace. Seigneur Ar…

      Arnolphe. Horace !

      Horace. Arnolphe.

      Arnolphe. Ah ! joie extrême !

      Et depuis quand ici ?3

      On voit bien la façon dont l’irruption de Horace dans la scène, une fois perçue par le locuteur, déclenche chez celui-ci des Pressions contre le dire, interrompant et empêchant le flux ébauché de son discours, comme le permettent de le comprendre les marqueurs intrinsèques qui nous sont maintenant familiers, la structure syntaxique et la ponctuation. Il est à noter que ces marqueurs étant suffisamment puissants ici, point n’est besoin de recourir à un marquage extrinsèque, qui pourrait être l’insertion d’une didascaliedidascalie.

      b. Réactions (rétroaction) du pôle de réception

      Le déroulement de l’interaction est largement dépendant des effets de la rétroaction (feed back). Un des effets, est que la réaction d’un interactant du pôle de réception peut déclencher à son tour des Pressions contre le dire chez le locuteur.

      Madame Pernelle. Voilà les contes bleus qu’il vous faut pour vous plaire.

      Ma bru, […]

      Et comme l’autre jour un docteur dit fort bien,

      C’est véritablement la tour de Babylone,

      Car chacun y babille, et tout du long de l’aune ;

      Et pour conter l’histoire où ce point l’engagea…

      Voilà-t-il pas Monsieur qui ricane déjà !

      Allez chercher vos fousfous qui vous donnent à rirerire,

      Et sans… Adieu, ma bru : je ne veux plus rien dire.

      Sachez que pour céans j’en rabats de moitié,

      Et qu’il fera beau temps quand j’y mettra le pied.

      (Donnant un soufflet à Flipote.)

      Allons, vous, vous rêvez, et bayez aux corneilles.

      Jour de Dieu ! je saurai vous frotter les oreilles.

      Marchons, gaupe, marchons.4