Œuvres de Napoléon Bonaparte (Tome I-V). Napoleon Bonaparte. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Napoleon Bonaparte
Издательство: Bookwire
Серия:
Жанр произведения: Документальная литература
Год издания: 0
isbn: 4064066388782
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en échange des états de Venise, elles restent toujours en notre pouvoir. Lorsque l'empereur et nous, de concert, nous aurons réussi à faire consentir le sénat à cet échange, il est évident que la république de Venise se trouvera influencée par la république lombarde et à notre disposition. Si cet échange ne s'effectue pas, et que l'empereur entre en possession d'une partie des états de Venise sans que le sénat veuille reprendre une compensation qui est inconvenante et insuffisante, les trois légations restent toujours en notre pouvoir, et nous réunirons Bologne et Ferrare à la république lombarde. Le gouvernement de Venise est le plus absurde et le plus tyrannique des gouvernemens; il est d'ailleurs hors de doute qu'il voulait profiter du moment où nous étions dans le coeur de l'Allemagne pour nous assassiner. Notre république n'a pas d'ennemi plus acharné; Son influence se trouve considérablement diminuée, et cela est tout à notre avantage: cela d'ailleurs lie l'empereur et la France et obligera ce prince, pendant les premiers temps de notre paix, à faire tout ce qui pourra nous être agréable. Cet intérêt commun que nous avons avec l'empereur nous remet la balance dans la main; nous nous trouvons par là placés entre la Prusse et la maison d'Autriche, ayant des intérêts majeurs à arranger avec l'une et l'autre. D'ailleurs, nous ne devons pas nous dissimuler que, quoique notre position militaire soit brillante, nous n'avons point dicté les conditions. La cour avait évacué Vienne; le prince Charles et son armée se repliaient sur celle du Rhin; le peuple de la Hongrie et de toutes les parties des états héréditaires se levait en masse, et même, dans ce moment-ci, leur tête est déjà sur nos flancs. Le Rhin n'était pas passé, l'empereur n'attendait que ce moment pour quitter Vienne et se porter à la tête de son armée. S'ils eussent fait la bêtise de m'attendre, je les aurais battus; mais ils se seraient toujours repliés devant nous, se seraient réunis à une partie de leurs forces du Rhin et m'auraient accablé. Alors la retraite devenait difficile, et la perte de l'armée d'Italie pouvait entraîner celle de la république; aussi étais-je bien résolu à essayer de lever une contribution dans les faubourgs de Vienne et à ne plus faire un pas. Je me trouve ne pas avoir quatre mille hommes de cavalerie, et, au lieu de quarante mille hommes que je vous avais demandés, il n'en est pas arrivé vingt mille.

      Si je me fusse, au commencement de la campagne, obstiné à aller à Turin, je n'aurais jamais passé le Pô; si je m'étais obstiné à aller à Rome, j'aurais perdu Milan; si je m'étais obstiné à aller à Vienne, peut-être aurais je perdu la république. Le vrai plan de campagne pour détruire l'empereur était celui que j'ai fait, mais avec six mille hommes de cavalerie et vingt mille hommes de plus d'infanterie; ou bien si, avec les forces que j'avais, on eût passé le Rhin dans le temps que je passais le Tagliamento, comme je l'avais pensé, puisque deux courriers de suite m'ont ordonné d'ouvrir la campagne. Dès l'instant que j'ai prévu que les négociations s'ouvraient sérieusement, j'ai expédié un courrier au général Clarke qui, chargé plus spécialement de vos instructions dans un objet aussi essentiel, s'en serait mieux acquitté que moi; mais lorsque, après dix jours, j'ai vu qu'il n'était pas arrivé, et que le moment commençait à presser, j'ai dû laisser tout scrupule et j'ai signé. Vous m'avez donné plein pouvoir sur toutes les opérations diplomatiques; et, dans la position des choses, les préliminaires de la paix même avec l'empereur, sont devenus une opération militaire. Cela sera un monument de la gloire de la république française, et un présage infaillible, qu'elle peut, en deux campagnes, soumettre le continent de l'Europe, si elle organise ses armées avec force, et surtout l'arme de la cavalerie.

      Je n'ai pas, en Allemagne, levé une seule contribution; il n'y a pas eu une seule plainte contre nous. J'agirai de même en évacuant, et, sans être prophète, je sens que le temps viendra où nous tirerons parti de cette sage conduite; elle germera dans toute la Hongrie, et sera plus fatale au trône de Vienne que les victoires qui ont illustré la guerre de la liberté.

      D'ici à trois jours, je vous enverrai la ratification de l'empereur; je placerai alors mon armée dans tout le pays vénitien, où je la nourrirai et entretiendrai jusqu'à ce que vous m'ayez fait passer vos ordres. Quant à moi, je vous demande du repos. J'ai justifié la confiance dont vous m'avez investi; je ne me suis jamais considéré pour rien dans toutes mes opérations, et je me suis lancé aujourd'hui sur Vienne, ayant acquis plus de gloire qu'il n'en faut pour être heureux, et ayant derrière moi les superbes plaines de l'Italie, comme j'avais fait au commencement de la campagne dernière, en cherchant du pain pour l'armée que la république ne pouvait plus nourrir.

      La calomnie s'efforcera en vain de me prêter des intentions perfides: ma carrière civile sera comme ma carrière militaire, une et simple. Cependant vous devez sentir que je dois sortir de l'Italie, et je vous demande avec instance de renvoyer, avec la ratification des préliminaires de paix, des ordres sur la première direction à donner aux affaires d'Italie, et un congé pour me rendre en France.

      BONAPARTE.

      Au quartier-général à Trieste, le 11 floréal an 5 (30 avril 1797).

       Au directoire exécutif.

      Je suis parti, il y a deux jours, de Gratz, après avoir conféré avec M. de Gallo, qui, étant de retour de Vienne, m'a montré les préliminaires de paix que nous avons faits, ratifiés par l'empereur dans la forme ordinaire.

      Il m'a dit: 1°. que l'empereur éloignerait les émigrés et le corps de Condé, qui ne seraient plus à sa solde.

      2°. Que l'empereur désirait traiter sa paix particulière, le plus tôt possible, et en Italie. Nous avons choisi Brescia pour le lieu des conférences.

      3°. Que la paix de l'empire pouvait se traiter à Constance ou dans quelque autre ville de ce genre.

      4°. Qu'à la seule paix de l'empire on appellerait les alliés, qui ne seront point appelés à la paix particulière.

      5°. Que l'empereur avait déjà donné des pouvoirs pour traiter de la paix définitive, et M. Gallo m'a sur ce interpellé pour savoir si le général Clarke avait des pouvoirs. J'ai dit qu'il fallait, avant tout, attendre vos ordres.

      6°. Enfin que la cour de Vienne est de bonne foi et désire serrer de toutes les manières son système politique avec celui de la France, et que le directoire exécutif trouverait avec l'empereur un cabinet de bonne foi et qui marche droit. Le ministre d'Angleterre à Vienne s'est fortement fâché avec M. Thugut, il paraît que les Anglais le prennent fort haut, et taxent l'empereur de mauvaise foi.

      BONAPARTE.

      Au quartier-général à Palma-Nova, le 11 floréal an 5 (30 avril 1797).

       Au citoyen Lallemant, ministre de la république française à Venise.

      Le sang français a coulé dans Venise, et vous y êtes encore! attendez-vous donc qu'on vous en chasse? Les Français ne peuvent plus se promener dans les rues, ils sont accablés d'injures et de mauvais traitemens; et vous restez simple spectateur! Depuis que l'armée est en Allemagne, on a, en terre-ferme, assassiné plus de quatre cents Français; on a assiégé la forteresse de Verone, qui n'a été dégagée qu'après un combat sanglant, et, malgré tout cela, vous restez à Venise! Quant à moi, j'ai refusé d'entendre les députés du sénat, parce qu'ils sont tout dégoûtans du sang de Laugier, et je ne les verrai jamais qu'au préalable ils n'aient fait arrêter l'amiral et les inquisiteurs qui ont ordonné ce massacre, et ne les aient remis entre mes mains. Je sais bien qu'ils chercheront à faire tomber la vengeance de la république sur quelques misérables exécuteurs de leurs atrocités; mais nous ne prendrons pas le change.

      Faites une note concise et digne de la grandeur de la nation que vous représentez, et des outrages qu'elle a reçus: après quoi, partez de Venise, et venez me joindre à Mantoue.

      Ils n'ont rien exécuté de ce que je leur ai demandé: ce sont tous les prisonniers qu'ils ont faits depuis que l'armée française est en Italie, qu'ils devaient relâcher, et non pas un seulement, ainsi qu'ils l'ont fait.

      BONAPARTE.

      Au quartier-général à Palma-Nova, le 11 floréal an 5 (30 avril 1797).

       À messieurs les envoyés du sénat de Venise.

      Je