Les Portes de l'Enfer. Maurice Level. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Maurice Level
Издательство: Bookwire
Серия:
Жанр произведения: Языкознание
Год издания: 0
isbn: 4064066088637
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de moi que cette horloge, et je la remonte pieusement. Je reste parfois des heures à contempler son cadran vide… Je lui parle… Je crois, en vérité, que les choses ont une âme, car, par moments, il semble me regarder, ce cadran.—Mais, maintenant, c'est fini. L'horloge peut se taire: ma femme s'est éteinte, il y a deux jours, dans une maison de fous.

      D'autres gens habiteront entre ces murs… Ils y auront des tristesses… des joies… Nul n'y goûtera plus les âpres voluptés de la vengeance que j'y connus…

      Il parla encore longtemps… La nuit tombait… Des ombres s'étalaient aux murs gris de poussière. L'horloge avec son cadran vide, l'horloge qui avait vu tant d'effrayantes choses, l'horloge pleurait dans sa gaine de bois…

      Le mauvais Guide

      Combien s'était-il écoulé de jours, de semaines ou de mois, depuis qu'il pourrissait au fond de ce cul de basse fosse?… L'homme n'aurait pu le dire.

      Dans son cachot tout rempli d'ombre, nulle lueur ne passait. En s'aidant des genoux et des mains, il avait, dressé sur sa couchette scellée au mur, tâté le plafond de sa prison. Mais, pas plus là qu'aux parois lisses, ni qu'aux dalles humides, ni qu'à la porte aux fers rouillés, ses doigts n'avaient trouvé le moindre trou, la moindre fente.

      D'abord, il avait pensé que ses yeux s'habituant à la nuit cruelle finiraient par y distinguer les objets; que, sa raison aidant ses sens exaspérés, il pourrait deviner, parmi ces ténèbres, un peu de l'âme impalpable du jour qui ne disparaît jamais tout à fait pour les vivants.

      Mais ses yeux grands ouverts avaient en vain pleuré dans la nuit, ses paupières avaient saigné sous l'effort inutile: tout était noir, tout restait noir.

      Il n'entendait, dans ce tombeau où traînait sa trop lente agonie, que, de temps en temps, le pas du geôlier qui lui apportait sa pitance. Pendant une seconde, la porte de son cachot s'entr'ouvrait. Ses yeux clignotants pouvaient voir la tache rousse d'une lanterne, et la tache plus pâle d'une face penchée ou d'une main tendue, car l'ombre des couloirs se mélangeait à l'ombre impénétrable de sa cellule. Puis, la porte se refermait. Le bruit de pas dans les corridors allait diminuant, et, de nouveau, le grand silence épaississait sa nuit.

      Parfois aussi, il entendait le vent gémir, et le clapotis monotone de l'eau qui, dans les fossés, venait battre les murs du donjon. Des rêves fous de ciel, de liberté et de lumière avaient d'abord hanté son sommeil agité. Puis, de ses songes mêmes, la lumière désapprise s'en alla. Il ne lui resta plus que la seule obsession de s'échapper de ce sépulcre; des plans s'enchevêtrèrent dans sa tête égarée, tous et toujours aboutissant au même but: la fuite!

      Un jour—ou une nuit, il n'aurait su le dire—comme il songeait, assis sur sa couchette, le bruit des pas du geôlier le tira de sa torpeur. Bien que, depuis longtemps, il eût cessé d'éprouver, à l'approche de ce vivant, le moindre émoi, comme son estomac criait la faim, et que ses lèvres desséchées avaient besoin de se désaltérer, il se leva et se mit à marcher à tâtons.

      Une bouffée d'air froid jeta autour de lui une odeur aigre de pierre humide. A la lueur du falot, il vit à terre sa cruche et son écuelle. L'huis entr'ouvert se referma. Il étendit la main vers la cruche de grès, mais, au moment de la saisir, il s'arrêta: un cri étrange avait traversé le silence. Il attendit, croyant avoir mal entendu. Il fit un pas: le même cri monta du sol. Il s'agenouilla, modulant doucement un claquement de lèvres, comme pour appeler un chien. Rien ne répondit. Rampant, à quatre pattes, il tâtait les dalles autour de lui. Ayant trouvé la cruche, il la prit et se mit à boire à grands coups, puis, la reposa dans un angle.

      Soudain, un contact visqueux et froid le fit tressaillir. Sous sa main, une chose sembla fuir, et le cri qui l'avait étonné, tout à l'heure, s'éleva, fluté, étrange. Il resta, sans bouger, le poing fermé sur la masse gluante qui semblait palpiter, battre à coups rapides et rythmés entra ses doigts. Le cri, une nouvelle fois, vibra dans ses oreilles. La chose se ramassa sous son étreinte, pour s'échapper. Alors, au milieu de son dégoût et de son angoisse, une lueur se fit, et malgré lui, il dit, presque à voix haute:

      —C'est une bête!…

      Le son de sa propre voix lui fit peur.

      Il répéta:

      —C'est une bête… une bête…

      Et, tout à coup, il frissonna de tous ses membres; la sueur perla sur son front. Plus de doute: le cri étrange, le corps visqueux… c'était le cri, c'était le corps d'un crapaud. Un crapaud!… Il s'imagina voir la bête horrible, la bête impure, avec son dos zébré, son ventre blanc, et ses gros yeux dorés.

      Ses doigts se détendirent. Le crapaud retomba avec un bruit mou.

      Alors, l'instinct craintif, à la fois, et méchant de l'homme s'éveilla, et, d'un coup de talon, il voulut l'écraser. Son pied heurta la bête flasque. Il crut l'avoir tuée. Mais le crapaud, mutilé sans être mort, se remit à pousser son cri. L'homme le poursuivit, tapant le sol de ses mains ouvertes.

      A son dégoût insurmontable se mêlait un obscur remords de bourreau. Il voulait tuer la bête, non plus seulement pour ne plus risquer de la frôler, mais encore pour étouffer sa plainte. Peine inutile. Le cri partait, d'ici… de là… et chaque fois que ses doigts croyaient atteindre la bête douloureuse, ils ne rencontraient que la dalle glacée ou le mur rêche.

      Épuisé, les genoux tuméfiés et les paumes sanglantes, il s'étendit sur sa couchette, et s'endormit.

      Dès qu'il fut éveillé, il songea:

      —La bête doit être morte.

      Il prêta l'oreille. Pendant un moment, il n'entendit que la plainte lointaine du vent. Il respira plus largement, soulagé. Il se leva, et, toujours tâtonnant, gagna la porte. Depuis longtemps, à l'aide d'un vieux bout de fer oublié dans un coin, il essayait d'en user les gonds. Il reprit son patient travail, raclant sans bruit.

      Soudain, le cri du crapaud s'éleva:

      —Ah! bête immonde, gronda le prisonnier, je te ferai bien taire! Il recommença sa chasse, mais en vain. Lorsqu'il croyait tenir la bête, elle glissait entre ses doigts.

      Cela dura des jours et des jours. S'il ne travaillait pas à déchirer sa porte, il rampait pour atteindre l'invisible crapaud. L'appel de la bête blessée résonnait à intervalles réguliers. Et le captif, exaspéré, suant de peur, sentait par moments sa raison se troubler. Ah! quelle volupté c'eût été d'écraser le monstre, de le voir éclater sous sa botte!…

      Presque dément, il l'insultait, le provoquait:

      —Viens donc! viens donc!… Montre-toi!… ose te montrer!…

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