Son cœur battait à tout rompre, elle songea aux intrus potentiels, au portail automatique et aux caméras de télésurveillance.
Elle se souvint des paroles de Mme Rossi, de son avertissement sans ambigüité. La riche famille pourrait être la cible d'un vol, voire, d'un enlèvement.
Elle devait en avoir le cœur net. Si elle l'estimait dangereux, elle donnerait l'alarme, crierait et réveillerait la maisonnée.
Elle se dépêcha de descendre et songea à son plan.
L'homme s'était dirigé vers l'arrière de la maison, elle devrait sortir par la porte d'entrée. La luminosité lui permettait de voir, l'herbe était givrée par la fraîcheur de la nuit. Elle le suivrait à la trace.
Cassie sortit et verrouilla la porte derrière elle, si nerveuse qu'elle ne remarqua même pas le froid mordant de cette matinée calme.
Des traces de pas se détachaient nettement sur le sol gelé. Elles contournaient la villa, franchissaient la pelouse impeccable et la cour dallée.
Les empreintes menaient à la porte arrière, grande ouverte.
Cassie monta les marches, les traces de pas étaient clairement visibles sur les escaliers en pierre.
Elle s'arrêta sur le pas de la porte et attendit, s'efforçant de différencier les bruits suspects des battements de son cœur.
Elle n'entendait rien, bien que les lumières soient allumées. Une faible odeur de café flottait dans l'air. Cet homme était peut-être un livreur, la cuisinière l'avait fait entrer. Mais où était-il, pourquoi n'entendait-elle pas parler ?
Cassie entra dans la cuisine sur la pointe des pieds mais personne.
Elle décida d'aller voir si tout allait bien du côté des enfants. Une fois rassurée sur ce point, elle réveillerait Mme Rossi et lui expliquerait tout. C'était certainement une fausse alerte mais mieux valait prévenir que guérir, surtout après avoir constaté que l'homme s'était volatilisé.
Elle ne l'avait aperçu que fugacement, Cassie aurait cru rêver si elle n'avait pas vu les empreintes de pas.
Elle monta les escaliers en courant et se dirigea vers les chambres des enfants.
Elle s'arrêta net avant d'y parvenir, plaqua sa main sur sa bouche et étouffa un cri.
Il était là—mince silhouette vêtue de noir.
Devant la chambre de Mme Rossi, la main gauche sur la poignée de la porte.
Elle ne voyait pas sa main droite tendue, il tenait vraisemblablement quelque chose, vue sa position.
CHAPITRE HUIT
Cassie, totalement paniquée, devait trouver une arme, elle s'empara du premier objet venu – une statuette en bronze placée sur une desserte près des escaliers.
Elle courut vers lui. Elle devait user de l'effet de surprise, il n'aurait pas le temps de se retourner. Elle le frapperait d'abord à la tête avec la statuette, puis sa main droite pour le désarmer.
Cassie bondit en avant. Il était tourné—elle devait tenter sa chance. Elle leva son arme improvisée.
Elle freina des quatre fers alors qu'il se retournait pour lui faire face. Son cri de surprise fut étouffé par un hurlement indigné.
L'homme, petit et mince, tenait une tasse de café.
"C'est quoi c'bordel ?"
Cassie baissa la statue et le dévisagea, incrédule.
"Vous comptiez m'agresser ?" tempêta l'homme. "Vous êtes folle ou quoi ? J'ai failli lâcher mon café."
Son café avait débordé du couvercle et éclaboussé sa main. Quelques gouttes mouchetaient le sol. Il prit un Kleenex dans sa poche et essuya.
Cassie lui donnait la trentaine, tiré à quatre épingles, cheveux bruns coupés à la perfection, barbe courte et bien taillée. Elle perçut un soupçon d'accent australien.
Il se redressa et lui adressa un regard noir.
"Qui êtes-vous ?"
"Cassie Vale, la fille au pair. Et vous ?"
Il haussa les sourcils.
"Depuis quand ? Vous n'étiez pas là hier."
"J'ai été embauchée hier après-midi."
"Signora vous a engagé ?"
Il avait mis l'accent sur Signora, et la dévisagea quelques secondes, Cassie était de plus en plus mal à l'aise. Elle acquiesça sans mot dire.
"Je vois. Maurice Smithers, assistant personnel de Mme Rossi."
Cassie l'avait échappé belle. Il ne correspondait pas à l'image qu'elle se faisait d'un assistant personnel.
"Pourquoi vous être faufilé dans la maison ?"
Maurice soupira.
"La serrure de la porte d'entrée ouvre difficilement par temps froid. Elle fait un bruit atroce, j'essaie d'éviter de déranger quand j'arrive tôt. J'entre par derrière, c'est moins bruyant."
"Et le café ?"
Cassie fixait la tasse, pas convaincue par sa dégaine étrange et son prétendu poste.
"Tout droit sorti d'une brasserie artisanale au bout de la rue. Le café préféré de Signora. Je lui en apporte un lors de nos réunions matinales."
"Si tôt ?"
Cassie était gênée, en dépit de son air accusateur. Elle s'était pris pour une héroïne, en agissant dans l'intérêt de Mme Rossi et des enfants mais découvrait qu'elle avait commis une grave erreur, elle partait du mauvais pied avec Maurice. En tant qu'assistant personnel, son rôle dans sa vie était manifestement influent.
Son futur stage semblait compromis. Cassie s'en voulait, sa témérité avait peut-être définitivement compromis son rêve.
"Une journée extrêmement chargée nous attend. Mme Rossi préfère commencer tôt. Si vous vous voulez bien m'excuser, j'aimerais le lui apporter avant qu'il refroidisse."
Il frappa poliment à la porte, qui s'ouvrit un moment plus tard.
"Buongiorno, Signora. Comment allez-vous ce matin ?"
Mme Rossi était habillée et parfaitement maquillée. Elle portait des bottes cerise à grosses boucles argentées aujourd'hui.
"Molto bene, grazie, Maurice," dit-elle en prenant son café.
Les salutations étaient pure formalité en italien, Cassie remarqua que la suite de la conversation se poursuivit en anglais.
"Il fait très froid dehors. Dois-je monter le chauffage dans votre bureau ?" demanda Maurice.
Cassie n'avait pas encore vu Maurice sourire, son visage se fendit d'un sourire obséquieux, il frétillait, ne sachant que faire pour lui être agréable.
"Nous n'en avons pas pour longtemps, le chauffage est parfait. Apportez-moi mon manteau, voulez-vous ?"
"Avec joie."
Maurice prit le manteau au col en fourrure sur le porte-manteau en bois situé près de la porte de la chambre. Il parlait de façon animée sans la quitter d'une semelle.
"Vous verrez lorsque vous saurez ce que nous avons prévu pour la Fashion Week. Nous avons eu une excellente réunion hier avec les Français. J'ai tout enregistré, bien entendu, j'ai préparé un compte-rendu et un résumé."
Cassie s'aperçut que Mme Rossi ne lui avait pas adressé la parole. Elle l'avait forcément vue mais n'avait d'yeux que pour Maurice. Ils se dirigeaient vers le bureau où Cassie avait passé son entretien la veille.
Mme Rossi ne l'ignorait pas délibérément—elle l'espérait du moins. Elle était complètement absorbée par son travail, son attention se concentrait sur sa journée.
"J'ai