Moll Flanders. Defoe Daniel. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Defoe Daniel
Издательство: Public Domain
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Жанр произведения: Зарубежная классика
Год издания: 0
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sincérité de son amour pour moi, après tant de protestations, mais…

      Et ici je m'arrêtai, comme si je lui laissais à deviner le reste.

      – Mais quoi, ma chérie? dit-il. Je devine ce que vous voulez dire. Et si vous alliez devenir grosse, n'est-ce pas cela? Eh bien, alors, dit-il, j'aurai soin de vous et de vous pourvoir, aussi bien que l'enfant; et afin que vous puissiez voir que je ne plaisante pas, dit-il, voici quelque chose de sérieux pour vous, et là-dessus il tire une bourse de soie avec cent guinées et me la donna; et je vous en donnerai une autre pareille, dit-il, tous les ans jusqu'à ce que je vous épouse.

      Ma couleur monta et s'enfuit à la vue de la bourse, et tout ensemble au feu de sa proposition, si bien que je ne pus dire une parole, et il s'en aperçut aisément; de sorte que, glissant la bourse dans mon sein, je ne lui fis plus de résistance, mais lui laissai faire tout ce qui lui plaisait et aussi souvent qu'il lui plut et ainsi je scellai ma propre destruction d'un coup; car de ce jour, étant abandonnée de ma vertu et de ma chasteté, il ne me resta plus rien de valeur pour me recommander ou à la bénédiction de Dieu ou à l'assistance des hommes.

      Mais les choses ne se terminèrent pas là. Je retournai en ville, fis les affaires dont il m'avait priée, et fus rentrée avant que personne s'étonnât de ma longue sortie; pour mon gentilhomme, il resta dehors jusque tard dans la nuit, et il n'y eut pas le moindre soupçon dans la famille, soit sur son compte, soit sur le mien.

      Nous eûmes ensuite de fréquentes occasions de renouveler notre crime, en particulier à la maison, quand sa mère et les jeunes demoiselles sortaient en visite, ce qu'il guettait si étroitement qu'il n'y manquait jamais; sachant toujours d'avance le moment où elles sortaient, et n'omettait pas alors de me surprendre toute seule et en absolue sûreté; de sorte que nous prîmes notre plein de nos mauvais plaisirs pendant presque la moitié d'une année; et cependant, à ma bien grande satisfaction, je n'étais pas grosse.

      Mais avant que cette demi-année fût expirée, son frère cadet, de qui j'ai fait quelque mention, entra au jeu avec moi; et, me trouvant seule au jardin un soir, me commence une histoire de même sorte, fit de bonnes et honnêtes protestations de son amour pour moi, et bref, me propose de m'épouser bellement, en tout honneur.

      J'étais maintenant confondue, et poussée à une telle extrémité que je n'en avais jamais connu de semblable, je résistai obstinément à sa proposition et commençai de m'armer d'arguments: je lui exposai l'inégalité de cette alliance, le traitement que je rencontrerais dans sa famille, l'ingratitude que ce serait envers son bon père et sa mère qui m'avaient recueillie dans leur maison avec de si généreuses intentions et lorsque je me trouvais dans une condition si basse; et bref je dis, pour le dissuader, tout ce que je pus imaginer, excepté la vérité, ce qui aurait mis fin à tout, mais dont je n'osais même penser faire mention.

      Mais ici survint une circonstance que je n'attendais pas, en vérité, et qui me mit à bout de ressources: car ce jeune gentilhomme, de même qu'il était simple et honnête, ainsi ne prétendait à rien qui ne le fut également; et, connaissant sa propre innocence, il n'était pas si soigneux que l'était son frère de tenir secret dans la maison qu'il eût une douceur pour Mme Betty; et quoiqu'il ne leur fit pas savoir qu'il m'en avait parlé, cependant il en dit assez pour laisser voir à ses sœurs qu'il m'aimait, et sa mère le vit aussi, et quoiqu'elles n'en fissent point semblant à mon égard, cependant elles ne le lui dissimulèrent pas, et aussitôt je trouvai que leur conduite envers moi était changée encore plus qu'auparavant.

      Je vis le nuage, quoique sans prévision de l'orage; il était facile de voir, dis-je, que leur conduite était changée et que tous les jours elle devenait pire et pire; jusqu'à ce qu'enfin je fus informée que dans très peu de temps je serais priée de m'en aller.

      Je ne fus pas effrayée de la nouvelle, étant pleinement assurée que je serais pourvue, et surtout regardant que j'avais raison, chaque jour d'attendre d'être grosse, et qu'alors je serais obligée de partir sans couleurs aucunes.

      Après quelque temps, le gentilhomme cadet saisit une occasion pour me dire que la tendresse qu'il entretenait pour moi s'était ébruitée dans la famille; il ne m'en accusait pas, disait-il, car il savait assez par quel moyen on l'avait su; il me dit que c'étaient ses propres paroles qui en avaient été l'occasion, car il n'avait pas tenu son respect pour moi aussi secret qu'il eût pu, et la raison en était qu'il était au point que, si je voulais consentir à l'accepter, il leur dirait à tous ouvertement qu'il m'aimait et voulait m'épouser; qu'il était vrai que son père et sa mère en pourraient être fâchés et se montrer sévères, mais qu'il était maintenant fort capable de gagner sa vie, ayant profité dans le droit, et qu'il ne craindrait point de m'entretenir, et qu'en somme, comme il croyait que je n'aurais point honte de lui, ainsi était-il résolu à n'avoir point honte de moi, qu'il dédaignait de craindre m'avouer maintenant, moi qu'il avait décidé d'avouer après que je serais sa femme; qu'ainsi je n'avais rien à faire qu'à lui donner ma main, et qu'il répondrait du reste.

      J'étais maintenant dans une terrible condition, en vérité, et maintenant je me repentis de cœur de ma facilité avec le frère aîné; non par réflexion de conscience, car j'étais étrangère à ces choses, mais je ne pouvais songer à servir de maîtresse à l'un des frères et de femme à l'autre; il me vint aussi à la pensée que l'aîné m'avait promis de me faire sa femme quand il aurait disposition de sa fortune; mais en un moment je me souvins d'avoir souvent pensé qu'il n'avait jamais plus dit un mot de me prendre pour femme après qu'il m'eût conquise pour maîtresse; et jusqu'ici, en vérité, quoique je dise que j'y pensais souvent, toutefois je n'en prenais pas d'inquiétude car il ne semblait pas le moins du monde perdre de son affection pour moi, non plus que de sa générosité; quoique lui-même eût la discrétion de me recommander de ne point dépenser deux sols en habits, ou faire la moindre parade, parce que nécessairement cela exciterait quelque envie dans la famille, puisque chacun savait que je n'aurais pu obtenir ces choses par moyens ordinaires, sinon par quelque liaison privée dont on m'aurait soupçonnée sur-le-champ.

      J'étais donc dans une grande angoisse et ne savais que faire; la principale difficulté était que le frère cadet non seulement m'assiégeait étroitement, mais le laissait voir; il entrait dans la chambre de sa sœur ou dans la chambre de sa mère, s'asseyait, et me disait mille choses aimables, en face d'elles; si bien que toute la maison en parlait, et que sa mère l'en blâma, et que leur conduite envers moi parut toute changée: bref, sa mère avait laissé tomber quelques paroles par où il était facile de comprendre qu'elle voulait me faire quitter la famille, c'est-à-dire, en français, me jeter à la porte.

      Or, j'étais sûre que ceci ne pouvait être un secret pour son frère; seulement il pouvait penser (car personne n'y songeait encore) que son frère cadet ne m'avait fait aucune proposition; mais de même que je voyais facilement que les choses iraient plus loin, ainsi vis-je pareillement qu'il y avait nécessité absolue de lui en parler ou qu'il m'en parlât, mais je ne savais pas si je devais m'ouvrir à lui la première ou bien attendre qu'il commençât.

      Après sérieuse considération, car, en vérité, je commençais maintenant d'abord à considérer les choses très sérieusement, je résolus de lui en parler la première, et il ne se passa pas longtemps avant que j'en eusse l'occasion, car précisément le jour suivant son frère alla à Londres en affaires, et la famille étant sortie en visite, comme il arrivait avant, il vint, selon sa coutume, passer une heure ou deux avec Mme Betty.

      Quand il se fut assis un moment, il vit facilement qu'il y avait un changement dans mon visage, que je n'étais pas si libre avec lui et si gaie que de coutume, et surtout que je venais de pleurer; il ne fut pas long à le remarquer, et me demanda très tendrement ce qu'il y avait et si quelque chose me tourmentait. J'aurais bien remis la confidence, si j'avais pu, mais je ne pouvais plus dissimuler; et après m'être fait longuement importuner pour me laisser tirer ce que je désirais si ardemment révéler, je lui dis qu'il était vrai qu'une chose me tourmentait, et une chose de nature telle que je pouvais à peine la lui cacher, et que pourtant je ne pouvais savoir comment la lui dire; que c'était une chose qui non seulement me surprenait, mais m'embarrassait fortement, et que je ne savais quelle décision prendre, à moins qu'il voulût me conseiller. Il me répondit avec une grande tendresse que, quelle