Les psychologues ont tendance à partager notre avis. Nous avons dépensé des milliers de dollars en examens médicaux ; dans de rares cas seulement avons-nous donné aux médecins qui nous traitaient une chance de nous aider. Nous leur avons rarement dit toute la vérité, pas plus que nous n’avons suivi leurs conseils. Peu disposés à être honnêtes avec ces hommes compatissants, nous ne l’étions pas davantage avec les autres. Pas étonnant que tant de membres de la profession médicale aient une piètre opinion des alcooliques et doutent de leurs chances de se rétablir !
Nous devons être parfaitement honnêtes avec quelqu’un si nous voulons vivre longtemps ou heureux ici-bas. Naturellement – et c’est légitime – nous réfléchissons longuement avant de choisir la ou les personnes avec qui nous allons franchir cette étape intime et confidentielle. Ceux qui pratiquent une religion où la confession est obligatoire voudront nécessairement s’adresser à l’autorité désignée pour faire entendre ces révélations. Même si nous ne sommes rattachés à aucune foi particulière, nous avons intérêt à nous confier à un prêtre d’une religion reconnue. Souvent, une telle personne cerne vite notre problème et le comprend. Certes, il nous arrive quelquefois de rencontrer des gens qui ne comprennent pas les alcooliques.
Si nous ne pouvons ou ne désirons pas de cette solution, nous cherchons un ami discret et compréhensif. Cet ami peut être notre médecin ou notre psychologue. Il peut également se trouver dans notre propre famille, mais nous ne pouvons pas dévoiler à notre femme ou à nos parents des choses qui les blesseraient ou les rendraient malheureux. Nous n’avons pas le droit de sauver notre peau au détriment d’une autre personne. Nous faisons ces confidences à quelqu’un qui va comprendre mais qui n’en sera pas affecté. Si la règle nous impose d’être durs avec nous-mêmes, elle nous demande d’être toujours pleins d’égards pour les autres.
Malgré la grande nécessité de se livrer à quelqu’un, il peut arriver qu’un individu soit dans une situation telle qu’il n’y ait personne qui lui convienne. En pareil cas, cette étape peut être reportée, à condition toutefois que l’alcoolique reste disposé à se confier entièrement dès que l’occasion se présentera. Nous le mentionnons parce qu’il est très important que chacun puisse s’adresser à la bonne personne. Il est tout aussi essentiel que cette dernière soit capable de garder des confidences, qu’elle comprenne et approuve entièrement notre démarche, qu’elle n’essaie pas de changer nos projets. En revanche, nous ne devons pas utiliser cela comme un prétexte pour remettre l’étape à plus tard.
Une fois que nous avons choisi qui recevra nos confidences, nous ne perdons pas de temps. Nous avons en mains notre inventaire écrit et nous sommes prêts à parler longtemps. Nous expliquons à notre partenaire ce que nous nous apprêtons à faire et pourquoi nous devons le faire. La personne doit comprendre qu’il s’agit pour nous d’une question de vie ou de mort. Lorsque nous présentons les choses de cette façon, la plupart des gens acceptent avec plaisir de nous aider ; ils se sentent honorés de recevoir nos confidences.
Nous mettons notre orgueil de côté et nous y allons de nos secrets en explicitant bien chaque repli de notre caractère, chaque coin et recoin de notre passé. Une fois que, sans avoir rien caché, nous avons franchi cette étape, nous sommes enchantés. Nous pouvons regarder le monde en face. Lorsque nous sommes seuls, nous nous sentons en paix et parfaitement à l’aise. Nos craintes nous quittent. Nous commençons à sentir la présence immédiate de notre Créateur. Nous avions peut-être jusque-là des convictions spirituelles, mais maintenant nous commençons à vivre une expérience spirituelle. Cette expérience est souvent accompagnée de l’impression très vive que notre problème d’alcool a disparu. Nous avons l’impression d’être sur la Grande Route, marchant main dans la main avec l’Esprit de l’univers.
De retour à la maison, nous nous retirons dans un endroit paisible pendant une heure pour réfléchir soigneusement à ce que nous venons de faire. Nous remercions Dieu du fond du cœur pour nous avoir permis de mieux Le connaître. Reprenant ce livre, nous allons à la page où sont énumérées les Douze Étapes. Nous relisons attentivement les cinq premiers points, nous essayons de voir si nous n’aurions pas omis quelque chose car nous construisons une arche que nous allons traverser pour devenir enfin un être libre. La construction est-elle solide ? Les pierres sont-elles bien en place ? Avons-nous lésiné sur les matériaux de la fondation ? Avons-nous essayé de fabriquer du mortier sans sable ?
Si nous pouvons répondre de façon satisfaisante à ces questions, alors nous passons à la Sixième Étape. Nous avons déjà dit et répété que la bonne volonté est indispensable. Sommes-nous prêts maintenant à laisser Dieu nous enlever toutes les choses que nous avions reconnues comme répréhensibles en nous ? Peut-Il maintenant les prendre toutes et chacune ? Si nous nous accrochons encore à quelque chose dont nous ne voulons pas nous départir, nous demandons à Dieu de nous aider à y renoncer.
Quand nous sommes prêts, nous Lui disons quelque chose qui ressemble à ceci : « Mon Créateur, je suis maintenant disposé à ce que Vous preniez tout ce que je suis, bon ou mauvais. Je Vous demande d’ôter de moi chacun des défauts qui m’empêchent de Vous être utile, à Vous et à mes semblables. Accordez-moi la force de faire Votre volonté à partir de maintenant. Ainsi soit-il. » Nous venons de faire la Septième Étape.
Nous devons encore demeurer dans l’action, sans quoi nous découvrirons que « la foi sans les œuvres est une foi morte ». Jetons un coup d’œil à la Huitième et à la Neuvième Étape. Nous avons la liste de toutes les personnes que nous avons lésées et envers qui nous sommes prêts à réparer nos torts. Nous avons dressé cette liste au moment de notre inventaire et à cette occasion, nous nous étions soumis à un examen sévère. Maintenant nous allons vers nos semblables dans le but de réparer le dommage fait dans le passé. Nous tentons de réparer les dégâts que nous avons causés en voulant imposer nos volontés et diriger nous-mêmes le spectacle. Si nous n’avons pas la force de le faire, nous prions jusqu’à ce qu’elle nous soit donnée. Souvenez-vous qu’il était entendu au début que nous ne reculerions devant rien pour vaincre l’alcool.
Sans doute reste-t-il encore quelques réticences. En récapitulant la liste des amis et des compagnons de travail que nous avons blessés, il pourrait arriver que nous soyons peu confiants des résultats d’une démarche à caractère spirituel auprès d’eux. Rassurons-nous. Il n’est pas nécessaire, et probablement pas indiqué, d’aborder certaines personnes en insistant sur le caractère spirituel de notre visite. Nous pourrions éveiller des préjugés chez elles. Pour l’instant, nous tentons de mettre de l’ordre dans notre vie. Cela ne constitue cependant pas une fin en soi. Notre but véritable est de nous préparer à nous mettre en état de servir le plus possible Dieu et les personnes qui nous entourent. Il est rarement sage, en revenant vers un individu encore affecté par les injustices que nous lui avons fait subir, de lui annoncer que nous sommes désormais tournés vers la religion. Dans l’arène, cela équivaudrait à foncer sans penser aux conséquences. Pourquoi nous exposer à nous faire traiter de fanatiques ou de raseurs religieux ? Nous pourrions gâcher toute chance éventuelle de livrer un message positif. Par ailleurs, notre interlocuteur ne pourra qu’être impressionné par notre désir sincère de réparer le tort que nous lui avons causé. Il sera plus intéressé par notre démonstration de bonne volonté que par le récit de nos découvertes spirituelles.
Il ne s’agit cependant pas d’un prétexte pour échapper à la peur de parler de Dieu. Nous sommes prêts à exposer nos convictions avec tact et bon sens quand c’est utile. La question de notre démarche auprès de quelqu’un que nous avons détesté va surgir à son heure. Peut-être cette personne nous a-t-elle causé plus de tort que nous ne lui en avons fait ; en dépit de meilleurs sentiments envers elle, nous ne sommes pas très enthousiastes à l’idée d’admettre nos torts. Avec une personne qui nous est antipathique, nous devons tout de même