« C’était précis, » dit-elle, davantage pour elle-même qu’autre chose.
« C’était une attaque rapide, admit le coroner. Qui que soit le tueur, il savait ce qu’il faisait. Directement par derrière, une seule entaille dans le cou pour l’ouvrir complètement, dans les deux cas. »
Zoe se redressa et regarda Shelley pour bien faire comprendre que l’observation qui allait suivre était pour elle, et non pour l’irritante présence humaine dans la pièce. « Ce n’était pas un crime commis par impulsion. Il a été planifié, l’endroit a été choisi avec soin.
– Penses-tu que les victimes ont été choisies délibérément ? »
Zoe se mordit la lèvre pendant un moment, passant son regard d’un corps à l’autre. Qu’avaient-ils en commun, à part le fait d’être carbonisés ?
« Il est trop tôt pour se prononcer, conclut-elle. Nous devons en savoir plus sur Callie Everard. Si nous pouvons trouver un lien entre les deux, tant mieux. Sinon, il y aura peut-être un message plus important en jeu.
– Un tueur en série ? grogna Shelley. J’espère qu’ils étaient secrètement amants. Je croisais les doigts pour qu’on puisse rentrer à la maison pour le week-end.
– Bonne chance, » surenchérit le coroner, une déclaration qui n’était absolument pas nécessaire.
Zoe lui fit les gros yeux, et fut quelque peu calmée par l’attitude de la femme qui s’éloigna et s’occupa d’un plateau d’instruments en métal situé à proximité, plutôt que de croiser à nouveau son regard.
« Nous avons une salle qui nous attend au commissariat local, dit Shelley. Le flic à qui j’ai parlé m’a assuré que le café est horrible, et que la climatisation est également d’une inefficacité totale, nous avons donc des raisons de nous réjouir.
– Je te suis, » dit Zoe, en souhaitant qu’elle puisse au moins en rire pour atténuer le contre-coup.
CHAPITRE SIX
Tout en soupirant, Zoe choisit une chaise et s’effondra dessus, tendant la main vers le premier dossier qui leur avait été laissé.
« Merci, capitaine Warburton, nous apprécions vraiment votre aide, » disait Shelley près de la porte, recourant aux conversations informelles et aux plaisanteries que Zoe n’avait jamais appréciées.
Cela faisait du bien de faire partie d’une équipe qui fonctionnait. Où chacune avait son rôle à jouer. Shelley était aux personnes ce que Zoe était aux chiffres, et même si aucune des deux ne pouvait vraiment comprendre ce que faisait l’autre, cela rendait au moins les choses plus faciles.
Après une bonne vingtaine de minutes à étudier les dossiers, elles n’étaient pas davantage avancées. Même si la police locale avait réussi à recueillir quelques déclarations de la part des familles et à obtenir beaucoup plus d’informations que dans les dossiers initiaux qu’elles avaient examinés dans l’avion, rien de tout cela ne semblait utile. Zoe jeta ses papiers sur la table avec un grognement de frustration.
« Pourquoi ne peut-il jamais y avoir de lien évident ?
– Parce qu’alors les policiers locaux pourraient le faire, et nous serions sans emploi, dit posément Shelley. Passons en revue ce que nous savons. Parlons-en. Peut-être que quelque chose va coller.
– J’en doute beaucoup. Ces deux personnes étaient tellement différentes.
– Eh bien, commençons par là. John était en bonne santé, n’est-ce pas ? Un adepte de la salle de sport.
– Son colocataire dit qu’il passait presque tout son temps libre à la salle de sport. Il était en bonne forme.
– Et un gars gentil, en plus.
Zoe fit une grimace. « Il donnait de l’argent à des associations caritatives et donnait un coup de main à la soupe populaire le dimanche. Cela ne veut pas nécessairement dire que c’était un type gentil. Beaucoup de gens font des choses comme ça parce qu’ils dissimulent un côté sombre.
– Tu te raccroches à ce que tu peux, dit Shelley, en secouant la tête. Il n’y a rien d’autre à y voir. Il avait un style de vie sain. Pas de drogues, pas de condamnations, même pas de rapport disciplinaire au travail.
– Et elle était tout le contraire. » Zoe adressait cette dernière phrase à la photo d’une Callie Everard souriante, rayonnante devant l’objectif et brandissant une bouteille de bière tandis qu’un jeune homme visiblement ivre l’enlaçait de ses bras autour des épaules.
« Eh bien, peut-être pas. Oui, elle a eu des problèmes de drogue plus tôt dans sa vie. Mais elle a fait des allers-retours en cure de désintoxication à vingt-trois ans, a terminé le programme, a arrêté la drogue. Elle était sevrée depuis quelques années. Remise sur les rails. »
Zoe y réfléchit. « Cela pourrait être quelque chose d’intéressant. Les deux s’étaient mis à vivre sainement, même si ce n’est que récemment.
– Quoi, comme un culte du fitness ou quelque chose dans ce genre ? » demanda Shelley.
Zoe lui lança un regard noir.
« Eh bien, c’est possible, dit Shelley. Regarde tous ces trucs avec les vélos d’exercice. Et ce culte du développement personnel, celui qui incitait les femmes à coucher avec le fondateur et à lui donner tout leur argent.
– Je suppose que tu marques un point » Zoe n’en connaissait pas tous les détails, mais elle avait entendu parler de ces affaires. Shelley avait raison, d’une certaine manière. On ne savait jamais vraiment ce qui se passait dans l’envers du décor avant d’avoir enquêté suffisamment loin.
Elle saisit les photos de ces deux personnes, à la recherche de similitudes. C’était toujours frustrant de tomber sur une affaire comme celle-ci. Avec une seule victime, on pouvait résolument analyser les preuves, en se concentrant sur chaque petit détail en rapport avec cette personne. Avec trois victimes ou plus, on disposait d’assez d’éléments pour établir un schéma. Pour s’apercevoir que le tueur se déplaçait dans une certaine direction, ou qu’il ne visait que des blondes de moins d’un mètre soixante-dix-sept, ou qu’il se trahissait par un rituel qui apparaissait sur chacune des scènes de crime.
Avec deux, c’était beaucoup plus difficile. On ne pouvait pas relier les choses de la même manière. Une similitude parmi les chiffres pourrait n’être qu’une coïncidence qui serait remise en cause par un autre corps. On aurait pu remarquer que leurs âges étaient tous les deux un nombre premier, avant que cela s’avère insignifiant. On ne pouvait pas dire ce qui était important et ce qui n’était qu’une fausse piste élaborée par son propre esprit, sans intention délibérée.
« Il y a une chose qu’ils ont en commun, » dit Zoe en pointant les photos du doigt. « Les tatouages. Dowling avait un tigre sur son biceps gauche. Everard avait une rose sur la cuisse droite, en pointillés. Elle allait également voir un ami pour s’en faire faire un autre. »
Shelley haussa les épaules. « Est-ce que cela constitue vraiment un lien ? Beaucoup de gens ont des tatouages. »
Zoe compulsait d’autres photos, repérant davantage de marques sur les zones de peau qui étaient visibles sur les différents clichés. Elles étaient presque toutes issues des profils des victimes sur les réseaux sociaux, et il semblait qu’ils étaient tous les deux fiers de leurs tatouages. De les exhiber. Est-ce que cela avait du sens ? « Chacun d’entre eux n’avait pas qu’un seul tatouage. Regarde. Ils en étaient tous les deux recouverts. Dowling s’est fait tatouer toute une jambe, jusqu’au pied. Et Everard, ici, sur le dos et le ventre.
– Je ne sais toujours pas si cela signifie quelque chose. C’est juste une tendance culturelle de nos jours. »
Zoe plissa