Œuvres de Napoléon Bonaparte (Tome I-V). Napoleon Bonaparte. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Napoleon Bonaparte
Издательство: Bookwire
Серия:
Жанр произведения: Документальная литература
Год издания: 0
isbn: 4064066388782
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le même soir à M. le maréchal Alvinzi. Le général Clarke a pensé, avec raison, devoir écrire une lettre à l'empereur même, laquelle est partie avec une lettre pour M. Alvinzi.

      Le général Clarke m'a communiqué l'objet de sa mission.

      Si l'on n'eût considéré que la situation de cette armée, il eût été à désirer que l'on eût attendu la prise de Mantoue, car je crains qu'un armistice sans Mantoue ne soit pas un acheminement à la paix, et soit tout à l'avantage de Vienne et de Rome.

      Je vous ferai passer trois notes relatives à l'objet important dont est chargé le général Clarke. J'espère qu'avant peu de jours nous recevrons la réponse de Vienne, et que ce général se rendra à sa destination pour y remplir vos intentions.

      BONAPARTE.

      Au quartier-général à Milan, le 16 frimaire an 5 (6 décembre 1796).

       Au directoire exécutif.

      Le gouvernement de Venise a très-bien traité l'armée autrichienne; il y avait auprès de M. d'Alvinzi des provéditeurs et des approvisionnemens.

      Les Allemands, en s'en allant, ont commis toutes espèces d'horreurs, coupé les arbres fruitiers, brûlé les maisons et pillé les villages. Dans ce moment-ci, les ennemis sont à Trente et sur la Brenta. Nous sommes sur l'Adige, et nous occupons la ligne de Montebaldo; il paraît qu'ils se renforcent considérablement dans le Tyrol, où est dans ce moment-ci M. Alvinzi.

      Il ne nous est encore rien arrivé, et il ne nous est rien annoncé des dix mille hommes du Rhin, ni des dix mille hommes de l'Océan: ces deux renforts nous sont bien nécessaires.

      Si la campagne prochaine a lieu, il faut tourner tous nos efforts du côté du Frioul, et pour cela avoir deux armées en Italie: une dans le Tyrol, qui occupera Trente et qui attaquerait les ennemis; l'autre, dans le Frioul, se porterait à Trieste, et s'emparerait de tous les établissemens des ennemis dans cette mer-là.

      Si vous pouviez faire passer trente mille hommes ici, l'on pourrait les nourrir et les payer, et envahir tout le Frioul; l'empereur serait obligé: 1°. de retirer trente mille hommes du côté du Rhin; 2°, de retenir au moins vingt mille hommes pour seconde ligne, puisque, sans cela, une bataille heureuse compromettrait Vienne: alors on ne ferait presque pas de guerre sur le Rhin, et le théâtre se trouverait très éloigné de chez nous.

      Il n'y a à ce projet qu'une objection, ce sont les maladies que nos troupes gagnent en été en Italie; mais cette assertion est fausse: nous avons eu à cette armée vingt mille malades, sur lesquels quatre mille blessés; des seize mille autres, quatorze mille sont de Mantoue, et deux mille sont du reste de l'armée: ce n'est pas la proportion ordinaire.

      Envoyez-nous donc dix mille hommes du Rhin et dix mille de l'Océan, joignez-y quinze cents hommes de cavalerie, quelques compagnies d'artillerie, et je vous promets, avant le mois de mai, de dégager le Rhin, de forcer l'empereur à une guerre d'autant plus désastreuse, qu'elle sera à ses dépens sur son territoire.

      Mon armée actuelle, renforcée par les dix mille hommes du Rhin et les dix mille de l'Océan que vous m'avez annoncés, est suffisante pour le Tyrol et l'Italie.

      Les dix mille hommes qui assiègent Mantoue, qui seront bientôt douze mille, avec les vingt mille hommes que je vous demande, formeront l'armée du Frioul: avec ces deux armées j'irai à Vienne, ou du moins je me maintiendrai toute la campagne prochaine dans les états de l'empereur, vivant à ses dépens, ruinant ses sujets, en portant la guerre de l'insurrection en Hongrie.

      Enfin, citoyens directeurs, je crois que du prompt départ des dix mille hommes du Rhin peut dépendre le sort de l'Italie; mais que si vous en tirez dix mille autres, et que vous y joigniez dix à quinze mille hommes de l'Océan, vous aurez le droit d'attendre des millions, des succès et une bonne paix. De Trieste à Vienne il y a cent lieues sans places fortes, sans plan de défense arrêté: ce pays-là n'a jamais été le théâtre de la guerre.

      BONAPARTE.

      Au quartier-général à Milan, le 18 frimaire an 5 (8 décembre 1796).

       Au citoyen Auzou.

      J'ai reçu, citoyen, les deux lettres que vous m'avez écrites. Si je ne vous ai pas encore fait dire la raison pour laquelle je vous ai fait arrêter, c'est que j'attendais les installations des nouveaux conseils militaires, qui, étant composés d'officiers, vous donneront des juges plus éclairés et plus dans le cas de vous entendre.

      Je me plains de vous, parce que votre service n'a jamais été organisé dans l'armée et ne s'y est jamais fait; parce que Peschiera n'a jamais été approvisionné; parce que vous n'avez jamais fourni les moyens nécessaires à vos sous-traitans; parce qu'enfin vous avez laissé tomber le service à plat dans un moment critique pour l'armée; enfin parce que vous ne vous êtes jamais trouvé au quartier-général, toutes les fois que votre présence y était nécessaire, c'est-à-dire lorsque l'ennemi était sur le point de nous attaquer.

      C'est par votre coupable négligence que nous avons perdu plusieurs centaines de chevaux, que le service de l'artillerie a considérablement souffert, et que la cavalerie, obligée de courir les champs et de fouiller les fermes pour assurer sa subsistance, s'est souvent portée à des excès propres à nous aliéner l'esprit des habitans; tout cela cependant lorsque votre service a reçu depuis le commencement de la campagne dix-sept à dix-huit cent mille liv., dont vous n'avez certainement pas dépensé le tiers.

      Je vous prie de m'envoyer: 1°. un état des consommations journalières des fourrages dans l'armée, ou un relevé des bons pour un des mois passés; 2°. un état de l'emploi que vous avez fait de l'argent qui vous a été remis; 3°. un état exact de ce que vous avez remis à chacun de vos sous-traitans; 4°. enfin s'il arrivait qu'il y en eût parmi eux qui, par leur conduite ou leur incapacité, et quoique ayant reçu des fonds, eussent fait manquer le service, de me les dénoncer.

      BONAPARTE.

      Au quartier-général à Milan, le 18 frimaire an 5 (8 décembre 1796).

       Au provéditeur-général de la république de Venise.

      Je n'ai pas reconnu, monsieur, dans la note que vous m'ayez fait passer, la conduite des troupes françaises sur le territoire de la république de Venise, mais bien celle des troupes de sa majesté l'empereur, qui partout où elles ont passé, se sont portées à des horreurs qui font frémir.

      Le style de cinq pages, sur les six que contient la note qu'on vous a envoyée de Verone, est d'un mauvais écolier de rhétorique, auquel on a donné pour thèse de faire une amplification. Eh! bon Dieu, monsieur le provéditeur, les maux inséparables d'un pays qui est le théâtre de la guerre, produits par le choc des passions et des intérêts, sont déjà si grands et si affligeans pour l'humanité, que ce n'est pas, je vous assure, la peine de les augmenter au centuple, et d'y broder des contes de fées, sinon rédigés avec motifs, au moins extrêmement ridicules.

      Je donne un démenti formel à celui qui oserait dire qu'il y a eu dans les états de Venise une seule femme violée par les troupes françaises. Ne dirait-on pas, à la lecture de la note ridicule qui m'a été envoyée, que toutes les propriétés sont perdues, qu'il n'existe plus une église et une femme respectées dans le Véronais et le Brescian? La ville de Verone, celle de Brescia, celle de Vicence, de Bassano, en un mot toute la terre ferme de l'état de Venise, souffrent beaucoup de cette longue lutte; mais à qui la faute? C'est celle d'un gouvernement égoïste, qui concentre dans les îles de Venise toute sa sollicitude et ses soins, sacrifie ses intérêts à ses préjugés et à sa passion, et le bien de la nation vénitienne entière à quelques caquetages de coteries. Certes, si le sénat eût été mu par l'intérêt du bien public, il eût senti que le moment était venu de fermer à jamais son territoire aux armées indisciplinées de l'Autriche, et par là de protéger ses sujets et de les garantir à jamais du théâtre de la guerre.

      On me menace de faire naître des troubles et de faire soulever les villes contre l'armée française: les peuples de Vicenzia et de Bassano