« Est-ce qu’elle a demandé à Mercy pourquoi elle avait besoin de ces articles de toilette de voyage ? » demanda Kate.
« Oui. Mercy lui a répondu qu’elle n’avait plus grand-chose chez elle et qu’elle n’avait pas envie de devoir demander à ses parents de lui en acheter. »
« Et aucun petit-ami connu ? » demanda Kate.
« Pas selon Anne. Et elle avait l’air de tout savoir sur Mercy. »
« J’aimerais parler à Anne, » dit Kate. « Est-ce que vous pensez qu’elle serait réceptive à cette idée ou qu’elle serait plutôt réticente ? »
« Elle serait certainement ravie de vous parler, » dit Foster.
« Il a raison, » ajouta Barnes. « Elle nous a même appelés à plusieurs reprises après avoir été interrogée pour savoir si on avait du neuf. Elle est vraiment disposée à aider. Et sa famille aussi, qui nous a laissés lui parler sans aucun problème. Si vous voulez, je peux les appeler pour arranger un rendez-vous. »
« Ce serait formidable, » dit Kate.
« C’est une fille forte, » dit Foster. « Mais juste entre nous… je pense qu’elle cache quelque chose. Peut-être rien de grave en soi. Mais je pense qu’elle veut être sûre de ne rien révéler de négatif concernant sa meilleure amie disparue. »
C’est compréhensible, pensa Kate.
Mais elle savait également que le fait qu’elles soient meilleures amies était une raison plus que suffisante pour ne pas vouloir tout leur raconter.
***
Les parents d’Anne l’avait naturellement autorisée à rester à la maison et à ne pas aller à l’école. Quand Kate et DeMarco arrivèrent à la maison des Pettus – qui était située sur une route similaire à celle où les Fuller vivaient – les parents se trouvaient derrière la porte d’entrée et les attendaient. Kate les vit à travers la porte moustiquaire au moment où elle se garait dans leur allée en forme de U.
Monsieur et madame Pettus sortirent sur le porche pour aller à leur rencontre. Le père avait les bras croisé et un air triste sur le visage. La mère avait l’air fatiguée, elle avait les yeux injectés de sang et les épaules affaissées.
Après une brève présentation, monsieur et madame Pettus allèrent directement au but. Ils ne furent ni impolis, ni insistants, mais ils s’exprimèrent comme des parents préoccupés qui voulaient éviter que leur fille passe par des moments désagréables sans que ce ne soit absolument nécessaire.
« On dirait qu’elle va de mieux en mieux au fur et à mesure qu’elle en parle, » dit madame Pettus. « Je pense que plus le temps passe, plus elle commence à comprendre que sa meilleure amie n’est pas forcément morte. Plus elle commence à envisager le fait qu’elle ait tout simplement disparu, plus elle a envie d’aider à la retrouver. »
« Il n’empêche, » ajouta monsieur Pettus, « que j’apprécierais fortement si vous lui posiez des questions assez brèves et que vous gardiez un ton optimiste. Nous n’allons pas intervenir pendant que vous l’interrogez, mais s’il y a quoi que ce soit qui semble la bouleverser, nous mettrons fin à votre visite. »
« C’est tout à fait compréhensible, » dit Kate. « Et je vous promets que nous ferons très attention à la manière dont nous lui parlons. »
Monsieur Pettus hocha la tête et finit par leur ouvrir la porte d’entrée. Quand elles entrèrent dans la maison, Kate vit tout de suite Anne Pettus. Elle était assise sur le divan, avec les mains serrées entre les genoux. Tout comme sa mère, elle avait l’air fatiguée et bouleversée. Kate savait que les adolescentes avaient tendance à avoir des liens très fort avec leurs meilleures amies. Elle ne pouvait imaginer la quantité d’émotions qui devaient traverser cette pauvre jeune fille.
« Anne, » dit madame Pettus. « Voici les agents dont nous t’avons parlé. Est-ce que tu veux toujours bien répondre à leurs questions ? »
« Oui, maman. Ça va aller. »
Les parents firent un petit signe de la tête en direction de Kate et DeMarco et ils prirent place de chaque côté de leur fille. Kate remarqua qu’Anne commença vraiment à être mal à l’aise au moment où ses parents se retrouvèrent à côté d’elle.
« Anne, » dit Kate, « on va essayer de faire vite. On nous a déjà raconté tout ce que tu as dit à la police, alors nous n’allons pas te demander de tout répéter à nouveau. À une seule exception. J’aimerais en savoir plus concernant les achats que Mercy a faits à Harrisonburg. Elle y a acheté plusieurs articles de toilette de voyage, c’est bien ça ? »
« Oui. J’ai trouvé ça bizarre. Elle s’est contentée de me dire qu’elle n’avait plus grand-chose chez elle. Du dentifrice, une petite brosse à dents, du déodorant, ce genre de choses. Je lui ai demandé pourquoi c’était elle qui les achetait et pas ses parents, mais elle a en quelque sorte éludé la question. »
« Est-ce que tu penses qu’elle était heureuse à la maison ? »
« Oui. Mais bon… elle a quinze ans. Elle adore ses parents mais elle déteste cet endroit. Elle parle de quitter Deton depuis qu’elle a au moins dix ans. »
« Est-ce que tu sais pourquoi ? » demanda DeMarco.
« Il n’y a rien à faire ici, on s’ennuie, » dit Anne. Elle regarda ses parents d’un air désolé. « Je suis juste un peu plus âgée que Mercy. J’ai seize ans et j’ai mon permis. Et parfois, on allait se promener ensemble pour faire du shopping, aller voir un film. Mais il faut au moins rouler une heure pour pouvoir faire ce genre de choses. Il n’y a rien à faire à Deton. »
« Est-ce que tu sais où elle aurait voulu aller ? »
« À Palm Springs, » dit Anne, en riant. « Elle avait vu une série avec des gens qui faisaient la fête à Palm Springs et elle avait beaucoup aimé. »
« Est-ce qu’elle envisageait d’aller à une université en particulier ? »
« Je ne pense pas. Sur le peu d’informations qu’on a reçu à l’école concernant des universités, elle avait montré de l’intérêt pour l’université de Virginie et celle de Wake Forest, en Caroline du Nord. Mais… je ne sais pas si ça l’intéressait vraiment. »
« Est-ce que tu peux nous parler de Charlie ? » demanda Kate. « Nous avons vu son nom dans son journal intime et nous savons qu’ils étaient au moins assez proches pour échanger un rapide baiser entre deux cours. Mais selon la police, tu as dit que Mercy n’avait pas de petit-ami. »
« Non, elle n’en a pas. »
Kate remarqua que le ton d’Anne changea légèrement à ces mots. Elle avait également l’air un peu plus tendue. Apparemment, c’était un sujet sensible. Mais vu qu’elle n’avait que seize ans et que ses parents étaient assis à côté d’elle, Kate savait qu’elle ne pouvait pas l’accuser directement de mentir. Il lui fallait adopter une autre approche. Peut-être qu’il y avait des choses concernant son amie qu’elle ne voulait tout simplement pas dire à haute voix.
« Alors Charlie et elle étaient juste amis ? » demanda Kate.
« En quelque sorte. Je pense qu’ils s’aimaient bien mais qu’ils ne voulaient pas vraiment sortir ensemble. Vous comprenez ? »
« Est-ce qu’elle a fait d’autres choses avec Charlie, hormis le fait d’échanger un baiser ? »
« Si c’était le cas, Mercy ne m’en a jamais parlé. Et elle me racontait tout. »
« Est-ce que tu sais si elle cachait des choses à ses parents ? »
Kate remarqua à nouveau qu’Anne avait l’air un peu mal à l’aise. Ce fut un bref instant et une expression fugace