Keira commença à feuilleter le livre en lisant tous les noms de couples heureux. Certains incluaient des photos, d’autres des dates de mariage. Il y avait des cartes adressées à William par des couples qu’il avait mis ensemble. Tout cela semblait très kitsch. Keira, toujours en train de calculer, commença à formuler dans sa tête un paragraphe pour son article.
« Vous savez », dit William, en se penchant sur la table vers elle. « Je pourrais vous trouver quelqu’un. Peut-être qu’un gentil garçon irlandais est exactement ce dont vous avez besoin. »
Keira sentit ses joues brûler. « J’ai un petit ami », dit-elle. Peut-être l’avait-elle imaginé, mais du coin de l’œil elle avait cru voir Shane tressaillir. « Zach. Il travaille dans les ordinateurs. »
« Vous êtes heureuse avec cet homme ? », demanda William.
« Oui, très », répondit Keira en ressortant la vieille rengaine.
William n’eut pas l’air convaincu. Il tapota le livre que Keira avait posé sur le bureau. « Je fais ça depuis longtemps. Je suis un expert en amour et je peux le voir dans les yeux des gens. Je ne suis pas si certain que cet homme vous convienne. »
Keira savait qu’il n’essayait pas d’être impoli, mais son scepticisme touchait un point sensible, surtout alors qu’elle et Zach se disputaient beaucoup en ce moment. Mais William était aussi de l’or en terme de journalisme et elle en voulait en tirer autant de choses que possible.
« Pas celui qui me convient de quelle manière ? »
« Il ne vous soutient pas comme vous en auriez besoin. Vous ne grandissez plus ensemble, ne suivez plus le même chemin. »
Keira sentit des frissons la parcourir. C’était bien trop proche de la vérité.
« Vous êtes une diseuse de bonne aventure aussi bien qu’un entremetteur ? », plaisanta-t-elle. « Vous cachez un tas de cartes de tarot là dessous ? »
William laissa échapper un rire gras. « Oh non, rien de tel. Mais j’ai développé une intuition au fil des ans. Il n’y avait aucune étincelle dans vos yeux quand vous avez dit son nom. Pas d’inflexion dans votre voix. »
« Je pense que c’est juste ma personnalité cynique de new-yorkaise », dit Keira.
« Peut-être. Ou peut-être est-ce parce que vous ne l’aimez pas vraiment. »
Keira réfléchit à cette déclaration. Elle et Zach échangeaient rarement le mot A–. En fait, elle ne pouvait même pas se souvenir de quand ils l’avaient fait pour la dernière fois.
« Je ne pense pas que l’amour doive toujours entrer en compte pour ces choses-là », dit-elle.
« Mais pourquoi perdre votre temps avec quelqu’un que vous n’aimez pas alors que vous pourriez être à la recherche du Bon ? »
Keira croisa les bras. « Parce que peut-être il n’y a pas de Bon. »
« Vous ne croyez pas au Bon ? », insista William.
Keira secoua la tête. « Nan. »
Cet aveu parut exciter William. « Nous avons une pessimiste », s’exclama-t-il en riant. « Ce qui signifie que c’est notre défi de vous faire changer d’avis. Shane, mon garçon ? » Il fit signe au guide de venir, ce qu’il fit. Une fois à côté de lui, William passa un bras autour de ses épaules. « Tu as été promu », plaisanta-t-il. « Tu n’es plus seulement là pour guider cette jeune femme à travers le festival, tu dois la guider vers le véritable amour. Je crains que ce ne soit un défi de taille ! »
Keira s’agita, mal à l’aise, sur son siège. Mais malgré sa gêne d’être au centre de cette étrange réunion, elle savait qu’elle avait rassemblé un excellent matériel pour son article, grâce au vieil homme gâteux et à ses opinions archaïques sur les relations amoureuses. Elliot allait adorer ça. Et l’écrire, pour Keira, serait en quelque sorte thérapeutique.
Elle devait juste passer sa première journée avec Shane et ensuite elle pourrait de se purger de toute cette bêtise en écrivant.
CHAPITRE CINQ
« Je ne sais pas combien de temps ce trajet est censé durer », dit Keira tout en montant côté passager dans la voiture de Shane et en tripotant sa ceinture de sécurité. « Mais j’ai besoin d’un café dès que possible. Et si vous pouviez me ramener pour que j’aie quelques heures de libres avant le début du festival ce serait génial. J’ai besoin d’avoir quelques bonnes heures d’écriture. » Elle finit par s’attacher. « Alors, où allons-nous ? »
Quand elle n’eut pas de réponse de Shane, elle jeta un coup d’œil pour le voir arborer son expression amusée caractéristique. Elle croisa les bras. « Quoi ? »
Il lui adressa un haussement d’épaules. « Eh bien, ce n’est guère un temps pour les lunettes de soleil, c’est tout ce que je pensais. »
Keira poussa résolument ses lunettes de soleil sur son nez. « Il pourrait y avoir une lumière forte le matin », répondit-elle, grimaçant face à au dédain qu’elle entendait dans sa voix. « Et de toute façon, vous pouvez difficilement juger de la tenue de quelqu’un d’autre. Est-ce que vous avez utilisé un miroir pour vous habiller ce matin ? »
Shane inclina la tête en arrière et rit avec désinvolture. Keira sentit ses lèvres tressaillir de satisfaction, puis se maîtrisa. Elle venait tout juste de se permettre de faire un pas de plus vers l’idée de flirter avec lui, ce qui ne faisait certainement pas partie de la philosophie du il n’y rien de mal à regarder !
« Je pensais vous emmener quelque part non loin pour commencer », lui dit Shane alors qu’il accélérait dans la rue principale. « J’ai donc choisi le Burren, qui n’est qu’à vingt minutes de route. C’est un parc national. Vous en avez entendu parler ? »
Keira secoua la tête. « Je suis impatiente », dit-elle, tandis que l’image d’un beau paysage irlandais se formait dans son esprit.
Elle n’était pas sûre, mais elle pensait avoir vu Shane sourire en coin. Quand ils s’arrêtèrent sur le parking du Burren vingt minutes plus tard, elle comprit pourquoi. Il n’y avait pas un brin d’herbe en vue ! Le Burren était fait de pierre grise et morne.
Elle se tourna vers Shane en fronçant les sourcils. « C’est une plaisanterie ? Je pensais que vous aviez dit que c’était un parc national. »
Shane se mit à rire. « Ça l’est ! Un hectare et demi de terres protégées, constituées presque entièrement de calcaire. »
Keira laissa échapper un soupir d’exaspération. « Alors de tous les endroits où vous auriez pu m’emmener pour me montrer la majesté de l’Irlande, vous avez choisi ça. »
« J’ai détecté des vibrations prétentieuses chez William », dit Shane, levant un sourcil pugnace. « Je pensais que ce serait le meilleur endroit pour vous faire arrêter de prendre de grands airs. L’Irlande n’est pas une sorte de terre fantastique peuplée de leprechauns, bien qu’il y en ait quelques parties qui jouent sur les stéréotypes pour les touristes. Mais si vous creusez un peu sous la surface, nous sommes un pays avec un vrai cœur, un véritable charme. Nous avons une histoire riche et intéressante, si vous vous laissez nous donner une chance. »
Keira croisa les bras. Tout ce qu’il avait dit à propos d’elle était vrai, bien sûr, mais elle n’allait pas l’admettre. « Je ne suis pas snob », dit-elle.
Shane haussa simplement les épaules. « Venez, par ici. La vue depuis le sommet de la colline est incroyable. »
Keira suivit. « Je