Mais Oliver ne se sentit pas menacé du tout. Pas même un peu.
— Toi ! beugla Chris. Je sais que c’est toi ! Je l’ai toujours su ! Tu as des pouvoirs étranges, n’est-ce pas ? Tu es un monstre !
Il se rua vers Oliver.
Mais Oliver avait déjà deux longueurs d’avance. Il poussa avec ses pouvoirs, recouvrant le sol sous les pieds de Chris d’une huile épaisse et glissante. Chris commença à vaciller, puis à chanceler et à glisser. Il ne parvint pas à garder l’équilibre et tomba à plat sur ses fesses. Il dérapa sur le sol, glissant à toute vitesse vers Oliver comme s’il était sur un toboggan.
Oliver ouvrit la porte de sortie. Chris passa juste devant lui et la franchit, hurlant tout du long. Il glissa dans la cour et poursuivit sa route, porté par la traînée invisible d’huile d’Oliver jusqu’à disparaître au loin.
— Au revoir ! s’écria Oliver en lui faisant un signe de la main.
Avec un peu de chance, c’était la dernière fois qu’il voyait Christopher Blue.
Il claqua les portes et tourna les talons.
La tête haute, Oliver se fraya un chemin à travers le réfectoire sens dessus dessous et passa d’un pas assuré dans les couloirs de Campbell Junior High. Il ne s’était jamais senti mieux. Rien ne pourrait dépasser ce sentiment.
Quand il atteignit la sortie, il poussa la double porte principale des deux mains. Une rafale d’air pur et froid le frappa. Il prit une profonde inspiration, se sentant redynamisé.
Et c’est alors qu’il la vit.
Debout au bas des marches, les yeux levés, se tenait une silhouette solitaire. Cheveux noirs. Yeux vert émeraude.
Oliver ne pouvait pas y croire. Son cœur fit un bond, battant soudainement à mille pulsations par minute dans sa poitrine. Son cerveau se mit à tourner tandis qu’il essayait désespérément de comprendre comment… pourquoi…
Ses mains devinrent moites. Sa gorge devint sèche. Un frisson d’excitation parcourut sa colonne vertébrale.
Car devant lui se tenait une vision magnifique.
Ce n’était nul autre qu’Esther Valentini.
CHAPITRE SIX
« Esther ? s’exclama Oliver.
Il la tenait par les épaules, admirant chacun de ses traits. Il ne pouvait pas en croire ses yeux.
— Oliver. Le visage d’Esther se fendit d’un sourire. Elle l’enlaça de ses bras. Je t’ai trouvé.
Sa voix était si douce, comme du miel. Elle chantait dans ses oreilles. Oliver la serra contre lui. C’était si merveilleux de passer ses bras autour d’elle. Il pensait ne plus jamais la revoir.
Mais ensuite, il s’arracha à son étreinte, soudain alarmé.
— Pourquoi es-tu ici ?
Esther lui adressa un sourire malicieux.
— Il y a une machine à remonter le temps à l’école. Cachée dans le kapok. J’ai remarqué un petit X gravé dessus et puisqu’il y a un X sur chaque porte que seuls les professeurs sont autorisés à utiliser, j’ai pensé que cela voulait dire qu’il y avait une entrée à l’intérieur. J’ai donc rôdé un peu autour, vu quelques professeurs disparaître et compris qu’il devait y avoir une machine à remonter le temps. Strictement interdite aux élèves, bien sûr.
Oliver secoua la tête. Bien sûr, la brillante et talentueuse Esther Valentini pouvait trouver une machine à remonter le temps cachée. Mais personne ne voyagerait grâce à l’une d’elles sans une très bonne raison, surtout pour venir dans une chronologie à laquelle on n’appartenait pas ! D’après ce que Oliver avait appris à l’École des Prophètes, passer beaucoup de temps dans la mauvaise chronologie exerçait une réelle pression sur le corps. En effet, il avait éprouvé une sensation plutôt étrange rien qu’en retournant dans la sienne.
Et sans parler du sacrifice. Il n’y avait aucune garantie de revenir un jour. Quitter l’École des Prophètes avait brisé le cœur d’Oliver et il ne l’avait fait que pour sauver la vie d’Armando. Donc quelque chose avait dû conduire Esther à venir ici. Une quête, peut-être. Une mission. Peut-être l’école était-elle à nouveau en danger ?
— Pas comment ? dit Oliver. Pourquoi ?
À sa grande surprise, Esther sourit.
— Tu m’as promis un deuxième rendez-vous.
Oliver fit une pause, fronçant les sourcils.
— Tu veux dire que tu es venue ici pour moi ?
Il ne pouvait pas le comprendre. Esther pourrait ne jamais revenir. Elle pourrait rester coincée dans la mauvaise chronologie pour toujours. Et elle l’avait fait pour lui ?
Ses joues rosirent. Elle essaya de le minimiser d’un haussement d’épaules, devenant soudainement timide.
— Je pensais que tu aurais besoin d’aide.
Même s’il ne pouvait pas le comprendre, Oliver était reconnaissant du sacrifice qu’Esther avait fait. Elle pourrait bien être coincée dans la mauvaise chronologie pour toujours et elle l’avait fait pour lui. Il se demandait si cela voulait dire qu’elle l’aimait. Il ne pouvait pas penser à une autre raison pour laquelle quelqu’un pourrait se mettre dans cette situation.
Cette pensée réchauffa tout son corps. Il changea rapidement de sujet, se sentant soudain timide et embarrassé.
— Comment s’est passé le voyage dans le temps ? demanda-t-il. Tu es arrivée ici indemne ?
Esther se tapota l’estomac.
— J’ai été un peu malade. Et ça m’a donné un terrible mal de tête. Mais c’est tout.
À ce moment-là, Oliver se souvint de l’amulette. Il la sortit de sous sa salopette.
— Le professeur Amethyst m’a donné ceci avant que je parte.
Esther toucha l’amulette avec ses doigts.
— Un détecteur de portail ! Ils se réchauffent quand on est près d’un trou de ver, pas vrai ? Elle sourit un peu. Cela pourrait bien nous guider un jour jusqu’à l’École des Prophètes.
— Mais elle est d’un froid glacial depuis que je suis arrivé ici, dit sombrement Oliver.
— Ne t’inquiète pas, lui dit-elle. Nous ne sommes guère pressés. Nous avons tout le temps que nous voulons. Elle sourit à sa propre blague.
Oliver rit aussi.
— J’ai une nouvelle quête, lui dit Oliver.
Les yeux d’Esther s’écarquillèrent d’excitation.
— C’est vrai ?
Il acquiesça et lui montra la boussole. Esther l’observa, intriguée.
— Elle est belle. Qu’est-ce que ça veut dire ?
Oliver pointa les cadrans et les étranges symboles hiéroglyphiques.
— Elle me guide jusqu’à mes parents. Ces symboles représentent certains endroits ou certaines personnes. Tu vois, ce sont mes parents.
Il désigna le cadran qui n’avait jamais bougé, celui qui restait fixé sur l’image d’un homme et d’une femme se tenant par la main.
— Ces autres cadrans semblent changer en fonction