Oui, c'est ainsi que Ménélaos, voyant la gorge nue d'Hélénè, jeta, je crois, son épée.
Mais si nos maris nous laissent là, malheureuse?
Alors, selon le mot de Phérékratès, on écorchera une chienne écorchée.
Viande creuse que ces contrefaçons! Mais s'ils nous prennent et nous entraînent de force dans la chambre?
Cramponne-toi aux portes.
Et s'ils frappent, que faire?
Céder, mais de mauvaise grâce. Il n'y a pas de plaisir à cela, quand on y met de la violence. Il faut les tourmenter de toutes les manières. Sans doute ils seront vite à bout. Jamais l'homme n'éprouvera une vraie jouissance, si la femme n'y a point de part.
Si c'est là votre avis, c'est aussi le nôtre.
Nous déciderons nos maris à faire la paix tout à fait loyalement et sans détour. Mais la cohue athénienne, comment l'amènera-t-on à ne pas déraisonner?
N'aie crainte, nous nous chargeons des nôtres.
Non pas, tant que leurs trières auront des pieds, et qu'il y aura une masse inépuisable d'argent chez la Déesse.
De ce côté même tout est bien préparé. Nous nous emparerons aujourd'hui de l'Akropolis: il est enjoint aux plus âgées d'accomplir le fait; d'après nos prescriptions, elles feindront d'offrir un sacrifice, et elles se rendront maîtresses de l'Akropolis.
Tout ira pour le mieux, de la manière que tu dis.
Et pourquoi, tout de suite, Lampito, ne pas nous engager par un serment inviolable?
Prononce le serment, et puis nous jurerons.
Bien dit. Où est la femme skythe? Que regardes-tu? Pose ici un bouclier renversé, et qu'on m'amène la victime.
Lysistrata, quel serment nous feras-tu jurer?
Lequel? Sur un bouclier, comme autrefois dans Æskhylos, après avoir immolé une brebis.
Garde-toi, Lysistrata, de jurer sur un bouclier, quand il s'agit de la paix.
Quel sera donc alors notre serment?
Si nous prenions un cheval blanc, pour le sacrifier?
Où trouver un cheval blanc?
Sur quoi jurerons-nous donc?
Eh bien! moi, de par Zeus! si tu le veux bien, je vais te le dire. Plaçons là une grande coupe noire creuse: immolons dedans une amphore de vin de Thasos, et jurons sur cette coupe de n'y point verser d'eau.
Par la Terre! quel ineffable serment! Comme je l'approuve!
Qu'on apporte de l'intérieur une coupe et une amphore.
O femmes chéries, le superbe vase! Quelle joie pour quiconque s'en empare sur-le-champ!
Prends-le et mets la main sur la victime: «Divine Persuasion, et toi, Coupe amie de la joie, fais un favorable accueil aux offrandes des femmes.»
Quel beau sang! Que la couleur en est vermeille!
Et il a un bouquet délicieux, j'en jure par Kastor!
Femmes, laissez-moi jurer la première.
Non pas, par Aphroditè! puisque le sort ne t'a pas désignée.
Lampito, mettons toutes la main sur la coupe, et que l'une de vous répète, en votre nom, ce que moi je vais dire. Vous, faites le même serment et observez-le. «Aucun amant ni aucun époux…
«Aucun amant ni aucun époux…
«Qui vienne à moi, tête levée.» Dis.
«Qui vienne à moi, tête levée.» Hélas! mes genoux fléchissent, Lysistrata.
«Chez moi je mènerai une vie de recluse…
«Chez moi je mènerai une vie de recluse…
«Vêtue d'une robe jaune, et bien parée…
«Vêtue d'une robe jaune, et bien parée…
«Afin que mon mari s'éprenne vivement de moi.
«Afin que mon mari s'éprenne vivement de moi.
«Jamais, de bon gré, je ne céderai à mon mari…
«Jamais, de bon gré, je ne céderai à mon mari…
«Et si, malgré moi, il me prend de vive force…
«Et si, malgré moi, il me prend de vive force…
«Je m'y prêterai mal, et sans faire un mouvement…
«Je m'y prêterai mal, et sans faire un mouvement…
«Et je ne lèverai point au plafond mes jambes chaussées à la perse…
«Et je ne lèverai point au plafond mes jambes chaussées à la perse…
«Et je ne me tiendrai pas comme une lionne sur un couteau à fromage.
«Et je ne me tiendrai pas comme une lionne sur un couteau à fromage.
«Fidèle à ce serment, je pourrai boire de ce vin…
«Fidèle à ce serment, je pourrai boire de ce vin…
«Si je l'enfreins, que l'eau remplisse cette coupe!
«Si je l'enfreins, que l'eau remplisse cette coupe!»
Le jurez-vous toutes?
Oui, de par Zeus!
Voyons, alors, je sacrifie la victime.
Laisse-m'en une part, ma chère, pour cimenter dès à présent notre mutuelle affection.
Quels sont ces cris?
C'est ce que je vous disais. Les femmes sont à l'Akropolis de la Déesse: elles s'en sont emparées. Pour toi, Lampito, va-t'en mettre ordre à toutes nos affaires, et laisse-nous celles-ci en otages. Nous, rendons-nous avec les autres à l'Akropolis, et formons-y une barricade de poutres.
Ne crois-tu pas que les hommes ne vont pas tarder à se mettre en campagne contre nous?
Je ne m'en soucie guère. Ni les menaces, ni la flamme, dont leur venue s'armera, ne leur feront ouvrir ces portes, s'ils