Si nous parvenons ainsi à méditer régulièrement, tous les jours à la même heure ou aux mêmes heures, nous nous habituerons à les considérer comme étant celles de nos sessions de méditation et notre pratique en sera grandement facilitée. Il est également recommandé de débuter par des sessions courtes auxquelles nous devrions mettre fin quand nous sommes dans de bonnes dispositions, avant que notre esprit ne soit gagné par la fatigue ou l’ennui. Ainsi nous surprendrons-nous à nous réjouir de notre prochaine session et nous aurons encore envie de méditer.
De plus, en passant d’une session satisfaisante à une autre, notre pratique deviendra tout naturellement plus efficace. Par contre, si nous méditons trop longtemps, notre esprit ressentira de la fatigue, deviendra peu clair et confus. Et si nous nous entêtons à poursuivre la session, nous ne pourrons développer aucune stabilité d’esprit ni aucun contrôle. En méditant jusqu’à l’ennui, nous risquons de ne plus avoir aucun désir d’aborder une autre session. A la seule vue de notre coussin de méditation, nous nous sentirons dégoûtés.
Nous devons faire preuve de beaucoup d’habileté dans notre façon de nous engager dans la méditation et d’en poursuivre la pratique. Il est important d’être conscient de ce qui peut être fait et de ce qui doit être évité. Si ces points sont respectés, les sessions de méditation seront efficaces et satisfaisantes. Au fur et à mesure que nous nous familiariserons avec la pratique, nous pourrons progressivement prolonger les sessions.
Dans le développement de la pratique de la méditation, il est tout d’abord essentiel d’accomplir des préparatifs adéquats. Lorsque nous souhaitons, par exemple, construire une maison, nous commençons par rassembler les matériaux nécessaires. Sans cela, aucune construction ne peut se faire. Par contre, si les préparatifs ont été correctement effectués, la construction du bâtiment peut progresser aisément. Ainsi en est-il dans la pratique de la méditation.
Lorsque nous commençons vraiment à méditer, il est primordial de savoir reconnaître et identifier les différents obstacles et interférences susceptibles de surgir sur le chemin. S’ils nous sont familiers, nous pouvons alors prendre les mesures nécessaires pour les éviter et les éliminer. Les difficultés principales rencontrées dans la méditation, ainsi que dans d’autres pratiques du Dharma et même dans nos activités quotidiennes, naissent en dépendance des six consciences sensorielles ou «portes» des sens, c’est-à-dire les consciences visuelle, auditive, olfactive, gustative, tactile et mentale. Afin d’éviter les difficultés ou les obstacles qu’elles engendrent, nous devons exercer notre vigilance sur «les six portes des nos sens». Ceci s’accomplit en utilisant conjointement les facteurs mentaux de l’attention et de la vigilance. De façon générale, ce sont les deux facteurs mentaux les plus importants utilisés dans la pratique de la méditation. Quand nous travaillons, nous utilisons nos mains ; quand nous méditons, nous utilisons l’attention et la vigilance. Le facteur mental de la vigilance vérifie et analyse notre état d’esprit d’instant en instant. S’il nous manque, l’efficacité de nos actions se verra grandement réduite. Quant à l’attention ou souvenir, il s’agit de l’agent principalement utilisé pour garder les portes des sens. Il peut facilement être reconnu, par exemple, comme étant ce qui dans notre esprit nous permet de nous souvenir des meubles de notre maison lorsque nous sommes hors de chez nous. Ce facteur mental est présent en chacun de nous comme un aspect de notre propre esprit.
Dans notre pratique, l’attention nous permet de nous souvenir de l’objet de concentration et de ses différentes caractéristiques. Sans l’attention, toute méditation serait impossible car nous oublierions l’objet de notre pratique. Même dans nos activités quotidiennes, elle nous est de la plus grande importance car si elle nous fait défaut, nous oublions ce que nous sommes en train de faire. De ce fait, si nous voulons que notre pratique soit couronnée de succès, nous devons faire appel à l’attention car c’est elle qui nous permet de saisir l’objet de méditation. De simples instants d’attention ne sont pas suffisants non plus. Il s’agit de développer la capacité de maintenir une conscience continue de l’objet de méditation. En reconnaissant les avantages de l’attention, en sachant à quel point elle est indispensable dans la méditation pour parvenir à un résultat et en étant conscients de son fonctionnement et de l’aide qu’elle apporte à notre pratique, nous devons développer le désir de cultiver activement ce facteur mental.
Dans la pratique, la façon dont est utilisée l’attention pour garder les portes des sens consiste à l’appliquer sur chacun des six sens pour le protéger de son propre objet de perception. Par exemple, nous devons contrôler notre regard et empêcher nos yeux de suivre n’importe quel objet visuel plaisant se présentant à lui. Ce processus ne doit pas seulement être mis en pratique lors des sessions de méditation formelles mais tout au long de nos activités journalières.
En général, on parle de trois types d’objets sensoriels : les objets attrayants, déplaisants et neutres. Lorsque nous percevons un objet sensoriel attrayant, nous éprouvons du plaisir. Dans la plupart des cas, cette expérience plaisante entraîne de l’attachement. Pour mettre en œuvre la surveillance des portes des sens, au moment où l’une des six consciences sensorielles perçoit un objet agréable, une fois que l’on en a reconnu le caractère attrayant, il faut empêcher la production de l’attachement envers cet objet. Ceci est une des fonctions de l’attention. Nous pouvons y arriver en tenant l’esprit en alerte lorsque nous percevons un objet attirant et en nous rappelant avec quelle facilité l’attachement apparaît. Conscients de ce danger, nous pouvons alors empêcher l’émergence de l’attachement. Cette méthode s’applique de la même manière à toutes les perceptions sensorielles.
D’ordinaire, la rencontre avec des objets déplaisants donne lieu à de l’insatisfaction ou à des souffrances dans notre esprit. En dépendance de cela survient l’aversion. Par exemple, lorsque nous rencontrons une personne que nous n’aimons pas, ce processus s’enclenche très facilement. Là aussi, nous devons appliquer l’attention pour surveiller nos sens. Nous devons rapidement nous souvenir que si nous sommes inattentifs, nous risquons de nous mettre facilement en colère sans raison apparente. Dès que l’objet apparaît à notre conscience et avant que la colère n’ait l’occasion de poindre, nous devons rester sur nos gardes.
En général, ce genre de pratique est plus facile à réaliser pour quelqu’un qui a une attitude d’esprit ouverte et détendue que pour une personne qui est crispée et frustrée. Cependant, l’idéal serait une attitude d’esprit équilibrée car, si l’on est trop détendu, on peut finir par négliger l’étude et la pratique pour leur préférer le sommeil.
Que les objets rencontrés soient plaisants ou déplaisants, cette méthode doit être employée. Le mieux serait d’arriver par cela à empêcher l’apparition de l’attachement ou de l’aversion et à maintenir un état d’esprit sain. Nous devrions pour le moins essayer de garder l’esprit dans un état neutre et éviter la production de toute action non vertueuse. En restant attentifs dans toutes nos activités, nous serons en mesure de contrôler notre attachement, notre aversion et les autres facteurs mentaux négatifs. Si nous ne faisons aucun effort pour développer l’attention dans nos actions de tous les jours, l’attachement et l’aversion se produiront avant que nous soyons capables de les arrêter. Si par contre nous nous y exerçons quotidiennement, elle sera à notre service lorsque nous en aurons besoin avant qu’il ne soit trop tard.
Il y a également un autre moyen de travailler sur les perturbations mentales, mais celui-ci se pratique avant d’entrer en contact avec les objets. Il consiste à considérer les fautes ou les maux qui pourraient survenir à la suite de la contamination de notre esprit par des perturbations mentales. Si, par exemple, nous savons qu’un objet particulier fait naître en nous de l’attachement ou de l’aversion, nous devons éviter d’entrer en contact avec lui, empêchant de ce fait que ne se produisent ces aspects négatifs de l’esprit. Si nous n’évitons pas ce contact, non seulement cet objet peut faire apparaître l’attachement