—C'est singulier, murmura-t-il en se frottant le front, il me semble que je vous connais, en effet. Mais où vous ai-je vue? Mes idées sont un peu troubles; il doit y avoir bien longtemps.
—En effet, il y a très longtemps, Monsieur. Ne vous en souvient-il pas? il y avait un enfant, un tout petit enfant, qui jouait avec vous lorsque vous demeuriez encore à Ruysbroeck avec vos parents.
—Un enfant, balbutia-t-il d'une voix presque imperceptible. Un petit enfant, avec des yeux bleus et une chevelure blonde toute bouclée?
—Comme vous dites, Monsieur.
—Ciel! Cet enfant? la petite Caroline Wouters! Vous?
—Moi-même, Monsieur.
—Ah! mon Dieu, et c'est vous, Caroline, qui avez aidé à me ramasser dans la boue?
Et, courbant la tête, il grogna tout bas:
—Damnation! Et la honte ne me fait pas entrer sous terre!
—Voyez-vous bien, mère, s'écria Lina, qu'il ne l'a pas encore oublié.
—Oublié! répéta-t-il avec une confusion douloureuse. Oublié! ces jours d'innocence, de paix et de pureté! C'est la seule lueur, la seule étincelle lumineuse qui brille parfois encore dans mon âme flétrie!
La jeune fille s'approcha de lui et lui dit avec une douceur insinuante:
—Ne soyez pas si contrarié, monsieur Steenvliet. C'est un accident qui peut arriver à tout le monde. Vous êtes un peu malade; mais ça se guérit très vite. Prenez courage. Ça ne vous arrivera plus.
—Ne plus m'arriver? grogna-t-il avec une sombre ironie. Je l'ai dit et espéré tant de fois moi-même. Maintenant il est trop tard. Je suis un être sans force et sans énergie. La vie m'est à charge. Ah! si je pouvais mourir.
Lina poussa un cri d'angoisse. Des larmes brillaient dans ses yeux. Le jeune homme la regarda un instant avec hésitation.
—Vous pleurez? dit-il avec étonnement. Vous avez pitié de moi?
Merci, Caroline; mais je ne le mérite pas.
—Ah! comment est-il possible? gémit la jeune fille. Lui, le bon, le généreux enfant! qui me tira un jour de la rivière au péril de sa vie et qui me sauva de la mort. Il serait devenu un mauvais sujet? un vaurien? un homme corrompu? Et je ne pleurerais pas sur un pareil malheur?
—Je vous ai sauvé la vie? Moi? Mais non; mais non.
—Comment pouvez-vous l'avoir oublié, Monsieur? En moi, du moins, le souvenir reconnaissant de votre bienfait ne s'est point effacé. Et vous revoir ainsi malade, désespéré, malheureux—car vous êtes malheureux—cela me déchire le cœur!
Elle poussa un sanglot et cacha son visage dans ses mains.
Profondément touché de l'affliction de la jeune fille, Herman
Steenvliet sentit les larmes monter à ses yeux.
Il fit un pas vers le vieillard, éleva les mains vers lui en s'écriant:
—Oubliez l'injure que je vous ai faite, je ne vous connaissais pas; je suis un misérable… Pardonnez-moi… Adieu.
En achevant ces mots il quitta ses hôtes ébahis; et s'enfuit hors de la maison dans la direction du village.
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