Une Cour de Voleurs . Морган Райс. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Морган Райс
Издательство: Lukeman Literary Management Ltd
Серия: Un Trône pour des Sœurs
Жанр произведения: Героическая фантастика
Год издания: 0
isbn: 9781640292949
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les appartements privés de la Douairière. Pour être honnête, Angelica fut un peu déçue par la grandeur ordinaire de leur design, qui était démodée depuis au moins vingt ans. Il y avait trop de panneaux de bois sombre à son goût et, bien que les dorures et les soieries du reste du palais soient visibles çà et là, l'endroit n'avait quand même pas la moitié de l'extravagance qu'Angelica aurait pu choisir.

      “Vous vous attendiez à quelque chose de plus élaboré, ma chère ?” demanda la Douairière. Elle était assise près d'une fenêtre qui donnait sur les jardins, sur une chaise en bois sombre et en cuir vert. Une table en marqueterie se trouvait entre elle et un autre siège qui n'était que légèrement plus bas. Elle portait une robe de jour relativement simple plutôt que luxueuse et un bandeau au lieu d'une couronne régulière mais l'autorité de cette vieille dame ne faisait quand même aucun doute.

      Angelica fit une révérence, une vraie révérence telle qu'on la faisait à la cour, pas une de ces choses simples qui aurait été à la portée d'une domestique. Même avec un geste comme celui-là, les nuances subtiles du statut comptaient. Les secondes passèrent pendant qu'Angelica attendait la permission de se redresser.

      “Venez me rejoindre, je vous prie, Angelica”, dit la Douairière. “C'est ce que vous préférez qu'on vous appelle, n'est-ce pas ?”

      “Oui, votre majesté.” Angelica soupçonnait qu'elle savait très bien comment on devait l'appeler. Elle remarqua aussi qu'il n'y avait aucune proposition de simplicité équivalente de la part de la mère de Sebastian.

      Cela dit, la Douairière fut assez sympathique. Elle offrit à Angelica une tisane de framboise d'un pot qui venait visiblement d'être tout juste préparé et elle servit à Angelica une tranche de gâteau aux fruits avec sa propre main délicatement gantée.

      “Comment va votre père, Angelica ?” demanda-t-elle. “Lord Robert a toujours été loyal envers mon mari de son vivant. A-t-il encore de la peine à respirer ?”

      “Il va mieux grâce à l'air de la campagne, votre majesté”, dit Angelica, pensant aux propriétés étendues où elle était vraiment heureuse de ne pas séjourner. “Cela dit, il ne part plus chasser aussi souvent qu'autrefois.”

      “Les jeunes hommes chevauchent à l'avant de la chasse”, dit la Douairière, “pendant que les personnes plus sensées attendent derrière et accueillent les choses à un rythme qui leur convient mieux. Quand j'ai participé à des chasses, cela a été avec un faucon, pas avec une meute de chiens. Les faucons sont moins impulsifs et ils voient plus de choses.”

      “Un très bon choix, votre majesté”, dit Angelica.

      “Et votre mère, est-ce qu'elle continue à cultiver ses fleurs ?” demanda la Douairière en sirotant sa tisane. “J'ai toujours été jalouse des tulipes d'exception qu'elle faisait pousser.”

      “Je crois qu'elle travaille sur une nouvelle variété, votre majesté.”

      “Elle effectue sûrement des mélanges”, dit la Douairière d'un air pensif en reposant sa tasse.

      Angelica se mit à se demander où la Douairière voulait en venir. Elle doutait fort que la souveraine du royaume l'ait convoquée ici juste pour parler de détails sans importance sur la vie de sa famille. Si Angelica avait été souveraine, elle ne se serait certainement pas intéressée à des sujets aussi triviaux. Quand des lettres arrivaient des propriétés de ses parents, Angelica leur prêtait très peu d'attention.

      “Est-ce que je vous ennuie, ma chère ?” demanda la Douairière.

      “Non, bien sûr que non, votre majesté”, s'empressa de dire Angelica. Grâce aux guerres civiles, les membres de la famille royale ne pouvaient certes plus faire emprisonner les nobles sans procès mais il était toujours aussi peu recommandable de prendre le risque de les insulter.

      “Vous voyez, j'avais l'impression que ma famille vous fascinait”, poursuivit la Douairière. “Surtout mon fils cadet.”

      Angelica se figea, ne sachant que répondre. Elle aurait dû deviner que la mère de Sebastian remarquerait qu'elle s'intéressait à son fils. Était-ce donc cela ? La douairière lui suggérait-elle poliment de le laisser tranquille ?

      “Je ne suis pas sûre de bien comprendre ce que vous entendez par là”, répondit Angelica, décidant que la meilleure chose à faire était de jouer le rôle de la jeune fille noble innocente. “Le Prince Sebastian est visiblement très beau mais —”

      “Mais votre tentative de l'endormir et de le prendre comme mari n'a pas réussi ?” demanda la Douairière. Maintenant, elle s'exprimait d'une voix dure comme l'acier. “Vous imaginiez-vous que je n'entendrais jamais parler de ce petit subterfuge ?”

      Alors, Angelica sentit la peur monter en elle. Même si la Douairière ne pouvait pas condamner directement quelqu'un à mort, une agression menée contre un membre de la famille royale risquait de mener à une telle condamnation, même dans le cadre d'un procès dirigé par les autres nobles. Peut-être surtout dans ce cadre-là, en fait, car il y en aurait forcément qui voudraient donner l'exemple ou se débarrasser d'elle ou se venger de sa famille.

      “Votre Majesté —”, commença Angelica, mais la Douairière l'interrompit en levant un seul doigt. Cela dit, au lieu de reprendre la parole, elle vida sa tasse en prenant son temps puis la jeta dans l'âtre, où la porcelaine se brisa en produisant un craquement qui fit penser Angelica à des os que l'on brise.

      “Attaquer mon fils est une trahison”, dit la Douairière. “Tenter de me manipuler et de me voler mon fils en l'épousant est une trahison. Selon la tradition, la punition pour ce genre de forfait est le Masque de Plomb.”

      Quand elle y pensa, Angelica sentit son estomac se serrer. C'était une punition horrible d'une autre époque qu'elle n'avait jamais vu personne appliquer. On disait que les gens se suicidaient rien qu'à cette idée.

      “Connaissez-vous cette punition ?” demanda la Douairière. “Le visage du traître est enfermé dans un masque en métal et on verse du plomb fondu à l'intérieur. C'est une mort terrifiante mais, parfois, la terreur a son utilité. Et, bien sûr, cela permet d'effectuer un moulage du visage du traître et de l'afficher ensuite pour que tout le monde le voie et se souvienne.”

      Elle prit quelque chose à côté de sa chaise. Cela ressemblait à l'un des nombreux masques que l'on voyait toujours à la cour dans le cadre de l'adoration de la Déesse Masquée. Cela dit, ce masque-là était peut-être le moulage d'un visage, d'un visage terrifié et à l'agonie.

      “Allan de Courcer a décidé de se dresser contre la couronne”, dit la Douairière. “Nous avons pendu proprement la plupart de sa hommes mais, avec lui, nous avons fait un exemple. Je me souviens encore de ses hurlements. C'est drôle comme on se souvient de ces choses-là.”

      Angelica tomba de sa chaise et se mit à genoux alors qu'elle n'avait presque plus de force. Elle leva les yeux vers l'autre femme.

      “Je vous en supplie, votre majesté”, implora-t-elle parce que, à ce moment-là, implorer la pitié de la Douairière lui semblait être la seule possibilité. “Je vous en supplie ! Je ferai tout ce que vous voudrez.”

      “Tout ?” dit la Douairière. “Tout est un grand mot. Et si je vous demandais de me rendre les terres de votre famille ou de servir comme espionne dans les cours de cette Nouvelle Armée qui a l'air d'émerger des guerres continentales ? Et si je décidais de vous envoyer en pénitence dans une des Colonies Lointaines ?”

      Angelica regarda l'expression terrifiée du masque mortuaire et comprit qu'elle ne pouvait répondre qu'une seule chose.

      “Tout, votre majesté, mais pas ça, je vous en supplie.”

      Elle détestait se retrouver dans ce style de situation. Elle était une des nobles les plus riches du pays mais, ici et maintenant, elle avait l'impression d'être aussi démunie que le plus pauvre des paysans.

      “Et si je vous demandais d'épouser mon