« Vraiment ? » dit Mackenzie, un peu surprise que cette information ne leur ait pas été transmise dans le dossier.
« Et oui. Je ne comprends même pas comment les journaux locaux ont pu obtenir cette information. La majorité du temps, ils ne sont même pas capables d’écrire sans faute, mais ça, ils ne l’ont pas raté. »
« J’ai vu des panneaux pour la résidence Wakeman pour aveugles alors que nous étions en route, » dit Mackenzie. « Ce n’est qu’à dix kilomètres d’ici, c’est bien ça ? »
« Exactement, » dit Clarke. « Je parlais à l’instant avec Randall Jones, le gérant de la résidence. C’était avec lui que j’étais au téléphone quand vous êtes arrivés. Il est là-bas pour l’instant et disposé à répondre à toutes vos questions. Et le plus tôt sera le mieux. Des journalistes et quelques personnalités importantes n’arrêtent pas de l’appeler et de l’interroger au sujet de l’affaire. »
« Allons-y, alors, » dit Mackenzie. « Vous nous accompagnez ? »
« Impossible, mon chou. Je suis complètement submergé ici. Mais n’hésitez pas à revenir me voir quand vous aurez terminé avec Randall. J’essaierai de vous aider autant que possible mais franchement… je préférerais que vous puissiez dépatouiller tout ça vous-mêmes. »
« OK, » dit Mackenzie. Elle n’était pas sûre de savoir comment prendre Clarke. Il était vraiment direct et franc, ce qui était plutôt positif. Il avait l’air aussi d’aimer utiliser des gros mots. Et elle ne le prenait pas mal quand il l’appelait mon chou. Ça faisait plutôt partie de ce charme typique du Sud.
Et puis aussi, il était vraiment soumis à une énorme pression.
« Nous reviendrons dès que nous en aurons terminé à la résidence, » dit Mackenzie. « Mais n’hésitez pas à nous appeler si vous avez du neuf entre temps. »
« Bien entendu, » dit Clarke.
Dans son coin, toujours occupé à envoyer des messages, l’officier Lambert grogna en signe d’assentiment.
Après moins de trois minutes dans le bureau du shérif Clarke, Mackenzie et Ellington retraversèrent le couloir qui donnait sur le vestibule. La femme âgée, sûrement la Frances que Clarke avait mentionnée, leur fit un petit geste rapide de la main quand ils sortirent.
« Et bien, c’était… intéressant, » dit Ellington.
« Le type est débordé, » dit-elle. « Il faut comprendre. »
« Tu l’aimes bien juste parce qu’il t’appelle mon chou, » dit Ellington.
« Et alors ? » dit-elle, en souriant.
« Et bien, si tu veux, je peux commencer à t’appeler mon chou. »
« Non, s’il te plaît, » dit-elle, en remontant en voiture.
Ellington roula durant un kilomètre sur la route 47, puis tourna à gauche sur une route secondaire. Ils virent tout de suite un panneau qui indiquait la résidence Wakeman. Alors qu’ils s’approchaient de la propriété, Mackenzie se demanda pourquoi un lieu aussi isolé avait été choisi pour une résidence pour aveugles. Il y avait sûrement une raison psychologique derrière tout ça. Peut-être que le fait d’être situés au milieu de nulle part aidait les pensionnaires à se détendre, loin des bruits constants de la ville.
Mais ce dont elle était certaine, c’était qu’elle se sentait de plus en plus coupée du reste du monde au fur et à mesure que la forêt s’épaississait autour d’eux. Et pour la première fois depuis très longtemps, elle en arriva presque à désirer revoir le paysage familier des champs de maïs de sa jeunesse.
CHAPITRE TROIS
La résidence Wakeman pour aveugles ne ressemblait pas du tout à ce que Mackenzie s’attendait. Comparé au bâtiment du commissariat et de la prison du comté de Staunton, la résidence Wakeman était une merveille de design et d’architecture moderne – comme Mackenzie put s’en rendre compte avant même d’entrer dans l’édifice.
La façade de l’édifice était faite de larges baies vitrées qui constituaient l’essentiel des murs. Alors qu’elle se trouvait encore dans l’allée qui menait vers l’entrée, Mackenzie pouvait déjà voir l’intérieur. Elle vit un grand vestibule qui ressemblait à celui qu’on trouve généralement à l’entrée des centres thermaux. L’aspect était agréable et accueillant.
Cette sensation ne fit que s’intensifier une fois qu’ils furent entrés dans le bâtiment. Tout avait l’air neuf et étincelant. Lors des recherches qu’elle avait faites durant le trajet pour Stateton, elle avait découvert que la résidence Wakeman pour aveugles avait été construite en 2007. Son installation avait été accueillie chaleureusement par la communauté du comté de Staunton car il avait permis de créer de nouveaux emplois. Mais aujourd’hui, bien qu’il soit toujours l’un des édifices les plus importants du comté, l’excitation du début avait décliné et la résidence semblait avoir été engloutie par le milieu rural qui l’environnait.
Une jeune femme était assise derrière un guichet arrondi le long du mur du fond. Elle leur sourit mais il était clair qu’elle avait un air inquiet. Mackenzie et Ellington s’approchèrent d’elle, se présentèrent et furent rapidement invités à s’asseoir dans la salle d’attente, le temps que Randall Jones vienne les chercher.
Il s’avéra très vite que Randall Jones était vraiment pressé de les rencontrer. Mackenzie était assise depuis seulement quelques secondes quand une double porte menant à l’arrière du bâtiment s’ouvrit de l’autre côté de la salle d’attente. Un homme de grande taille portant une chemise et un pantalon kaki en sortit. Il essaya de leur sourire au moment où il se présenta mais, tout comme la réceptionniste, il ne parvint pas à cacher le fait qu’il était très fatigué et inquiet.
« Je suis content que vous soyez venus aussi vite, » dit Jones. « Le plus tôt nous pourrons résoudre cette affaire sera le mieux. Les rumeurs vont bon train dans le coin avec cette histoire. »
« Nous aimerions également la résoudre aussi vite que possible, » dit Mackenzie. « Connaissez-vous l’endroit exact où le corps a été retrouvé ? »
« Oui. C’est une roseraie à environ cinq cents mètres d’ici. C’était normalement l’endroit où la résidence Wakeman aurait dû être construit mais d’obscures réglementations du comté sont venues mettre des bâtons dans les roues du projet. »
« Pouvez-vous nous y emmener ? » demanda Mackenzie.
« Bien sûr, tout ce dont vous avez besoin. Venez avec moi. »
Jones les guida à travers les doubles portes qu’il venait de traverser. De l’autre côté, il y avait une petite niche qui menait directement à l’intérieur de la résidence. Les premières portes à côté desquelles ils passèrent menaient à des bureaux et à des espaces de rangement, séparés des chambres des pensionnaires par un espace ouvert où un homme et une femme étaient assis derrière un guichet, un peu comme dans les hôpitaux.
Au moment où ils passèrent à côté des chambres, Mackenzie jeta un coup d’œil à l’intérieur de l’une d’entre elles dont la porte était ouverte. Les chambres étaient assez spacieuses et équipées de jolis meubles. Elle vit également des ordinateurs portables et des smartpads dans quelques-unes d’entre elles.
Bien que la résidence soit située au milieu de nulle part, on dirait que l’argent ne manque pas pour entretenir l’endroit, pensa-t-elle.
« Combien de pensionnaires vivent dans la résidence ? » demanda Mackenzie.
« Vingt-six, » dit-il. « Et ils viennent d’un peu partout. Nous avons un homme âgé qui est venu spécialement de Californie car nous offrons un service exceptionnel