Au portail royal de Chartres, le tympan de gauche représente l'Ascension; les apôtres sont assis sur le linteau inférieur, tous ayant la tête tournée vers Notre-Seigneur, enlevé sur des nuées; quatre anges descendent du ciel vers les apôtres et occupent le deuxième linteau. Dans toutes les sculptures ou peintures du XIe au XVIe siècle, les apôtres sont toujours nu-pieds, quelle que soit d'ailleurs la richesse de leurs costumes; ils ne sont représentés coiffés que vers la fin du XVe siècle. L'exemple que nous avons donné plus haut, tiré du portail méridional d'Amiens (XIIIe siècle), et dans lequel on remarque un de ces apôtres, saint Jacques, la tête couverte d'un chapeau, est peut-être unique. Quant au costume, il se compose invariablement de la robe longue ou tunique non fendue à manches, de la ceinture, et du manteau rond, avec ou sans agrafes. Ce n'est guère qu'à la fin du XVe siècle que la tradition du costume se perd, et que l'on voit des apôtres couverts parfois de vêtements dont les formes rappellent ceux des docteurs de cette époque.
APPAREIL, s. m. C'est le nom que l'on donne à l'assemblage des pierres de taille qui sont employées dans la construction d'un édifice. L'appareil varie suivant la nature des matériaux, suivant leur place; l'appareil a donc une grande importance dans la construction, c'est lui qui souvent commande la forme que l'on donne à telle ou telle partie de l'architecture, puisqu'il n'est que le judicieux emploi de la matière mise en oeuvre, en raison de sa nature physique, de sa résistance, de sa contexture, de ses dimensions et des ressources dont on dispose.
Cependant chaque mode d'architecture a adopté un appareil qui lui appartient, en se soumettant toutefois à des règles communes. Aussi l'examen de l'appareil conduit souvent à reconnaître l'âge d'une construction. Jusqu'au XIIe siècle l'appareil conserve les traditions transmises par les constructeurs du Bas-Empire. Seulement on ne disposait alors que de moyens de transport médiocres, les routes étaient à peine praticables, les engins pour monter les matériaux insuffisants, les constructions sont élevées en matériaux de petites dimensions, faciles à monter; les murs, les contre-forts ne présentent que leurs parements en pierre, les intérieurs sont remplis en blocages (1); les matériaux mis en oeuvre sont courts, sans queues, et d'une hauteur donnée par les lits de carrière; mais ces lits ne sont pas toujours observés à la pose; parfois les assises sont alternées hautes et basses, les hautes en délit et les basses sur leur lit. Ce mode d'appareil appartient plus particulièrement au midi de la France. Dans ce cas, les assises basses pénètrent plus profondément que les assises hautes dans le blocage, et relient ainsi les parements avec le noyau de la maçonnerie. Les arcs sont employés dans les petites portées, parce que les linteaux exigent des pierres d'une forte dimension, et lourdes par conséquent (2). Les tapisseries sont souvent faites en moellon piqué, tandis que les pieds-droits des fenêtres, les angles, les contre-forts sont en pierre appareillée. Ces constructions mixtes en moellon et pierre de taille se rencontrent fréquemment encore pendant le XIIe siècle dans les bâtisses élevées avec économie, dans les châteaux forts, les maisons particulières, les églises des petites localités. La nature des matériaux influe puissamment sur l'appareil adopté; ainsi dans les contrées où la pierre de taille est résistante, se débite en grands échantillons, comme en Bourgogne, dans le Lyonnais, l'appareil est grand; les assises sont hautes, tandis que dans les provinces où les matériaux sont tendres, où le débitage de la pierre est par conséquent facile, comme en Normandie, en Champagne, dans l'Ouest, l'appareil est petit, serré, les tailleurs de pierre, pour faciliter la pose, n'hésitent pas à multiplier les joints. Une des qualités essentielles de l'appareil adopté pendant les XIIe, XIIIe et XIVe siècles, c'est d'éviter les évidements, les déchets de pierre; ainsi, par exemple, les retours d'angles sont toujours appareillés en besace (3). Les piles cantonnées de colonnes sont élevées, pendant les XIe et XIIe siècles, par assises dont les joints se croisent, mais où les évidements sont soigneusement évités (4). Plus tard, dans la première moitié du XIIIe siècle, elles sont souvent formées d'un noyau élevé par assises, et les colonnes qui les cantonnent sont isolées et composées d'une ou plusieurs pierres posées en délit (5). Les lits des sommiers des arcs sont horizontaux jusqu'au point où, se dégageant de leur pénétration commune, ils se dirigent chacun de leur côté et forment alors une suite de claveaux extradossés (6). Chaque membre d'architecture est pris dans une hauteur d'assise, le lit placé toujours au point le plus favorable pour éviter des évidements et des pertes de pierre; ainsi l'astragale au lieu de tenir à la colonne, comme dans l'architecture romaine, fait partie du chapiteau (7). La base conserve tous ses membres pris dans la même pierre. Le larmier est séparé de la corniche (8). Les lits se trouvent placés au point de jonction des moulures de socles avec les parements droits (9). Dans les contrées où les matériaux de différentes natures offrent des échantillons variés comme couleur, en Auvergne, par exemple, on a employé le grès jaune ou le calcaire blanc, et la lave grise; de manière à former des mosaïques sur les parements des constructions; les églises de Notre-Dame-du-Port à Clermont (10), de Saint-Nectaire, du Puy en Vélay, d'Issoire, présentent des appareils où les pierres de différentes couleurs forment des dessins par la façon dont elles sont assemblées. Pendant les XIe et XIIe siècles on a beaucoup fait usage de ces appareils produits par des combinaisons géométriques; non-seulement ces appareils compliqués ont été employés pour décorer des parements unis, mais aussi dans la construction des arcs, ainsi qu'on peut le voir dans quelques édifices du Poitou, de la Mayenne et des bords de la Loire.
La porte occidentale de l'église Saint-Étienne de Nevers nous donne un bel exemple de ces arcs appareillés, avec un soin tout particulier (11).
Au XIIIe siècle ces recherches, qui sentent leur origine orientale, disparaissent pour faire place à un appareil purement rationnel, méthodique, résultat des besoins à satisfaire et de la nature des matériaux; le principe est toujours d'une grande simplicité, l'exécution pure, franche, apparente; les matériaux n'ont que les dimensions exigées pour la place qu'ils occupent.
Le corps de la construction est une bâtisse durable, les assises sont posées sur leurs lits, tandis que tout ce qui est remplissage, décoration, meneaux, roses, balustrades, galeries, est élevé en matériaux posés en délit, sorte d'échafaudage de pierre indépendant de l'ossature de l'édifice, qui peut être détruit ou remplacé sans nuire à sa solidité (voy. CONSTRUCTION).
Rien ne démontre mieux ce principe que l'étude de l'appareil d'une de ces grandes roses en pierre qui s'ouvrent sous les voûtes des nefs et des transepts. Ces roses, comme toutes les fenêtres à meneaux, ne sont que de véritables châssis de pierre que l'on peut enlever et remplacer comme on remplace une croisée de bois, sans toucher à la baie dans laquelle elle est enchâssée. Les divers morceaux qui composent ces roses ou ces meneaux ne se maintiennent entre eux que par les coupes des joints et par la feuillure dans laquelle ils viennent s'encastrer. L'appareil de ces châssis de pierre est disposé de telle façon que chaque fragment offre une grande solidité en évitant les trop grands déchets de pierre (12) (voy. MENEAUX, ROSES). Les joints tendent toujours aux centres des deux courbes intérieures sans tenir compte souvent