Voilà comment on employait les deniers des pauvres. Ce n’était pas une grosse somme, et l’on en retenait encore un cinquième pour l’entretien des proposants320. Mais tout au moins les aumônes étaient distribuées équitablement.
La part la plus importante des revenus du consistoire était comprise sous la dénomination: «deniers de l’église» ou encore «deniers du ministère», parce qu’elle était surtout destinée aux pasteurs.
Le «receveur des deniers de l’église» avait bien des dépenses à couvrir: d’abord, les frais qu’entraînaient les longues négociations auxquelles il fallait se livrer pour obtenir un pasteur «perpétuel», quand l’église s’en trouvait dépourvue; puis les gages des pasteurs en exercice; en leur absence l’entretien des ministres «prêtés», et après leur mort, la pension de leurs veuves321; enfin, il payait l’avertisseur, les employés du consistoire322 et les députations aux colloques et aux synodes.
Celles-ci devaient être, autant que possible, nombreuses, «afin de resserrer l’union des églises». Un synode national recommande aux localités qui ont plusieurs pasteurs d’en envoyer «alternativement… le plus grand nombre qu’elles pourront323». Mais de telles délégations coûtaient cher, et d’autant plus cher qu’elles étaient composées d’un plus grand nombre de personnes. Certaines églises n’étaient pas assez riches pour les supporter; aussi elles s’entendaient pour choisir le même représentant au synode national et s’unissaient pour payer son entretien324.
Lorsqu’il s’agissait seulement d’un synode provincial, les frais de voyage et de séjour des députés étaient moins élevés. C’est pourquoi Nîmes y envoyait assez souvent, outre ses représentants réguliers, des députations extraordinaires325.
La note présentée par Isaac Roux, ancien d’Aimargues, délégué par son église au synode de Saint-Germain de Calberte, peut nous donner une idée de ce que devaient dépenser les députés de Nîmes: «Pour la disnée à Calvisson», on lui doit 1 l. 6 sols; «pour avoir refferré la cavale à Canes», 2 sols; «pour la souppée et couchée à Enduse», 1 l. 6 sols; «pour avoir fait raccoutrer la celle de la cavale,» 5 sols; pour la ferrure «du petit bidet,» 1 sol 6 deniers; «pour une guide de Saint-Étienne jusques à Saint-Jan», 1 sol; «item 1 sol en pain [sic] pour la cavalle326», etc. On rembourse aux députés le prix de la location de leurs chevaux, et, pour aller au colloque de Montpellier, un cheval loué par le pasteur, avec sa selle et sa bride, se paye 30 sols327.
Généralement les délégations aux synodes coûtent plus cher que les délégations aux colloques, car le voyage qu’ont à faire les envoyés est plus long. Ainsi la députation de l’église de Nîmes au synode de Sauve (1597) lui revient à 39 l. 12 s. tournois328; au lieu que le consistoire ne débourse que 4 écus, soit 12 l., pour les frais du pasteur Chambrun et de l’ancien De Vieulx au colloque d’Aiguesmortes en novembre 1598329, et un seul écu pour les dépenses de Falguerolles à celui de Vauvert, au mois d’août de la même année330. – Jusqu’en 1599, la ville où se tenait le synode était très favorisée puisque ses députés n’avaient pas à se déplacer; mais à cette date on décida qu’elle aurait à «loger les pasteurs et anciens [des autres localités], avec les montures, en maison bourgeoise» et à ses dépens331. Malgré cette mesure, les frais de délégation paraissaient encore trop lourds aux petites églises réunies sous un seul pasteur: contrairement à la Discipline, elles n’envoyaient qu’un ancien avec leur ministre pour les représenter332 et payaient chacune leur part des frais333.
Outre les députations aux assemblées, on prenait encore sur les deniers du ministère l’achat des objets servant au culte, l’entretien du temple334 et de la bibliothèque.
L’église de Nîmes n’avait pas attendu les encouragements des synodes nationaux de Saumur (1596), ou de Jargeau (1601) pour «dresser» une bibliothèque propre à servir à ses ministres et à ses proposants335. En janvier 1596, elle ne s’occupait plus déjà que de la «parachever» et achetait pour 7 écus les livres qu’un libraire avait apportés à Nîmes336; peu après, le pasteur Falguerolles et l’avocat Chalas découvraient dans «la bibliothèque de feu M. de Saint-Cézary… deux volumes de Concilles et la Response et examen du concile de Trante, faictz par Rennitus», et les achetaient 3 écus pour le consistoire337. Les livres étaient alors chez Chalas338, et il y en avait un nombre suffisant pour que leur catalogue fût considéré comme un travail nécessaire et assez important339. D’ailleurs, on ne cessait d’en acheter de nouveaux. Ainsi, le 8 janvier 1597, on paye «3 l. 8 sols tournois pour huit livres de M. de Falguerolles340». Chalas partant en voyage, on le charge d’en rapporter quelques-uns341. On presse, en 1597, la rédaction de l’«inventaire et contrerollage» de la bibliothèque342, que le nouveau consistoire de 1599 fait vérifier en entrant en charge343. En octobre de cette même année, le synode ayant arrêté que «les ministres seroyent tenuz tenir en leurs cheres une bible de la nouvelle version», le consistoire se décide à vendre celle qui lui sert actuellement. «Et au mesme instant, au consistoire, a este enchérie, et, après plusieurs enchères, délivrée à M. Rostang du Vieux pour le prix de 3 escus sol344». Puis, on achète une superbe bible «de la nouvelle version… dorée, lavée, réglée», que l’on paye 4 écus et demi345. En 1601, la «Bibliotheca patrum par Marguarites de la Bigne, impression de Paris de l’an 1589, en 9 tomes» est acquise moyennant 18 écus, et sa reliure en «vert carton», plus le port, revient à 5 écus 30 sols346. Enfin, il faut ajouter