Dans Les Mémoires historiques: La biographie du général Li («Li Jiang Jun Lie Zhuan», Shi Ji), Sima Qian cite cette phrase de Confucius lorsqu’il livre un jugement sur Li Guang, qui avait gagné la réputation de «général volant» de la dynastie des Han de l’Ouest: «La biographie note que ‘Si le prince personnifie la droiture, tout se fait sans qu’il commande; si le prince ne l’incarne pas, il aura beau donner des ordres, rien ne s’ensuivra.’ C’est exactement ce qu’on pouvait dire du général Li…Un proverbe dit: ‘Pêcher et prunier ne disent mot, sous eux se forme naturellement un sentier’. La phrase est courte, mais d’une portée universelle.» Ce proverbe illustre parfaitement la citation de Confucius: «Si le prince personnifie la droiture, tout se fait sans qu’il commande».
Ne provoquer ni ne redouter aucun incident, voilà ce qu’il faut faire pour gouverner un pays.
--Cité dans Le discours prononcé lors du séminaire thématique rassemblant les principaux dirigeants au niveau provincial ou ministériel pour étudier et appliquer l’esprit de la 3e session plénière du 18e Comité central du PCC et pour approfondir tous les aspects de la réforme et autres.
Commentaire
«Ne pas provoquer d’incident» veut dire concrètement que «gouverner un grand pays demande la même attention que de faire cuire des petits poissons» et qu’il ne faut pas révoquer le soir un ordre donné le matin. De manière plus générale, la gouvernance d’un pays est comme un arbre dont «les racines doivent être solides et profondes pour que le feuillage soit luxuriant». Il faut maintenir la stabilité institutionnelle. «Ne pas redouter d’incident» veut dire qu’il ne faut pas, quant à la voie de développement que nous avons choisie, nous rétracter ou enfouir notre tête dans le sable face aux critiques ou aux interrogations soulevées par certaines personnes, voire même modifier notre vision suivant leurs idées. Xi Jinping a souligné à plusieurs reprises que le choix d’un système de gouvernance est déterminé par l’histoire, la culture, le niveau de développement social et économique d’un pays et qu’il est décidé par le peuple de ce pays. Sur ces questions fondamentales, nous devons avoir une position claire et montrer une grande fermeté. Une fois le cap fixé, il nous faut analyser la situation de notre point de vue et avec courage et clarté. Ensuite, nous tirerons nos conclusions et nous nous baserons sur notre jugement pour agir. Sur les questions fondamentales que sont le développement et le système politique, il nous faut ne faire aucune concession et rester fidèles à nos valeurs. Ce n’est qu’ainsi que nous ne nous éparpillerons pas au premier coup de vent.
Source
Ne provoquer ni ne redouter aucun incident, voilà ce qu’il faut faire pour gouverner un pays. Car redouter les incidents est tout aussi pernicieux que de les provoquer. Un homme qui prend des médicaments sans être malade ou un autre qui refuse d’en prendre malgré sa maladie risquent tous les deux de perdre la vie. Dans le premier cas, il provoque l’incident tandis que dans le second, il craint que l’incident ne survienne. C’est aussi le cas d’Aligu, troisième Tsenpo du Royaume de Tsong Kha, qui demandait à occuper une charge importante à la cour des Tang. Tout le monde savait pertinemment qu’il ne fallait pas lui accorder cette dignité, mais la cour impériale lui a donné satisfaction afin d’éviter des problèmes, et c’est justement ainsi que les problèmes sont survenus. Cette conduite n’est-elle pas comparable à celle d’un malade qui refuse son traitement? Aujourd’hui, si l’on voulait arrêter le messager de l’Empire des Xia de l’Ouest, cela reviendrait peu ou prou à interrompre la prise de médicaments avant la guérison complète de la maladie.
–-Su Shi (dynastie des Song du Nord), Yin Qin Gui Zhang Lun Xi Qiang Xia Ren Shi Yi Zha Zi (Lettre sur les affaires concernant les Qiang et les Xia de l’Ouest après la capture du «Diable Zhang»)
Interprétation
Il s’agit d’une dissertation sur les affaires concernant les Qiang et les Xia de l’Ouest adressée le 8 septembre 1087 (la 2e année de l’ère Yuanyou de la dynastie des Song) à l’empereur par Su Shi, membre de l’Académie Hanlin, lettré au service de la cour, recteur des édits impérieux et érudit chargé d’expliquer les classiques aux princes.
Au mois d’août 1087, le «Diable Zhang», chef d’un royaume vassal des Xia de l’Ouest, est capturé et transféré à Bianjing, capitale de l’Empire des Song. Comme c’est la première fois depuis la fondation de la dynastie des Song qu’on réussit à capturer un criminel ayant prêté allégeance à un royaume ennemi, toute la cour jubile. Su Shi estime cette réaction très dangereuse et dit: «Nous sommes aujourd’hui à un moment critique pour notre sécurité. Si l’on apporte une réponse adéquate et gère le problème avec compétence, nous pourrons sans aucun doute sécuriser les frontières et garantir la tranquillité de la population. Dans le cas contraire, les généraux pourraient devenir fiers et les soldats laisser libre cours à leurs désirs, et la victoire se transformerait en désastre.» Evoquant la stratégie de défense des Song du Nord, il indique qu’il ne faut provoquer ni redouter les incidents pour gouverner un pays. C’est-à-dire que pour bien gérer un pays, on doit se garder de créer des incidents à la légère mais il ne faut pas non plus manquer de courage face aux défis. «Provoquer des incidents» revient à prendre des médicaments pour une personne bien portante, alors que «redouter les incidents» est comparable à la situation d’un malade qui refuserait de se soigner. Les deux postures se rejoignent sur un point: selon Su Shi, elles mettent à chaque fois en péril la vie d’un homme. Le célèbre poète critique ainsi les erreurs commises par les autorités des Song en matière de relations extérieures. Le propos de Su Shi est d’exhorter la cour à rester prudente et à éviter de monter en épingle des affaires insignifiantes, mais aussi à savoir prendre l’initiative d’agir sans reculer quand cela s’avère nécessaire.
L’homme de bien n’oublie pas le danger en temps de paix, garde la mort à l’esprit alors qu’il est en vie, et n’oublie pas que le trouble peut survenir même lorsque l’ordre règne.
–-Cité dans Le discours prononcé à la Conférence du Comité central du PCC sur le travail dans la province du Xinjiang et autres.
Commentaire
«En toute chose, il faut se préparer au pire mais œuvrer pour le meilleur»: il s’agit d’une stratégie importante suggérée par Xi Jinping en matière de gouvernance du pays. Il a cité plusieurs fois cet adage célèbre du Classique des mutations en parlant du travail économique et de la province du Xinjiang. Ce faisant, il vise à nous avertir de la nécessité de rester vigilant de peur qu’une défaillance ne survienne, d’anticiper l’apparition de difficultés, et d’adopter des mesures préventives afin de les affronter avec sang-froid. L’idée selon laquelle il faut agir en se préparant au pire avec lucidité est souvent reflétée dans la sagesse des décisions prises et des méthodes de gouvernance. La Chine est devenue aujourd’hui une «société à risque», caractérisée par une accentuation progressive des conflits de fond et l’apparition d’un nombre croissant de facteurs d’instabilité et d’incertitude. Les problèmes de grande échelle tels que l’endettement des collectivités locales, la gestion des réseaux Internet, ou encore la question des valeurs pourront devenir des facteurs de risque social. Il en va de même pour les politiques menées à une échelle plus réduite et concernant par exemple le réajustement de la politique de contrôle des naissances, la gestion de la sécurité alimentaire, l’accueil du public et l’enregistrement de ses plaintes. La moindre erreur d’inattention pourrait avoir un impact social considérable et entraîner des risques systémiques imprévisibles. Renforcer la prévisibilité en matière de gestion sociale et garder à l’esprit la nécessité «de réfléchir à toutes les éventualités et d’envisager le pire» nous permettra d’anticiper les défis avec lucidité et de rester sereins et