Le Coeur Brisé D'Arelium. Alex Robins. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Alex Robins
Издательство: Tektime S.r.l.s.
Серия:
Жанр произведения: Героическая фантастика
Год издания: 0
isbn: 9788835427940
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gratta sa barbe et baissa les yeux sur le ragoût. Ce qu'il avait pris pour une carotte s’avéra être une petite queue de rat effilée, qui flottait joyeusement parmi les os et les cartilages.

      Il ouvrit la bouche pour répondre mais, avant qu'il ne puisse sortir un mot, quelque chose tomba du ciel et s’écrasa sur le rempart de pierre avec un bruit mat. C'était le vautour, son corps sans tête déchiré par deux larges entailles suintantes de sang, ses ailes un enchevêtrement de plumes et d'os.

      Un cri étranglé résonna plus loin sur le mur et, pour la première et dernière fois de sa vie, Reed vit le brasier au sommet d'une tour éloignée s'animer dans une explosion de fumée et de flammes.

      *

      Le brasier brillait dans le ciel nocturne et fut bientôt rejoint par un autre, puis un autre, jusqu'à ce qu'une demi-douzaine de feux éclairât l'horizon à l'est comme une colonie de lucioles lointaines.

      Reed se tourna vers Hode qui avait laissé tomber sa tasse et dégainé sa lance de derrière son dos. Il s’était dressé, frissonnant, respirant rapidement, les yeux scrutant de gauche à droite le long des remparts, s'arrêtant brièvement pour s'attarder sur le corps brisé de l’oiseau.

      — Qu’est-ce qui se passe ? dit le gardien trapu aux cheveux blonds, en désignant les points lumineux au loin. À quelle distance penses-tu qu'ils soient ? On devrait faire quelque chose ?

      Les deux hommes savaient ce que les feux signifiaient : cette section du mur était en danger et avait besoin d'aide. La Vieille Garde n'était peut-être plus que l'ombre de ce qu'elle fut autrefois, mais une chose ne changera jamais : les liens tacites entre les gardes, des liens qui unissaient ces hommes aussi solidement que n'importe quel lien de sang. Une famille qui pouvait compter les uns sur les autres et qui protégeait les siens.

      — Nous ne pouvons pas être à plus d'une demi-heure, au plus, répondit Reed, en remontant son masque de cuir et en saisissant sa lance. Nous devons y aller.

      Un autre cri lointain résonna dans la nuit, un cri de douleur et de colère qui laissait peu de place à l'imagination.

      Sa décision prise, Reed commença à avancer vers l’origine du son, sans attendre de voir si Hode le suivait. Il pouvait sentir son cœur battre la chamade dans sa poitrine, un bruit sourd montant vers sa gorge, menaçant de l'étouffer. Il se força à expirer lentement et s'agrippa au manche de sa lance, son poids lui apportant un peu de réconfort. Hode était arrivé sur sa gauche, protégeant le côté vulnérable de Reed avec sa propre arme.

      Pendant plusieurs minutes, ils avancèrent lentement, lances dressées, capes flottant au vent. Le mur était silencieux, plus aucun cri ne résonnait à travers la Fosse, les brasiers brûlaient toujours au loin comme des étoiles. Ils atteignirent la tour la plus proche et trouvèrent trois autres gardes s'affairant autour de sa base, de jeunes recrues efflanquées nouvellement arrivées sur le mur. L'un d'entre eux portait un surcot trop grand de plusieurs tailles qui lui tombait presque sur les chevilles, un autre avait perdu sa lance et n'avait rien d’autre qu'une dague, qu'il brandissait d'une main tremblante vers Reed et Hode.

      — Qui va là ? balbutia le jeune homme, à peine sorti de la puberté, sa voix tremblotant comme une harpe mal accordée.

      Reed frappa la dague avec assez de force pour la faire tomber. L'homme se précipita pour la ramasser, en jurant abondamment.

      — Reed ? questionna le jeune au surcot trop grand. Reed se rappela vaguement que son nom était Kellen. La recrue avait retiré son masque, révélant quelques rares touffes de poils agglutinés autour d'un menton boutonneux.

      Reed soupira. Tout cela était une espèce de blague karmique. Après des années à se plaindre, il avait finalement obtenu ce qu'il voulait : du danger sur le mur et une chance de mener des hommes au combat en tant que fier membre de la Vieille Garde. Il réalisait maintenant qu'il n'avait jamais eu autant tort de toute sa vie. La répétition et l'ennui étaient certes peu glorieux, mais sûrs et réconfortants. Et en un instant, ils lui avaient été enlevés.

      Que faire maintenant ? Combattre ou fuir ? Hode ne serait pas d'une grande aide, l'homme était doué pour réapprovisionner le bois et assommer les rats, mais utiliser sa lance contre quelque chose de plus dangereux ne se terminerait probablement pas bien pour lui. Reed jeta un coup d'œil à son ami. Celui-ci était appuyé contre le mur intérieur de la tour, tripotant les sangles de son masque pour essayer de le maintenir en place sur son nez et sa bouche. Hode sentit le regard de Reed sur lui et releva la tête avec un petit sourire et un haussement d'épaules avant de retourner à sa tâche.

      — Reed ? Que doit-on faire ? répéta Kellen.

      — Donne-moi une minute ! Reed observait l’endroit des remparts où les feux brûlaient encore. Le silence était revenu sur le mur, un calme et une tranquillité si absolus que Reed se demanda si ces deux cris douloureux n'avaient été qu'une facétie du vent. Mais alors, qui avait allumé les brasiers, et pourquoi ? Il passa une main dans ses cheveux grisonnants et prit une décision.

      — On dirait que les feux sont principalement au niveau des tours de l'est, dit-il. La caserne de l'est est à proximité, avec le capitaine Yusifel et la garde de réserve. Nous allons longer ce tronçon de mur jusqu'à la caserne et informer Yusifel de la situation. Soit un idiot a joué avec son briquet, soit il y a quelque chose de bien plus grave. Dans tous les cas, Yusifel voudra le savoir. Hode et moi allons marcher à l’avant, Kellen tu restes derrière moi avec ton ami, celui qui ne sait pas comment tenir une lame sans la faire tomber.

      — Iden, Monsieur, coupa le jeune garde à la dague.

      — C’est ça, Iden, dit Reed. Tu restes près de Kellen et Taches de rousseur.

      Il fit un geste vers le troisième homme, aussi grand et mince que ses amis, arborant une chevelure rousse et quelques taches de rousseur sur son large nez.

      Taches de rousseur lui jeta un regard aigre mais resta muet et prit position derrière les autres. Reed mit la petite troupe en mouvement d'un signe de tête et ils avancèrent rapidement le long des remparts, scrutant le chemin d'un œil méfiant. Les tours se rapprochaient de plus en plus, les brasiers n'étaient plus des points lumineux, mais de grands cônes de feu scintillants, leur fumée s'échappant du sommet pour se mêler aux nuages gris et sombres qui flottaient dans le ciel nocturne.

      Reed estimait qu'ils ne devaient pas être à plus de quatre ou cinq cents mètres de l’escalier en pierre qui les mèneraient du mur vers la caserne, le capitaine Yusifel, et la garde de réserve. Sa confiance grandissait et il accéléra le rythme, ses pieds bottés martelant lourdement les pavés, accompagnés par le tapotement rythmique de la crosse en bois de sa lance.

      Quelques minutes de plus et quelque chose apparut dans la nuit, une forme sombre couchée immobile en travers du mur. Une rafale de vent se déchaîna et Reed aperçut une brève lueur vermillon. Une cape de la Vieille Garde, toujours attachée à son propriétaire. Reed entendit un halètement derrière lui ; l’une des jeunes recrues réalisant ce qu'ils avaient découvert.

      — Hode, avec moi, masque accroché et serré. Les autres, restez ici, dit-il en resserrant son masque autour de son visage et en se rapprochant pour examiner le corps.

      Le garde était mort face contre terre, un bras replié sous lui, l'autre tendu vers sa lance qui se trouvait juste hors de portée. L'arrière de sa tête était couvert de sang et des filets gluants s'étaient infiltrés dans sa cape, la rendant d'un rouge encore plus sombre. Reed utilisa sa lance pour retourner le corps sur le dos et ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'il vit les dommages causés au visage de l'homme. Deux entailles larges et profondes avaient ouvert la peau en diagonale, du sourcil à la lèvre inférieure, pulvérisant l'œil gauche et mutilant le nez. Les restes de la lèvre inférieure étaient suspendus par un fil de chair, exposant la mâchoire et les dents. Aucun animal sauvage n'aurait pu faire ça ; c'était l’œuvre de quelque chose de beaucoup, beaucoup plus dangereux.

      Reed se tourna vers Hode pour s'entretenir avec lui et quelque chose passa dans son champ de vision,