Je ferai donner ici à votre escadre des vivres, des objets de rechange et de l'argent pour autant de mois que vous voudrez.
Je le répète, je vous recommande surtout de m'envoyer en poste (je ferai payer ici les frais) la centaine d'hommes que je vous ai demandée, et qui, s'ils n'arrivent dans huit ou dix jours, me feront tout perdre. Envoyez aussi le chef des constructeurs de Toulon, et des constructeurs entendus, afin qu'ils voient ce qu'ils veulent faire des vaisseaux qui sont sur les chantiers.
Je n'ai pas avec moi un seul officier de marine qui soit entendu; tous les hommes qui sont sur les frégates ou sur les chaloupes canonnières sont incapables de faire un rapport.
J'ai nommé à la place d'ordonnateur de la marine de Venise le citoyen Ricard, ancien ordonnateur de Toulon, et je lui ai ordonné de correspondre avec vous.
L'ordonnateur de la marine à Toulon doit, à l'heure qu'il est, avoir touché le million que je vous ai annoncé: je vous en ai envoyé un autre à Paris en or et en argent, qui doit être arrivé. Envoyez-nous promptement des hommes.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Montebello, le 15 prairial an 5 (3 juin 1797).
Au directoire exécutif.
Citoyens directeurs,
Je vous envoie, par le général de division Serrurier, vingt-deux drapeaux pris dans les dernières affaires qui ont eu lieu en Allemagne, ou sur les Vénitiens.
Le général Serrurier a, dans les deux dernières campagnes, déployé autant de talens que de bravoure et de civisme. C'est sa division qui a remporté la bataille de Mondovi; qui a si puissamment contribué à celle de Castiglione, a pris Mantoue, et s'est distinguée au passage du Tagliamento, de l'Isonzo, et spécialement à la prise de Gradisca.
Le général Serrurier est extrêmement sévère pour lui-même, il l'est quelquefois pour les autres. Ami rigide de la discipline, de l'ordre et des vertus les plus nécessaires au maintien de la société, il dédaigne l'intrigue et les intrigans; ce qui lui a quelquefois fait des ennemis parmi ces hommes qui sont toujours prêts à accuser d'incivisme ceux qui veulent que l'on soit soumis aux lois et aux ordres de ses supérieurs.
Je crois qu'il serait très-propre à commander les troupes de la république cisalpine; je vous prie donc de le renvoyer le plus tôt possible à son poste.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Montebello, le 16 prairial an 5 (4 juin 1797).
Au chef de l'état-major.
Vous ordonnerez, citoyen général, que M. d'Entraigues soit logé dans le château d'une manière à ce qu'il puisse avoir avec lui sa femme et qu'il ait les commodités que paraît nécessiter sa santé. Si le château n'offre point ces commodités, il pourra choisir un logement en ville, où il sera mis sous bonne garde.
Vous lui enverrez tous ses papiers, hormis les trois ou quatre pièces qui seront relatives aux objets politiques.
Vous ordonnerez au médecin Moucati de lui donner ses soins.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Montebello, le 17 prairial an 5 (5 juin 1797).
Au général Baraguay d'Hilliers.
D'après les explications que vous m'avez données, citoyen général, j'approuve le départ de deux vaisseaux de 64 pour l'expédition de Corfou; mais j'exige absolument à bord de l'un, pour commander, le citoyen Lallemant, et à bord de l'autre le citoyen Bourdet, qui fera les fonctions de contre-amiral.
Faites que sur ces deux vaisseaux la moitié des matelots soient français, et que la garnison soit française. Je ne vois aucune espèce de nécessité à faire marcher avec ces deux vaisseaux, comme vous vous le proposez, quatre ou cinq bâtimens armés par des Français; je préférerais de bien s'assurer des deux vaisseaux de guerre, et de laisser monter les autres par des Vénitiens, en leur laissant arborer dessus leur pavillon.
Il doit y avoir un troisième bâtiment dans le port de Venise prêt à partir. Si vous pouviez y mettre la moitié de l'équipage, en Français, un bon commandant, et garnison française, il n'y aurait point d'inconvénient que ce bâtiment partît.
Ces deux, ou même trois bâtimens, si cela est possible, avec deux frégates, un des deux bricks que commande Bourdet, et plusieurs bricks vénitiens montés par des Vénitiens, seraient suffisans; de sorte qu'il resterait à Venise la corvette la Brune et un des deux bricks. Ces trois vaisseaux de guerre s'appelleront, le premier le Laharpe, le deuxième, le Stengel, le troisième, le Beraud.
Ils pourront dès aujourd'hui être considérés comme faisant partie de la marine française. Faites-moi connaître dans quelle année les vaisseaux ont été construits, s'ils sont bons.
Comme je ne veux mettre aucun retard dans le départ du courrier, vous communiquerez cette lettre au citoyen Bourdet et au général Gentili.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Montebello, le 17 prairial an 5 (3 juin 1797).
Au chef de l'état-major.
Vous voudrez bien, citoyen général, donner les ordres au général Brune, qui commande le Padouan, de faire arrêter et traduire devant un conseil militaire, le citoyen Arnoult, commandant de la place de Padoue, comme accusé:
1°. De s'être emparé des sels de la Chiuza, et d'en avoir vendu à différens particuliers.
2°. D'avoir refusé de les remettre à la disposition des autorités du pays, conformément à mon ordre et à la réquisition qui lui en a été faite par des agens administratifs de l'armée.
3°. D'avoir manqué à l'ordonnateur en chef.
4°. D'avoir, sans ordre supérieur, ordonné la vente desdits sels, et par là déconcerté l'administration du pays, et fait le plus grand tort à la république.
Je vous envoie les pièces relatives à ces faits.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Montebello, le 19 prairial an 5 (5 juin 1797).
Au sérénissime Doge de la république de Gênes.
Les députés que le petit conseil de la république de Gênes a bien voulu envoyer près de moi, ont été satisfaits des sentimens de bienveillance que la république française conserve pour la république de Gênes.
Bien loin de vouloir démembrer votre territoire, la république française aidera de toute son influence à l'accroissement et à la prospérité de la république de Gênes, désormais libre et gouvernée par ces principes sacrés, fondemens de la grandeur et du bonheur des peuples.
Votre sérénité trouvera ci-dessous la note des personnes que, conformément à la convention que nous avons faite, j'ai cru convenable de choisir comme les plus propres à former le gouvernement provisoire.
Je me servirai de tous les moyens et de toute la force que la république française a mis dans mes mains pour le faire respecter, et protéger la sûreté des personnes et des propriétés des différens citoyens de la république de Gênes.
J'ai pensé qu'il était utile de choisir des personnes de différens rangs, des citoyens connus des différentes villes des états de la république, qui, désormais, ne formera qu'une même famille, afin d'étouffer les haines et de réunir tous les citoyens.
Le vif intérêt que la république française prend au peuple de Gênes, est encore augmenté par la nécessité où je me trouve d'exiger que les derrières de l'armée et les principaux dépôts soient tranquilles et exempts de troubles.
(Ici