“ Non, tourne un peu ton visage vers la droite et tiens ton bras légèrement plié avec les mains derrière le dos. ”
Une fois enlevée la paire de jeans déchirés, le tee shirt vintage choisi ensemble au petit marché du vendredi et le Superga en coton d’un rose choquant, nous mîmes un horrible tailleur bleu, porté à l’occasion du mariage d’Agata, un parent lointain, et désormais oublié depuis des années dans la garde-robe ; un beau chemisier blanc, des bas voilés d’une tonalité naturelle et des escarpins de la même couleur que le tailleur pour complèter l’oeuvre.
Nous relevâmes nos cheveux et les fixâmes avec de la lacque et des élastiques noirs, un léger maquillage, un éclatant faux sourire et c’est parti:
“ Vas-y, prends la photo .”
“ Parfait ! ”
Après environ un mois nous recevâmes les lettres avec les invitations pour participer aux premières sélections.
Mes jambes tremblaient en ouvrant cette enveloppe : Stefania s’évanouissait presque.
Nous profitâmes de quelques jours pour participer à un cours accéléré et rafraîchir notre anglais plutôt poussiéreux.
J’arrivai à convaincre mes parents d’au moins pouvoir participer aux sélections, mon obstination obtint gain de cause; ils n’arrivèrent pas à m’en empêcher et espèrèrent, tout comme le fiancé de Stefania, que je ne réussisse pas les épreuves.
Nous prîmes un avion pour pouvoir rejoindre Rome, la ville désignée pour cette importante rencontre.
Stefania dû acheter un vêtement adéguat pour l’occasion. Elle choisi un tailleur noir, bien cintré mais un peu rigide, qu’elle ne portait pas de manière très naturelle et qui ne lui donnait pas un grand confort dans les mouvements, moi je remis le mien en état.
Dans l’avion, ça n’était pas la première fois que nous regardions avec admiration ces femmes en uniforme qui se promenaient en cabine avec une grande désinvolture et professionalité mais cette fois j’éprouvais une bienveillante envie.
Juste après le décollage, je regardai par le hublot de l’avion.
Je vis s’affaiblir la vue de ces mêmes voitures toujours en rang que je voyais chaque matin en allant au travail et je serrai fort la main de Stefania.
Nous passâmes sans trop d’efforts presque toutes les sélections qui se déroulèrent sur plusieurs journées, poussées par notre énergie, avec décision et un enthousiasme inimaginable, en éliminant notre timidité et en démontrant, à nous même également, un insolite penchant vers le leadership.
L’entretien avec le psychologue fut le plus dur pour Stefy,
Je fus la première à entrer dans la pièce lumineuse où se trouvait un homme qui avait la tâche d’être le dernier examinateur avant la scrupuleuse visite médicale finale.
Ce fut pour moi, une agréable et relaxante conversation, mais je constatai que cet homme essayait de me mettre dans l’embarras tandis que j’essayais de ne pas céder à ses intentions.
J’étais heureuse.
De manière inattendue et après un bref entretien initial de présentation, il soutint qu’il ne croyait pas que j’étais cette personne positive, correcte et sociable que j’avais décrite ; je lui répondis que j’en étais désolée, mais que celà ne me préoccupais pas et que son jugement était certainement provoqué par notre connaissance trop rapide
Je fus invitée à participer à l’épreuve successive.
En sortant je fis un clin d’oeil à Stefy.
“ Rien de quoi se préoccuper, sois tranquille ” lui dis-je.
Stefania entra immédiatement
Quelques minutes passèrent et je la vis sortir, le visage obscuré.
“ Au diable, mais pour qui se prend-t-il ce mal élevé? ”
“ Stefania, raconte- moi, que s’est-il passé ? ”
“ Je ne sais pas qui il est, mais ce qui est certain c’est que je ne voudrais jamais plus avoir à faire à un type comme ça ! ”
“ Il a affirmé que mes cheveux sont désordonnés et mes vêtements inadéguats ! ”
“ Cheveux désordonnés ? Vêtements inadéguats ? ”
“ Quel mal élevé ! ”
“ Comment se permet-il ? ”
“ Il m’a posé des questions déplacées, très privées, et je lui ai répondu que celà ne lui regardait pas ! Ensuite il m’a dit : “ Mais pour qui te prends-tu ? ” Et moi, à ce point là, irritée et furieuse, je lui ai répondu de peser ses paroles ; et puis j’ai claqué la porte ! ”
C’était la preuve qu’il était en train d’évaluer notre degré de supportation par rapport au stress, avec un travail en contact continu avec le public c’est une qualité indispensable.
Inutile de dire que Stefania ne fut pas invitée à l’épreuve successive.
Elle rentra chez elle stupéfaite, en se demandant en quoi elle s’était trompée. Son fiancé fut la seule personne heureuse de cette épreuve négative, et ses interrogations restèrent sans réponse pour toujours.
Pour moi, au contraire, commença un cours de trois mois où je fus instruite à éteindre des incendies et à comment me comporter en cas d’urgence.
J’étudiais, en outre, les aspects techniques des différents types d’avion et la composition des équipages, quelques aspects médicaux pour l’habilitation aux tâches des soins d’urgence et après avoir réussi les examens de technique, médecine et anglais auprès de Civilavia ( organisme abilité pour la remise des brevets ), j’étais prête pour monter dans un avion dans la peau que j’avais tant espèré revêtir : celle d’une hôtesse de l’air.
Durant le cours je rencontrai trois filles qui devinrent mes amies : Eva, Valentina et Ludovica.
Nous partageâmes durant cette période la même chambre d’hôtel et, après notre engagement, nous décidâmes de louer une maison à Fregene, une localité maritime située près de l’aéroport de Roma Fiumicino, notre base de départ.
C’est ainsi que notre aventure commença.
Moi, Eva, Valentina, Ludovica.
La maison avait deux chambres, chacune avec un grand lit et l’unique salle de bain était très fréquentée : difficile de parvenir à la trouver libre, tout comme le téléphone de la maison.
Nous avons essayé de nous adapter à cette situation et sommes parvenues à vivre ensemble, non sans de petites mésententes et en essayant de faire quelques compromis ( le plus difficile était celui de décider quand et qui devait laver la vaisselle ).
Eva avait de très beaux cheveux roux, ondulés et souples qui tombaient sur ses épaules, ses yeux de couleur marron clair apparaissaient verts dans les journées plus ensoleillées, sa corpulence était frêle et mince ; elle provenait de “ Bergamo alta ”, comme elle aimait dire, mais avait une âme de “ vraie napolitaine ”, expansive et chaleureuse ; elle aimait le désordre, avait toujours sur le visage un masque de beauté à essayer, souvent, elle se promenait dans la maison avec celui qu’elle préfèrait, le masque à l’argile ventilée de couleur verte et elle mettait de l’huile d’amande douce pour adoucir ses cheveux.
Ludovica n’arrêtait pas de parler et ne parvenait jamais à stoper ce fleuve en pleine de paroles qui vous investissaient à peine la bouche ouverte.
Elle était blonde avec de très belles boucles, des yeux d’un bleu intense et une peau lisse et claire, ses formes étaient moelleuses