Syn s'assit sur un bord du lit et ramassa le carnet de croquis pour voir ce sur quoi elle travaillait. Un calme intense souffla sur lui quand il vit son portrait détaillé sur le papier⦠elle le cherchait déjà et n'en avait même pas conscience.
Angelica sentit un mouvement à côté d'elle et ouvrit les yeux en pensant voir Zachary. Il était le seul à avoir le cran de pénétrer dans sa chambre pendant qu'elle dormait.
Elle cligna des yeux stupéfaits en découvrant l'homme aux cheveux sombres qu'elle venait de dessiner assis sur le bord du lit avec en main le dessin qu'elle analysait. Angelica agit instinctivement, fondant sur lui la paume tendue dans sa direction pour l'exorciser, comme elle le ferait avec n'importe quel démon.
« Bonjour femme, lança Syn, qui la saisit par le poignet sans lever les yeux du dessin. Son examen achevé, il plongea finalement ses yeux d'un sombre améthyste dans ceux de la jeune femme.
Angelica maintint son coude immobile, en tendant les muscles de son bras. Elle haussa un élégant sourcil, décidant d'ignorer la remarque incongrue sur son prétendu statut d'épouse⦠les démons étaient des êtres déments.
Syn l'attira brusquement vers lui jusqu'à ce qu'ils ne soient plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre, si proches, mais sans pour autant se toucher. Sans baisser une seule fois les yeux, il leva la paume d'Angelica jusqu'à ses lèvres et embrassa le symbole, qui se mit soudain à briller.
Angelica retint son souffle quelques secondes⦠elle eut l'impression qu'il la plongeait au cÅur d'un brasier avec ses mouvements simples et sensuels.
â Tu es un démon très stupide, dit-elle en essayant de repousser la sensation de ses lèvres se pressant sur la paume de sa main.
â Je ne suis pas un démon, la contredit Syn. Et ta magie ne fonctionnera jamais sur moi.
Il lâcha son poignet quand elle détendit les muscles de son bras entre ses doigts.
Angelica retira lentement sa main.
â Ce n'est pas parce que tu le dis que ce n'est pas vrai. Elle passa les doigts de son autre main autour de son poignet pour tenter d'effacer la sensation persistante de sa peau chaude sur la sienne. Qui es-tu ?
â Tu peux m'appeler Syn.
Angelica sentit des frissons remonter le long de son dos en réalisant ce qu'impliquait ce nom. Elle réfléchissait déjà sans peine à toutes les raisons pour lesquelles ce nom lui seyait.
â D'accord, Syn, pourquoi es-tu là ?
â Dans ton rêve... ou dans ton lit ? demanda Syn, un pâle sourire planant sur ses lèvres parfaites.
Ouais, elle avait raison. Il était le péché incarné. Se souvenant que ses autres rêves avaient été des cauchemars, Angelica parcourut lentement la pièce du regard avant de le reposer sur lui.
â Je ne suis pas en train de rêver⦠Je t'ai senti me toucher⦠Je⦠J'ai senti tes lèvres sur ma main.
â Ce n'est pas parce que tu es en train de rêver que ce n'est pas réel, répondit Syn en se moquant de façon charmante des propos qu'elle avait tenus un peu plus tôt.
Angelica plissa les yeux méfiants quand il déchira le dessin qu'elle venait de sortir de son carnet de croquis. Il le roula avec précaution au lieu de le plier, puis le rangea dans une grande poche de la doublure interne de son manteau. Elle ne put s'empêcher de regarder ses mains qui s'activaient. Elles semblaient si douces et intactes⦠semblables aux mains des nobles décrites par les livres d'Histoire. Finalement, elle examina de nouveau son visage puis fronça les sourcils quand elle y surprit un léger sourire.
â Pourquoi es-tu là , en réalité ? interrogea-t-elle.
â Pour tenir à distance les cauchemars pendant ton sommeil, répondit Syn en s'appuyant contre la colonne du lit derrière lui. Repose-toi cette nuit, Angelica, aucun cauchemar ou démon ne hantera ton sommeil. »
Angelica se redressa brusquement dans son lit, le soleil inondant la chambre à travers la fenêtre du balcon⦠c'était le matin. En baissant les yeux au pied du lit, elle se pencha en avant et sentit l'endroit où Syn s'était assis. Il n'y avait aucune trace de sa présence ici, alors Angelica respira un bon coup. Ce n'était qu'un rêve après tout.
S'asseyant sur le côté du lit, elle se leva et entendit un objet tomber au sol. Elle ramassa son carnet de croquis pour le refermer, mais se figea soudain en se rappelant du rêve.
Ouvrant de nouveau le livre, elle feuilleta les pages avant d'interrompre son geste quand elle réalisa que le dessin qu'elle avait fait la nuit dernière avait disparu. En lieu et place, un beau croquis au crayon d'elle-même, endormie dans son lit. Le dessin avait été exécuté avec un tel sens du détail, comme celui qu'elle avait fait de lui. Sur l'image, sa main reposait près de son visage et elle remarqua le symbole qui l'ornait. En guise de légende, sous le dessin, une main élégante y avait écrit « Syn ».
*****
Tabatha gara sa voiture dans la partie VIP du parking du Moon Dance et sortit du véhicule. Réajustant la petite robe qu'elle avait choisi de porter, elle rangea les clefs dans son sac à main et se dirigea vers l'entrée. Elle était fatiguée de se terrer dans cet appartement vide à attendre Kriss. Sentir l'excitation de la foule aidait déjà à lui changer les idées.
Nick sourit en la voyant approcher et il défit le cordon pour la laisser passer devant tous ceux et celles qui attendaient d'entrer. Il ne faisait pas cela parce que la compagne de son frère était sa meilleure amie⦠il le faisait parce que, sans Tabatha⦠ils n'auraient pas retrouvé Micah à temps pour le sauver.
Il posa un regard perplexe sur son épaule nue. La dernière fois qu'il l'avait vue⦠cette épaule arborait une bien vilaine blessure, alors que ce soir-là , il n'en restait même plus trace. On aurait pu croire qu'une sorte de fée guérisseuse parcourait cette ville, parce que les blessures de Micah avaient disparu tout aussi mystérieusement.
« Comment ça va, ce soir ? demanda-t-il avec curiosité, en surprenant la pointe de tristesse dans ses yeux.
Tabatha lui fit un petit sourire.
â Ãa va.
â Quelqu'un t'a-t-il déjà dit à quel point tu es à croquer ? la taquina-t-il, les yeux brillants. C'était la solution la plus directe pour remonter le moral d'une fille... il devrait le savoir, il était entouré de filles toutes les nuits.
Tabatha secoua la tête en souriant.
â Tu es incorrigible.
â Oui, approuva Nick. Est-ce que ça signifie que je vais te ramener chez moi cette nuit ?
â Pas la moindre chance ! rétorqua Tabatha avec un sourire ironique avant d'ajouter : De plus, avec toi qui habite juste au-dessus du dancefloor, ce serait beaucoup trop facile.
Nick posa une main sur son cÅur et fit mine de reculer d'un pas chancelant.
â Tabby, mon chaton⦠tu me blesses. Mes intentions étaient parfaitement innocentes.
â J'en suis sûre, répondit Tabatha en riant avant de lui faire un clin d'Åil. Mais je te demanderais peut-être une danse plus tard.
Nick