Le roman d'un jeune homme pauvre (Play). Feuillet Octave. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Feuillet Octave
Издательство: Public Domain
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Жанр произведения: Зарубежная драматургия
Год издания: 0
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en outre m'exposer à toutes les entreprises de l'intrigue, je suis déterminé à le quitter; le nom originaire de ma famille est Odiot: c'est le seul que je porterai désormais.

       LAUBEPIN.

      Ah! (se frottant les mains gaiement et amicalement.) Savez-vous que vous serez difficile à caser, très-difficile à caser, jeune homme, avec ces idées-là? C'est étonnant, Monsieur, comme je suis frappé depuis un moment de votre ressemblance avec madame votre mère.

      MAXIME, souriant tristement.

      Avec ma mère? Je ne pensais pas… On m'a toujours dit que j'étais le portrait vivant de mon aïeul paternel… Jacques de Champcey.

       LAUBEPIN.

      Oh!.. cependant… les yeux et le sourire… Mais c'est assez abuser de vos instants. Monsieur le marquis… je vous laisse.

       SCENE VII.

       LES MEMES, VAUBERGER.

       VAUBERGER.

      Voilà les papiers, Monsieur.

       LAUBEPIN.

      Ah! c'est votre dossier que j'ai envoyé prendre; il y a encore deux ou trois pièces importantes qui sont déposées chez le notaire, chez mon successeur. C'est à deux pas d'ici. Si vous voulez venir les prendre, vous donneriez en même temps quelques signatures indispensables.

       MAXIME.

      Soit. Je vous accompagne. (A Vauberger.) Rangez ces papiers sur cette étagère. Allons, Monsieur. (Ils sortent après quelques cérémonies de Laubépin.)

       SCENE VIII.

      VAUBERGER, puis MADAME VAUBERGER.

      VAUGERGER, rangeant les papiers1 [1. Vauberger, madame Vauberger.] .

      Il ne me remercierait pas seulement de la peine.

       MADAME VAUBERGER.

      Dis donc, Vauberger, sais-tu si le vieux l'a invité à dîner?

       VAUBERGER.

      Je n'en sais rien, je n'ai pas entendu… qu'est-ce que ça me fait, d'ailleurs!

       MADAME VAUBERGER.

      Pauvre M. Maxime!

       VAUBERGER.

      T'y voilà encore! Ecoute, tu m'ennuies à la fin avec ton Maxime! Est-ce ma faute à moi s'il est ruiné, tiens!

       MADAME VAUBERGER.

      Tu verras, Vauberger, tu verras qu'un de ces matins il se tuera, ce garçon-là.

       VAUBERGER.

      Eh bien! s'il se tue, on l'enterra, quoi!

       MADAME VAUBERGER.

      Je te dis, Vauberger, que ça t'aurait fendu le coeur si tu l'avais vu, comme je l'ai vu ce matin, avaler sa carafe d'eau claire pour déjeuner. Songe donc, Vauberger, manquer de feu et de pain! un garçon qui a été élevé dans des fourrures et nourri toute sa vie avec du blanc-manger! Ca n'est pas une honte et une indignité, ça! et ça n'est pas un drôle de gouvernement que ton gouvernement qui permet des choses pareilles!..

      VAUBERGER, avec un profond dédain.

      Mais ça ne regarde pas du tout le gouvernement! Mon Dieu! que les femmes sont bêtes! et puis, c'est pas vrai, il n'en est pas là, il ne manque pas de pain… ce n'est pas possible.

       MADAME VAUBERGER.

      Puisque j'en suis sûre! puisqu'il n'a plus un sou, puisque Edouard l'a espionné… Je te dis qu'il n'a pas déjeuné ce matin, à preuve que ses pauvres jambes ne peuvent plus le soutenir… et je parie qu'il ne va pas encore dîner ce soir… car il est trop fier pour mendier un dîner!

       VAUBERGER.

      Eh bien, tant pis pour lui! Quand on est pauvre, faut pas être fier!

      MADAME VAUBERGER, indignée.

      Vauberger! tu es un concierge, tu veux qu'on t'appelle concierge… eh bien, tu as les sentiments d'un portier!

       VAUBERGER.

      Madame Vauberger! (Maxime paraît au fond.)

       SCENE IX.

       LES MEMES, MAXIME.

      VAUBERGER, servilement.

      Monsieur le marquis, je rangeais ces papiers… Monsieur le marquis n'a pas d'autre ordre à nous donner?

      MAXIME, froidement.

      Allez-vous-en.

       VAUBERGER.

      Oui, monsieur le marquis. (Se retournant près de sortir.)

      Ruiné, va!

       SCENE X.

      MAXIME, seul.

      Je n'ai pas osé… je n'ai pas osé lui demander l'aumône… et pourtant ce n'eût pas été une aumône, puisqu'il a de l'argent à moi… mais je n'ai pas osé… Je le verrai demain matin, et j'espère qu'il m'offrira de lui-même… on ne meurt pas pour un jour de jeûne… Ah! si je pèche par orgueil, je suis puni… car réellement je souffre… Si j'allais dîner tout bonnement n'importe où… on me connaît… je pourrais dire que j'ai oublié ma bourse… j'ai fait cela cent fois, sans scrupule, dans d'autres temps… Non! tous ces expédients, qui sentent la misère et la tricherie, me répugnent trop… Pour les pauvres, cette pente est glissante; je n'y mettrai pas le pied! Si je pouvais dormir. (Il s'asseoit dans le fauteuil.) La faim! ce n'est donc pas un vain mot… la faim! Il y a donc vraiment une maladie de ce nom-là… il y a vraiment des créatures humaines qui souffrent presque chaque jour ce que je souffre en ce moment?.. et encore, moi, je souffre seul; le seul être qui m'intéresse au monde, ma soeur, je vois son cher visage, heureux, souriant… Mais ceux qui entendent le cri déchirant de leurs entrailles répété par des voix aimées, suppliantes… ceux qu'attendent dans leur froid logis des femmes aux joues pâles et des petits enfants sans sourire… pauvres gens… O sainte charité! (Il sommeille. – Musique jusqu'au réveil de Maxime.)

       SCENE XI.

       MAXIME, MADAME VAUBERGER.

      Elle entre doucement, portant quelques plats sur un plateau. Elle pose le plateau sur la cheminée, approche une petite table et la couvre d'une nappe.

      MAXIME, s'éveillant à demi.

      Triste sommeil! Je fais de vrais rêves de naufragé… je ne vois que des mirages de festins, de banquets! (Apercevant le plateau.) Tiens! (Il voit madame Vauberger.) Qu'est-ce que c'est? qu'est-ce que vous faites?

      MADAME VAUBERGER, affectant la surprise.

      Est-ce que Monsieur n'a pas demandé à dîner?

       MAXIME.

      Pas du tout.

       MADAME VAUBERGER.

      Edouard m'a pourtant dit que Monsieur…

       MAXIME.

      Edouard s'est trompé: c'est quelque locataire à côté; voyez.

       MADAME VAUBERGER.

      Il n'y a pas de locataire sur le palier de Monsieur… Je ne comprends pas…

       MAXIME.

      Enfin, ce n'est pas moi! Qu'est-ce que cela veut donc dire?..

      Vous me fatiguez! Emportez cela!..

      MADAME VAUBERGER. Elle replie tristement la nappe, et reprend timidement après une pause.

      Monsieur a probablement dîné?

       MAXIME.

      Probablement.

       MADAME VAUBERGER.

      C'est