La Daniella, Vol. II. Жорж Санд. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Жорж Санд
Издательство: Public Domain
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Жанр произведения: Зарубежная классика
Год издания: 0
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non! elle ne le pourrait pas. Son frère est là pour l'en empêcher; et, d'ailleurs, si Olivia voit qu'il y a du danger à lui faire savoir où nous en sommes, elle le lui cachera; mais Olivia agira, ou bien la Mariuccia! On ne peut empêcher ni l'une ni l'autre d'aller à Rome. Lord B*** est peut-être revenu de Florence. Le cardinal, quand il saura de quelle manière on interprète sa défense, fera évacuer les parcs et jardins. Enfin, tout ceci est l'affaire de quelques jours et il s'agit de patienter avec une maigre chère.

      – Avons-nous des vivres pour quelques jours?

      – Certainement! Nous avons les lapins apprivoisés; il y en a quatre. On peut vivre à deux avec un lapin par jour.

      – Nous sommes trois!

      – Le capucin aura les os: il a de si bonnes dents, des dents de requin! et puis, nous avons la chèvre!

      – Pauvre chèvre! Mieux vaut la garder; elle donne du lait, et, avec du lait, on vit.

      – C'est vrai, gardons la chèvre. La pâture ne lui manquera pas. Par ce temps printanier, ce qu'elle tond d'un côté repousse de l'autre. Seulement, il faudrait l'empêcher d'aller dans le parterre, où elle dévaste certaines racines qui m'ont bien l'air d'être mangeables, faute de mieux.

      – Précisément, j'ai vu là des asperges sauvages. Nous lui interdirons le parterre.

      – Et que diriez-vous, mossiou, d'une brochette de moineaux de temps en temps?

      – Eh! eh! cela peut être agréable à l'occasion.

      – Avec une petite barde de lard autour! j'ai eu la bonne idée d'en apporter un beau morceau que nous ferons durer longtemps. Et puis, avec des trappes, comme je le disais au carabinier, on prend des lapins sauvages, mossiou! Et il y en a ici, je vous en réponds!

      – Je n'en ai jamais vu un seul; mais, en revanche, il y a des rats magnifiques.

      – Fi, mossiou! avant d'en venir là, nous aurons épuisé tous les oiseaux du ciel!

      – Mais comment les prendras-tu, ces oiseaux? Nous n'avons ni fusil ni poudre.

      – Nous ferons des arcs et des flèches, mossiou! Je n'y suis pas maladroit, non plus qu'à la fronde.

      – Je songe à quelque chose de plus sûr, lui dis-je en riant: c'est à faire des épinards avec des orties. J'ai lu quelque part que c'était absolument la même chose.

      Tartaglia fit la grimace.

      – Possible! dit-il; mais je crois que je laisserai ma part de ce mets-là au capucin.

      Vous voyez que la gaieté nous était revenue, et j'aidais mon compagnon à faire des projets gastronomiques, puisque c'était là sa préoccupation dominante. La mienne était de trouver moyen de faire évader le moine, afin qu'il pût au moins dire à Daniella que je prenais patience, et que j'étais pourvu de vivres pour longtemps.

      – Écoute, dis-je à Tartaglia, tout cela est réglé, et nous voilà bien sûrs de pouvoir attendre environ une semaine; mais nous croiserons-nous les bras, et ne chercherons-nous pas cette issue souterraine qui a certainement existé et qui doit exister encore?

      – Ah! voilà, fit-il en soupirant, a-t-elle jamais existé?

      – Mais on sortait de ces cuisines où tu as tant cherché à entrer! On y entrait par le palais, et on en sortait par le jardin au bas du terrazzone.

      – Je vous entends, mossiou, dit Tartaglia, dont l'esprit actif se réveille dès qu'on fait appel à sa sagacité. Si nous pouvions sortir de cette cuisine, que nous appelons la Befana, nous nous trouverions au bas du terrazzone, tandis que les carabiniers sont dessus, et nous entrerions tout de suite dans un fourré de lauriers qui est là, et, de là, dans l'allée de cyprès; et, de là, dans la cour de Felipone, qui nous laisserait certainement évader. C'est un brave homme, je le connais.

      – Eh bien?

      – Eh bien, oui, on sortirait par les cuisines, s'il y avait une sortie; mais je ne la connais pas, mossiou; elle doit être souterraine, car je n'entends pas le cri des sentinelles au bas du grand contre-fort sans yeux du terrazzone, ce qui prouve bien qu'on regarde comme impossible une évasion de ce côté-là.

      – Raison de plus pour diriger nos efforts de ce côté-là. Il y a toujours moyen de percer un mur, eût-il dix pieds d'épaisseur; et, d'ailleurs, je compte comme toi sur la découverte d'un passage souterrain.

      – Comme moi, vous dites? Eh! je n'y compte déjà pas tant, quoique j'en aie ouï parler. Mais, mossiou, vous oubliez une chose, c'est que la grande affaire, ce n'est pas encore tant de sortir de cette fameuse Befana que d'y entrer!

      – Eh bien! la cave du Pianto? Et ton barreau entamé il y a si longtemps? et ta lime anglaise qui ne te quitte jamais? et nos quatre bras pour travailler?

      – Et les pierres qui se disjoignent, mossiou?.. et la lézarde qui s'agrandit dès qu'on ébranle la grille du soupirail?

      – Bah! nous étayerons!

      – Nous étayerons une construction de peut-être cent pieds de haut, à nous deux, mossiou?..

      – Oui quelques briques bien placées suffiraient pour empêcher le dôme de Saint-Pierre de s'écrouler. Voyons, il n'est que neuf heures; voilà le vent qui s'élève, et qui couvrira le bruit de notre travail. C'est une circonstance rare depuis quelque temps, et dont il faut profiter. Nous sommes lestés d'un bon souper, nous sommes dispos, nous sommes de bonne humeur; attendrons-nous la faim, la tristesse, le découragement?..

      – Allons-y, mossiou, s'écria Tartaglia en se levant, et, à la française, allons-y gaiement!

      Mais au moment de prendre la bougie, il s'arrêta.

      – Nous ferions mieux, dit-il, de nous coucher de bonne heure et de ménager le luminaire. Le jour où nous manquerons de bougie et de chandelle… Cela peut devenir bien incommode et bien dangereux, mossiou, de ne pas voir clair dans ce taudis!

      – Bah! nous sommes approvisionnés de cela aussi pour une semaine, et, d'ailleurs, la question est maintenant de sortir d'ici.

      Quand Tartaglia m'eut fait voir la barre limée par lui, je reconnus avec chagrin qu'en réussissant à scier la grille, nous ferions indubitablement tomber le petit cintre de pierres du soupirail; et comment savoir où s'arrêterait l'écroulement de cet édifice, abandonné depuis plus de cinquante ans à toutes les influences de la destruction?

      Mais, après mûr examen, je crus pouvoir affirmer qu'en étayant le milieu avec une pile de briques sur champ, et en soutenant les bas-côtés avec deux grosses boules de pierre qui servaient d'ornement autrefois à je ne sais quelle construction dans ce préau, et qui gisent maintenant dans les ronces, nous pouvions enlever la grille sans danger, et nous glisser encore par l'ouverture du soupirail.

      Les mesures étant prises et les matériaux rassemblés, nous nous mîmes à l'oeuvre, et les pléiades étaient sur nos têtes, c'est-à-dire qu'il était environ minuit, quand deux barres, enlevées sans accident, nous laissèrent le passage libre. Mais nous étions fatigués, nous avions chaud, et Tartaglia éprouvait une extrême répugnance à risquer l'aventure. Il avait des vertiges, il lui semblait que le pavé oscillait sous ses pieds. Il me supplia d'attendre au lendemain.

      – Si rien n'a bougé demain matin, dit-il, je vous jure d'être gai comme un merle, et de descendre là dedans en sifflant la cachucha.

      Je cédai, et, une heure après, nous étions endormis, en dépit de la voix des sentinelles qui s'appelaient et se répondaient autour des murailles, et de la lueur du feu du bivouac, qui projetait un reflet rouge jusque sur les dalles de la terrasse du casino.

      XXXIV

      Mondragone, 22 avril.

      Hier matin, nous avons déjeuné copieusement; malgré mes recommandations de sobriété et de prudence, Tartaglia a la passion de la cuisine. Faire de bons plats et