Le Cabinet des Fées. Шарль Перро. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Шарль Перро
Издательство: Public Domain
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Жанр произведения: Сказки
Год издания: 0
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habits: elle portait une couronne de diamants sur sa tête, et trois filles des plus riches barons de l'État tenaient la queue de son manteau royal; elle avait au pouce l'anneau du roi Charmant, que Florine remarqua le jour qu'ils parlèrent ensemble: elle fut étrangement surprise de voir Truitonne dans un si pompeux appareil. «Voilà ma fille qui vient vous apporter des présents de sa noce, dit la reine; le roi Charmant l'a épousée: il l'aime à la folie; il n'a jamais été de gens plus satisfaits.» Aussitôt on étale devant la princesse des étoffes d'or et d'argent, des pierreries, des dentelles, des rubans, qui étaient dans de grandes corbeilles de filigrane d'or. En lui présentant toutes ces choses, Truitonne ne manquait pas de faire briller l'anneau du roi; de sorte que la princesse Florine ne pouvait plus douter de son malheur. Elle s'écria, d'un air désespéré, qu'on ôtât de ses yeux tous ces présents si funestes; qu'elle ne voulait plus porter que du noir, ou plutôt qu'elle voulait présentement mourir. Elle s'évanouit; et la cruelle reine, ravie d'avoir si bien réussi, ne permit pas qu'on la secourût: elle la laissa seule dans le plus déplorable état du monde, et alla conter malicieusement au roi, que sa fille était si transportée de tendresse, que rien n'égalait les extravagances qu'elle faisait; qu'il fallait bien se donner de garde de la laisser sortir de la tour. Le roi lui dit qu'elle pouvait gouverner cette affaire à sa fantaisie, et qu'il en serait toujours satisfait.

      Lorsque la princesse revint de son évanouissement, et qu'elle réfléchit sur la conduite qu'on tenait avec elle, aux mauvais traitements qu'elle recevait de son indigne marâtre, et à l'espérance qu'elle perdait pour jamais d'épouser le roi Charmant, sa douleur devint si vive, qu'elle pleura toute la nuit; en cet état elle se mit à sa fenêtre, où elle fit des regrets fort tendres et fort touchants. Quand le jour approcha, elle la ferma, et continua de pleurer.

      La nuit suivante, elle ouvrit la fenêtre, elle poussa de profonds soupirs et des sanglots, elle versa un torrent de larmes: le jour venu, elle se cacha dans sa chambre. Cependant le roi Charmant, ou pour mieux dire le bel Oiseau Bleu, ne cessait point de voltiger autour du palais: il jugeait que sa chère princesse y était renfermée; et si elle faisait de tristes plaintes, les siennes ne l'étaient pas moins. Il s'approchait des fenêtres le plus qu'il pouvait, pour regarder dans les chambres; mais la crainte que Truitonne ne l'aperçût, et ne se doutât que c'était lui, l'empêchait de faire ce qu'il aurait voulu. «Il y va de ma vie, 109 disait-il en lui-même: si ces mauvaises découvraient où je suis, elles voudraient se venger; il faudrait que je m'éloignasse, ou que je fusse exposé aux derniers dangers.» Ces raisons l'obligèrent à garder de grandes mesures, et d'ordinaire il ne chantait que la nuit.

      Il y avait vis-à-vis de la fenêtre où Florine se mettait un cyprès d'une hauteur prodigieuse: l'Oiseau Bleu vint s'y percher. Il y fut à peine, qu'il entendit une personne qui se plaignait: «Souffrirai-je encore longtemps? disait-elle; la mort ne viendra-t-elle point à mon secours? Ceux qui la craignent ne la voient que trop tôt; je la désire, et la cruelle me fuit. Ah! barbare reine, que t'ai-je fait, pour me retenir dans une captivité si affreuse? N'as-tu pas assez d'autres endroits pour me désoler? Tu n'as qu'à me rendre témoin du bonheur que ton indigne fille goûte avec le roi Charmant!» L'Oiseau Bleu n'avait pas perdu un mot de cette plainte, il en demeura bien surpris, et il attendait le jour avec la dernière impatience, pour voir la dame affligée; mais avant qu'il vint, elle avait fermé la fenêtre, et s'était retirée.

      L'oiseau curieux ne manqua pas de revenir la nuit suivante: il faisait clair de lune. Il vint une fille à la fenêtre de la tour, qui commençait ses regrets: «Fortune, disait-elle, toi qui me flattais de régner, toi qui m'avais rendu l'amour de mon père, que t'ai-je fait pour me plonger tout d'un coup dans les plus amères douleurs? Est-ce dans un âge aussi tendre que le mien qu'on doit commencer à ressentir ton inconstance? Reviens, barbare, reviens s'il est possible; je te demande, pour toutes faveurs, de terminer ma fatale destinée.» L'Oiseau Bleu écoutait; et plus il écoutait, plus il se persuadait que c'était son aimable princesse qui se plaignait. Il lui dit: «Adorable Florine, merveille de nos jours! pourquoi voulez-vous finir si promptement les vôtres? Vos maux ne sont point sans remède. – Hé! qui me parle, s'écria-t-elle, d'une manière si consolante? – Un roi malheureux, reprit l'Oiseau, qui vous aime, et n'aimera jamais que vous. – Un roi qui m'aime! ajouta-t-elle: est-ce ici un piége que me tend mon ennemie? Mais, au fond, qu'y gagnera-t-elle? Si elle cherche à découvrir mes sentiments, je suis prête à lui en faire l'aveu. – Non, ma princesse, répondit-il, l'amant qui vous parle n'est point capable de vous trahir.» En achevant ces mots, il vola sur la fenêtre. Florine eut d'abord grande peur d'un Oiseau si extraordinaire, qui parlait avec autant d'esprit que s'il avait été homme, quoiqu'il conservât le petit son de voix d'un rossignol; mais la beauté de son plumage et ce qu'il lui dit la rassura. «M'est-il permis de vous revoir, ma princesse? s'écria-t-il Puis-je goûter un bonheur si parfait sans mourir de joie? Mais, hélas! que cette joie est troublée par votre captivité, et l'état où la méchante Soussio m'a réduit pour sept ans. – Et qui êtes-vous, charmant Oiseau? dit la princesse en le caressant. – Vous avez dit mon nom, ajouta le roi, et vous feignez de ne me pas connaître. – Quoi! le plus grand roi du monde, quoi! le roi Charmant, dit la princesse, serait le petit Oiseau que je tiens? – Hélas! belle Florine, il n'est que trop vrai, reprit-il; et si quelque chose m'en peut consoler, c'est que j'ai préféré cette peine à celle de renoncer à la passion que j'ai pour vous. – Pour moi? dit Florine. Ah! ne cherchez point à me tromper! Je sais, je sais que vous avez épousé Truitonne; j'ai reconnu votre anneau à son doigt; je l'ai vue toute brillante des diamants que vous lui avez donnés. Elle est venue m'insulter dans ma triste prison, chargée d'une riche couronne et d'un manteau royal qu'elle tenait de votre main, pendant que j'étais chargée de chaînes et de fers. – Vous avez vu Truitonne en cet équipage? interrompit le roi; sa mère et elle ont osé vous dire que ces joyaux venaient de moi? O ciel! est-il possible que j'entende des mensonges si affreux, et que je ne puisse m'en venger aussitôt que je le souhaite! Sachez qu'elles ont voulu me décevoir, qu'abusant de votre nom, elles m'ont engagé d'enlever cette laide Truitonne; mais aussitôt que je connus mon erreur, je voulus l'abandonner, et je choisis enfin d'être Oiseau Bleu sept ans de suite, plutôt que de manquer à la fidélité que je vous ai vouée.»

      Florine avait un plaisir si sensible d'entendre parler son aimable amant, qu'elle ne se souvenait plus des malheurs de sa prison. Que ne lui dit-elle pas pour le consoler de sa triste aventure, et pour le persuader qu'elle ne ferait pas moins pour lui qu'il avait fait pour elle! Le jour paraissait, la plupart des officiers étaient déjà levés, que l'Oiseau Bleu et la princesse parlaient encore ensemble. Ils se séparèrent avec mille peines, après s'être que toutes les nuits ils s'entretiendraient ainsi.

      La joie de s'être trouvés était si extrême, qu'il n'est point de termes capables de l'exprimer; chacun de son côté remerciait l'amour et la fortune. Cependant Florine s'inquiétait pour l'Oiseau Bleu: «Qui le garantira des chasseurs, disait-elle, ou de la serre aiguë de quelque aigle, ou de quelque vautour affamé, qui le mangera avec autant d'appétit que si ce n'était pas un grand roi? O ciel! que deviendrais-je si ses plumes légères et fines, poussées par le vent, venaient jusques dans ma prison m'annoncer le désastre que je crains?» Cette pensée empêcha que la pauvre princesse fermât les yeux; car, lorsque l'on aime, les illusions paraissent des vérités, et ce que l'on croyait impossible dans un autre temps semble aisé en celui-là de sorte qu'elle passa le jour à pleurer, jusqu'à ce que l'heure fût venue de se mettre à sa fenêtre.

      Le charmant Oiseau, caché dans le creux d'un arbre, avait été tout le jour occupé à penser à sa belle princesse. «Que je suis content, disait-il, de l'avoir retrouvée! qu'elle est engageante! que je sens vivement les bontés qu'elle me témoigne!» Ce tendre amant comptait jusqu'aux moindres moments de la pénitence qui l'empêchait de l'épouser, et jamais l'on n'en a désiré la fin avec plus de passion. Comme il voulait faire à Florine toutes les galanteries dont il était capable, il vola jusqu'à la ville capitale de son royaume, il alla à son palais, il entra dans son cabinet par une vitre qui était cassée; il prit des pendants d'oreilles de diamants, si parfaits et si beaux, qu'il n'y en avait point au monde qui en approchassent: il les apporta le soir à Florine, et la pria de s'en parer. «J'y consentirais, lui dit-elle, si vous me voyiez le jour; mais puisque je ne vous parle que la nuit,


<p>109</p>

Il y va de ma vie, my life is in danger.