L'amour au pays bleu. Hector France. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Hector France
Издательство: Bookwire
Серия:
Жанр произведения: Языкознание
Год издания: 0
isbn: 4064066075613
Скачать книгу
rel="nofollow" href="#fb3_img_img_5163e7db-6441-507d-8149-d1801b0fdad4.jpg" alt="image"/>

      La vie Moderne (26 février 1881).

      Je ne connais ni le Roman du Curé, ni l'Homme qui tue, ni le Péché de Sœur Cunégonde, et je ne puis que le regretter après la lecture de l'Amour au Pays Bleu. C'est l'œuvre d'un homme qui a déjà un talent robuste et qui en aura bien davantage, quand il se sera défait de quelques brutalités de forme, voulues peut-être, mais inutiles, à mon sens. M. Hector France est, si j'en crois la préface de son livre, un ancien spahis qui a longtemps vécu en Algérie. Je n'ai jamais rien lu de plus coloré que cet ardent poème d'amour qui se déroule au milieu des riches paysages du Tell, parmi ces paisibles habitants aux mœurs pastorales, dont, en qualité de sabre civilisateur, il a jadis été troubler la paix par de sanglantes chevauchées. M. Hector France est un écrivain de race et un conteur très attachant. J'ai lu l'Amour au Pays Bleu tout d'une traite, et je gage que vous en ferez autant, cher lecteur.

      d'Artois.

      C'est aussi notre avis et nous pensons que ces divers extraits, pris dans la presse parisienne, dans celle de province et de l'étranger, disent assez que nous rééditons l'œuvre d'un maître.

      Cette nouvelle édition ne le cède en rien comme exécution typographique à la première et, grâce au concours de M. Godefroy Durand, le célèbre dessinateur du Graphic, nous avons pu l'illustrer d'une magnifique eau-forte.

       Nous croyons donc faire à la fois œuvre utile et agréable, persuadés que le succès ne nous fera pas défaut.

      Londres, le 25 mai 1885.

image image

       Table des matières

      A Camille Delthil

À

       cheval, au milieu des cavaliers rouges, j'ai jeté les premières ébauches de ce livre. Et ces feuilles volantes, roussies par le soleil, maculées par la pluie et les nuits humides, froissées sur la selle, lacérées, perdues dans les camps, je les avais oubliées.

      Mais un soir de décembre, alors que le brouillard de Londres, pesant sur les poitrines, glissait avec le spleen par les fissures des portes et des fenêtres mal closes, j'ai voulu aussi oublier et l'exil et l'heure et l'inexorable temps.

      Et ainsi qu'une cavale que l'amour talonne, ma pensée, brisant ses entraves, s'est échappée dans les espaces, remontant les jours écoulés, jusqu'aux rives lointaines où le ciel est bleu.

      Ah! les joyeuses gambades au fond des vallées, que bordent les coteaux où poussent drus, oliviers, grenadiers et cactus; les courses dans la plaine, le long des rubans de lauriers roses, gracieux festons de la rivière aux bords effrités et crayeux, les longues haltes sous les tamariniers touffus, près de la source fraîche où, dans une amphore étrusque, vient puiser la fille aux yeux noirs. Puis, à l'entrée des solitudes où s'aventurent les caravanes, les furieux galops derrière les gazelles, tandis qu'au fond des ardents horizons, la blanche silhouette du minaret du ksour et la tête chevelue des dattiers de l'oasis tremblent dans l'air diaphane!

       J'ai rassemblé les pages éparses, et pendant les longues heures de nuit, alors que la froide bise heurtait à ma porte, je me bouchais les oreilles, et, capitonné dans mes rêves, caressé des rayons d'or des souvenirs, j'ai effacé le présent et j'ai vécu du passé....

       Que les âmes pudibondes, scandalisées par mes précédents livres, se rassurent! Elles ne trouveront ici aucun sujet dangereux.

      Ce sont des tableaux de la vie pastorale, et je vous les dédie, cher poète; j'y parle de la nature, que vous aimez, des grands horizons, des filles brunes et des moissons blondes, et aussi des primitifs et naïfs amours, chantés dans vos Poèmes Rustiques, et que votre compatriote et notre ami Léon Cladel a jetés, comme des fleurs sauvages, sur le socle de granit de ses rudes Paysans.

       Mais ce n'est pas dans les frais sentiers «tout baignés d'aurore», où

      Près de vous passe parois,

       En chantant, un clair minois

       De brune fillette,

       Portant l'amphore de grès,

       Ignorante du progrès,

       Et pourtant coquette.

      que je veux vous conduire; mais par les grandes plaines chauves, non loin des palmiers, là où la rustique fillette, vêtue de la tunique de Rébecca, offre, insoucieuse, ses seins, ses bras et ses jambes nus aux baisers du soleil; là-bas, sous la maison de poil des paysans du Tell, plus majestueux sous leurs burnous en loques que jamais ne le furent les plus nobles patriciens, chez les paisibles pasteurs bédouis enfin, que le sabre civilisateur a été, tant de fois, réveiller brusquement de leurs tranquilles rêves et arracher à leurs bibliques amours.

      Hector FRANCE.

       Charlton villa, Kent, mai 1880.

image image

       Table des matières

       Table des matières

D

      errière les molles ondulations bleues qui festonnaient le rideau du couchant, le ciel flamboyait comme une gigantesque Sodome, empourprant des ardents reflets de ses fournaises les hautes crêtes de l'Orient.

      Nous étions encore enveloppés de cette lumière fauve, et déjà la plaine se noyait sous les larges couches d'ombre. Les bizarres crevasses sombres, les taches calcinées, les touffes vertes, les bosselures du sol, la nappe foncée des marais d'Ain-Chabrou, la bordure de lauriers accrochés aux flancs crayeux du torrent aux eaux rousses, le long ruban gris du chemin déroulant ses zigzags jusqu'aux palmiers du Ksour, tout s'effaçait sous le noir uniforme et profond.

      Le Ksour! Djenarah, la perle du Souf! Des pentes élevées du Djebel, mon guide m'avait montré son haut minaret, dressé comme un frêle mât d'albâtre dans les vagues azurées de l'horizon. Longtemps nous vîmes la blanche aiguille étinceler aux feux de l'Occident; puis, peu à peu, elle disparut à mesure que nous descendions la montagne et que nous nous enfoncions dans la nuit.

image

      Des formes indécises traversèrent brusquement le chemin, et de grandes chauves-souris, s'élançant des crevasses, tournoyaient autour de nos têtes.

      Parfois deux étincelles ardentes