D’un autre côté, Albright était d’avis que la bible était un document historique qui, malgré les multitudes étapes rédactionnelles et de traduction, était toujours un reflet fiable de la réalité antique. Il était certain, à un degré presque fanatique, que les fouilles des vestiges anciens de la Palestine fourniraient une preuve concrète de l’histoire juive sur cette terre. Par conséquent, l’archéologie biblique, qui avait suivi les traces d’Albright et de ses disciples, avait résulté à une série de fouilles élargies en respectant les écrits bibliques (monticules), y compris à Ai, une ville royale cananéenne qui selon le livre de Josué dans la bible hébraïque fut conquise par les israélites lors de la seconde tentative ; à Beil She’an, dont les ruines sont devenues le parc national de Beit She’an ; à Beil Shemesh, où la ville moderne israélite de Beit Shemesh fut fondée en 1950 ; à Gezer, anciennement une ville-état cananéenne au pied des montagnes de Judée ; à Gibeon, une ville cananéenne au nord de Jérusalem conquise par Josué ; à Jéricho, en Cisjordanie et maintenant sous occupation israélienne depuis 1967 ; à Tel Hazor, le site de l’ancienne Hazor située au nord de la mer de Galilée ; à Tel Lachish, aujourd’hui un site archéologique et un parc national israélien ; à Tel Megiddo, qui avec son importance historique exagérée est devenue le parc national de Megiddo comme site protégé du patrimoine mondial ; et Jérusalem, que les juifs revendiquent aujourd’hui comme étant la capitale éternelle d’Israël. Ainsi en adoptant avec enthousiasme une vision biblique des fouilles, les archéologues ont réussi à faire en sorte que chaque nouvelle découverte contribue d’une manière ou d’une autre au puzzle biblique du passé, y compris l’ère patriarcale d’Abraham, d’Isaac et de Jacob (Genèse 12-50).
Cette approche pas très honnête de l’archéologie a inévitablement amené une situation où la profusion de découvertes archéologiques – plutôt que de justifier les récits bibliques – servait plutôt à discréditer leur crédibilité en créant des anomalies inexplicables. Les chercheurs, par exemple, ont eu des difficultés à s’entendre sur la période archéologique correspondant à l’âge patriarcal, n’étaient pas d’accord sur l’ère d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, ni sur l’époque où le Tombeau des patriarches à Hébron fut acheté pour servir de sépulture aux patriarches et aux matriarches.
Selon la chronologie biblique, Salomon avait construit le Premier Temple environ 480 ans après l’exode d’Égypte (1 Rois 6 :1) auquel il a fallu ajouter 430 ans supplémentaires de vie en Égypte (Exode 12 :40). Cependant, aucune preuve n’existe à ce jour. Dans les années 1960, Albright suggéra que les errances devaient être attribuées à l’Âge de bronze (22ème – 20ème siècles av. J.-C.), mais Benjamin Mazar – autorité de la branche israélienne de l’archéologie biblique – avait proposé que le passé historique de l’ère patriarcale devrait dater du 11ème siècle av. J.-C. ‘la période d’implantation’. Ces propositions ont été rejetées par d’autres érudits, qui considéraient l’historicité des récits comme étant des légendes ancestrales racontées au temps du Royaume de Judée.
Quant à l’Exode d’Égypte, les errances dans le désert et le récit du mont Sinaï, aucun document égyptien ne confirmaient ces affirmations. Si des juifs avaient été expulsés de l’Égypte ancienne, il était très peu probable que le nombre d’expulsés ait été le nombre revendiqué par les scribes juifs. Un événement aussi important– 600 000 personnes à l’époque auraient représentées au moins un quart de la population égyptienne – aurait été sans aucun doute enregistré avec diligence ou au moins mentionné. De nombreux documents égyptiens mentionnent cependant la coutume des bergers nomades qui sont arrivés en Égypte pour camper sur le delta du Nil pendant les périodes de sécheresse et de pénurie de nourriture. Bien que de telles incursions inoffensives sur une période de plusieurs siècles fussent fréquentes, pourquoi n’auraient-ils pas rapporté des événements aussi exceptionnels.
De plus, les chercheurs se sont constamment efforcés à essayer de localiser le mont Sinaï et les campements désertiques des tribus nomades. Mais malgré leur acharnement, pas un seul site correspondant au récit biblique n’a été découvert. Les principaux événements historiques d’Israël n’ayant pas été prouvés par des découvertes archéologiques ou des documents non-bibliques, la plupart des historiens sont d’avis que le séjour en Égypte et les événements de l’exode pourraient avoir touché un nombre négligeable de familles nomades, dont l’histoire fut embellie pour répondre aux besoins d’une idéologie nationaliste.
Même le récit historiquement important sur la façon dont la terre de Canaan fut conquise par les israélites est contesté en raison des difficultés rencontrées à découvrir des preuves archéologiques pour soutenir cette affirmation biblique. Des fouilles de différentes expéditions à Jéricho et à Ai – des villes dont la conquête est concisément détaillée dans le Livre de Josué – n’ont abouti à rien qu’à la conclusion que pendant la période convenue pour la conquête à la fin du 13ème siècle av. J.-C., il n’y avait aucune ville aux deux endroits mentionnés et certainement pas de murs qui auraient pu ‘dégringoler’. Par manque de preuves, une variété d’explications peu convaincantes ont été offertes, y compris la suggestion que les murs de Jéricho avaient été emportés par la pluie.
Il y a presque un demi-siècle, les érudits bibliques avaient proposé l’idée que les récits de la conquête ne devraient être considérés que comme des légendes mythiques, car la découverte de plus en plus de sites avait prouvé que les endroits en question ont à différents moments tout simplement disparu ou ont été abandonnés. Il fut donc finalement conclu qu’il n’existait aucune preuve factuelle pour soutenir le récit biblique d’une conquête par les tribus israélites dans une campagne militaire dirigée par Josué.
Alors que le récit biblique exagère l’étendue – « grandes villes avec des murs célestes » (Deutéronome 9 :1) – des fortifications de la ville cananéenne conquise par les israélites, la réalité était tout autre sur les sites de fouilles où l’on a découvert que quelques vestiges d’habitations non-fortifiées en petit nombre qui pourraient difficilement être considérés comme des villes. Il était donc évident que la culture urbaine palestinienne de la fin du 13ème siècle av. J.-C. s’était désintégrée sur une période de plusieurs centaines d’années plutôt que d’être le résultat de la conquête militaire par les israélites.
De plus, soit les auteurs des descriptions bibliques ne connaissaient pas, soit ils ignoraient délibérément la réalité géopolitique de la Palestine. En effet, la Palestine fut soumise à la domination égyptienne jusqu’au milieu du 12ème siècle av. J.-C. Les centres administratifs égyptiens étaient situés à Gaza, à Japho (Jaffa) et à Beit She’an prouvés par de nombreux sites égyptiens sur les deux berges du Jourdain. Le récit biblique omet de mentionner cette présence égyptienne. Il est bien évident que les scribes ignoraient ou avaient délibérément omis une importante réalité historique des découvertes archéologiques prouvant que le scénario biblique des « grandes » villes cananéennes, des fortifications imprenables avec des « murs très hauts » et l’héroïsme de quelques conquérants israélites aidés par Dieu contre les cananéens plus nombreux, étaient toutes des reconstructions théologiques dépourvues de fondements factuels.
Même l’émergence progressive des israélites en tant que peuple était sujette au doute et au débat, car il n’y avait aucune preuve d’une conquête militaire spectaculaire de villes fortifiées, ni de preuves de l’identité réelle des israélites. Cependant les découvertes archéologiques ont indiqué qu’à partir de 1200 av. J.-C., identifiée à la période de ‘peuplement’, des centaines de petites colonies se sont installées dans la région centrale des collines où les agriculteurs travaillaient la terre et élevaient des moutons. Comme il avait déjà été établi que ces colons n’étaient pas venu d’Égypte, on proposa donc – dû aux tombes découvertes dans la région des collines – qu’ils étaient des bergers pastoraux qui avaient erré dans la région se livrant