Conçois, chère Eugénie, dans quelle situation je me trouvais moi-même, ayant sous mes yeux un pareil tableau!
Vivement émue, emportée par des désirs que je n'avais pas encore connus, je tâchais au moins de participer à leur ivresse. Chère amie, que ce retour sur mes jeunes années est encore agréable pour moi!
Enfin, l'attrait du plaisir me retint trop longtemps dans mon embuscade, et mon imprudence me trahit. Mon père, qui jusque-là avait été trop hors de lui pour penser à ce qui l'entourait, vit, en se dégageant des bras de Lucette, le coin du rideau levé; il m'aperçut; il s'enveloppa dans sa robe en s'approchant de la porte; je me retirai avec précipitation; il vint examiner le rideau et y découvrit ma manoeuvre; il se fixa près de la porte pendant que Lucette se rhabillait. Voyant qu'il restait, je m'imaginai qu'il n'avait rien aperçu. Curieuse de ce qu'ils faisaient encore dans cette chambre, je retournai au carreau. Quelle fut ma surprise quand j'y vis le visage de mon père! La foudre tombée sur moi ne m'eût pas causé plus de frayeur. Mon stratagème n'avait pas entièrement réussi; le rideau n'avait pu redescendre de lui-même comme je m'en étais flattée; cependant, il ne fit semblant de rien dans cet instant.
J'avais aperçu que Lucette était déjà rhabillée; il revint avec elle et l'envoya veiller à l'ordre de la maison. Je me trouvai seule avec lui. Il s'approcha pour examiner l'ouvrage que j'avais eu à faire: juge, ma chère, à quel point il en était! J'étais pâle et tremblante. Quel fut mon étonnement quand ce cher et tendre papa me prit dans ses bras et me donna cent baisers!
– Rassure-toi, ma chère Laurette; qui peut t'inspirer la terreur que je te vois! Ne crains rien, ma chère fille, tu sais la manière dont j'ai toujours agi vis-à-vis de toi; je ne te demande rien que la vérité; je désire que tu me regardes plutôt comme ton ami que comme ton père. Laure, je ne suis que ton ami, je veux qu'en cette qualité tu sois sincère avec moi. Ma Laure, je l'exige aujourd'hui: ne me déguise rien et dis-moi ce que tu faisais pendant que j'étais avec Lucette, et pourquoi l'arrangement singulier de ce rideau.
Sois vraie, je t'en conjure, et sans détour, tu n'auras pas lieu de t'en repentir. Mais si tu ne l'es pas, tu me refroidiras pour toi et tu peux compter sur un couvent.
Le nom de cette retraite m'avait toujours effrayée. Que je la connaissais peu! Je mettais alors une différence totale à être renfermée dans ce séjour ou d'être chez mon père.
D'ailleurs, je ne pouvais pas douter qu'il ne fût assuré que j'avais tout vu; et je m'étais enfin toujours si bien trouvée de ne lui avoir jamais caché la vérité que je ne balançai point à lui rendre compte de tout ce qui m'était connu depuis l'instant où il m'avait emportée, lorsque ma bonne s'était endormie, jusqu'à celui auquel il venait de me rejoindre.
Chaque détail que je lui faisais, chaque tableau que je retraçais, loin d'allumer sa colère, était payé par des baisers et des caresses. Je balançais néanmoins à lui dire que je m'étais procuré des sensations aussi nouvelles pour moi, qu'elles m'avaient paru délicieuses. Mais il en eut le soupçon:
– Ma chère Laurette, tu ne me dis pas tout encore…
Et, passant sa main sur mes fesses en me baisant:
– Achève. Tu ne dois ni ne peux rien me cacher, rends-moi compte de tout…
Je lui avouai que je m'étais procuré, par un frottement semblable à celui que je lui avais vu faire à Lucette, un plaisir des plus vifs, dont j'avais été toute mouillée, et que j'avais répété trois ou quatre fois depuis ce jour-là.
– Mais, ma chère Laure, voyant ce que j'enfonçais à Lucette, cela ne t'a-t-il pas donné l'idée de t'enfoncer le doigt?
– Non, cher papa, je n'en ai pas seulement eu la pensée.
– Prends garde, Laurette, de m'en imposer. Tu ne peux me cacher ce qui en est; viens me faire voir si tu as été sincère…
– De tout mon coeur, cher papa… Je ne t'ai rien déguisé.
Il me donna pour lors les noms les plus tendres. Nous passâmes dans sa chambre et, m'étendant sur le lit de repos, il me troussa et m'examina avec beaucoup d'attention; puis, entrouvrant un peu les bords de ma fente, il voulut y mettre le petit doigt. La douleur qu'il me faisait, annoncée par mes plaintes, l'arrêta.
– Elle est tout enflammée, ma chère enfant; je vois cependant que tu ne m'as pas trompé: sa rougeur vient sans doute du frottement auquel tu t'es amusée pendant que j'étais avec Lucette…
J'en convins, et je lui avouai même que je n'avais pu me procurer le plaisir que je cherchais. La sincérité de ma bouche fut récompensée d'un baiser de la sienne. Il la porta même, et fit frétiller sa langue, sous un endroit qui en éprouvait une sensation délicieuse. Ce genre de caresse me parut neuf et divin, et, pour porter l'enchantement à son comble, ce membre que j'avais vu parut à mes yeux; je le pris involontairement d'une main, et, de l'autre, j'écartai tout à fait la robe de mon père: il me laissa faire. Je tenais et voyais enfin de près ce bijou charmant que j'avais déjà si bien distingué entre les cuisses de Lucette. Que je le trouvais aimable et singulier! Je sentis dès ce moment qu'il était le véritable mobile des plaisirs. Cette peau, qui haussait et baissait par les mouvements de ma main, en couvrait et découvrait le bout; mais quelle ne fut pas ma surprise lorsque, après quelques moments de ce badinage, je le vis répandre la liqueur dont les fesses de ma bonne avaient été inondées. Il y mêlait des transports et des redoublements de caresses que je partageais. Le plaisir produisait en moi l'effet le plus vif. Bientôt, il passa dans mes sens et y mit une émotion indicible. Sa langue continuait son exercice, j'étais suffoquée…
– Ah! cher papa, achève!… holà! je me meurs!… Je me pâmai dans ses bras.
Depuis ce temps, tout fut pour moi une source de lumières; ce que je n'avais pas conçu jusqu'alors se développa dans l'instant. Mon imagination s'ouvrit entièrement; elle saisissait tout; il semblait que l'instrument que je touchais fût la clef merveilleuse qui ouvrit tout à coup mon entendement. Je sentis alors cet aimable papa me devenir plus cher, et ma tendresse pour lui prendre un accroissement incroyable: tout son corps fut livré au plaisir dans mes mains; mes baisers et mes caresses sans nombre se succédaient sans interruption, et le feu qu'elles excitaient en lui m'animait à les multiplier.
Il me ramena dans ma chambre, où ma bonne revint quelques instants après. Je ne prévoyais pas ce qu'il allait lui dire:
– Lucette, il est désormais inutile que nous nous gênions pour
Laure, elle en sait autant que nous.
Et il lui répéta tout ce que je lui avais détaillé, en lui montrant le jeu du rideau. Elle en parut affectée; mais je me jetai à son cou et mes caresses, unies aux raisons dont il la tranquillisa, dissipèrent le petit chagrin qu'elle avait témoigné. Il nous embrassa en recommandant à ma bonne de ne point me quitter. Il sortit, et revint une heure après avec une femme qui, dès qu'elle fut entrée, me fit déshabiller et prit sur moi la mesure d'une sorte d'ajustement dont je ne pouvais concevoir ni la forme ni l'usage.
Quand l'heure de se coucher fut venue, il me mit dans le lit de Lucette en la priant de veiller sur moi. Il nous laissa. Mais l'inquiétude le ramenant bientôt près de nous, il se mit dans le même lit. J'étais entre elle et lui; il me tenait embrassée et, couvrant de sa main l'entre-deux de mes cuisses, il ne me laissait pas y porter la mienne. Je pris alors son instrument, qui me causa beaucoup de surprise en le trouvant mou et pendant. Je ne l'avais point encore vu dans cet état, m'imaginant au contraire qu'il était toujours gros, raide et relevé: il ne tarda pas à reprendre, dans ma main, la fermeté et la grosseur que je lui connaissais. Lucette, qui s'aperçut de nos actions,