Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours. Tome III. Garneau François-Xavier. Читать онлайн. Newlib. NEWLIB.NET

Автор: Garneau François-Xavier
Издательство: Public Domain
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Жанр произведения: История
Год издания: 0
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d'être à portée d'observer les deux points où les Anglais commençaient à rassembler leurs forces, à savoir: le fort Oswégo, pour opérer par le lac Ontario, et le fort Édouard sur l'Hudson, pour opérer par le lac Champlain. Le bataillon de Béarn reçut ordre en conséquence de s'avancer jusqu'à Niagara, où l'on avait laissé seulement quelques hommes l'automne précédent, et que M. Pouchot, officier d'infanterie, versé dans la science de l'ingénieur, fut chargé de fortifier. Deux autres bataillons durent s'arrêter à Frontenac, s'y retrancher et donner la main à 1000 Canadiens et sauvages jetés dans l'espace qu'il y avait entre eux et Niagara. Le commandement de cette frontière fut donné à M. de Bourlamarque. Quant à Carillon, 3000 hommes dont 1500 réguliers, s'y trouvaient réunis à la fin de juillet sous les ordres du chevalier de Levis.

      Il fut envoyé aussi 120 hommes pour la protection des pêcheries de Gaspé. M. de Boishébert demeura chargé de la défense de la frontière du côté de l'Acadie avec un corps de Canadiens et de sauvages. Dans l'ouest, M. Dumas releva M. de Contrecoeur au fort Duquesne, et M. de Bellestre, M. Demuy au Détroit. Ces commandans avaient pour lieutenans dans les différens postes, MM. de Repentigny, d'Anglade, Hébert, Beaubassin, etc. 3,500 Canadiens et sauvages étaient répandus sur cette frontière depuis le lac Erié jusqu'à la vallée du Mississipi en suivant la route de l'Ohio et des Illinois. Les forces armées pour la défense du Canada depuis le Cap-Breton jusqu'aux Illinois ne dépassèrent donc jamais, dans cette campagne, 12,000 hommes, au chiffre le plus élevé; elles étaient beaucoup moindres lorsque les milices, après leurs expéditions guerrières, rentraient dans leurs foyers pour faire les semailles ou la moisson et vaquer aux autres travaux des champs.

      La forteresse de Louisbourg, qui était un point capital, avait à elle seule une garnison de 1100 hommes; ce qui était encore trop peu cependant. On le sentit à la cour, et on voulut y envoyer un renfort de 600 hommes sur la frégate l'Arc-en-ciel. Malheureusement ce vaisseau ne parvint point à sa destination. Il fut pris par la croisière anglaise établie sur les côtes du Cap-Breton, et que commandait le capitaine Spry.

      Tels étaient les préparatifs des Français pour la campagne de 56. Ceux de la Grande-Bretagne furent beaucoup plus formidables.

      Elle ne changea rien à son plan d'invasion du Canada de l'année précédente; elle vota avec joie finances et soldats pour laver la honte de la défaite du général Braddock et de la perte de l'île de Minorque dans la Méditerranée, événemens qui avaient fait une sensation profonde en Angleterre. L'Amérique, principal théâtre des opérations militaires, fixa surtout l'attention des peuples britanniques, qui y voyaient, là, leurs futures conquêtes et leur domination permanente. Le comte de Loudoun, vieil officier d'expérience, fut nommé gouverneur de la Virginie, et général en chef des armées dans l'Amérique du nord. Le général Abercromby y passa aussi avec deux régimens. 115,000 louis sterling furent votés par la chambre des communes pour aider les colonies à armer leurs milices. Les gouverneurs des diverses provinces s'assemblèrent à New-York, et résolurent de lever 10,000 hommes pour prendre le fort St. – Frédéric et s'assurer du commandement du lac Champlain; 6,000 hommes pour faire le siège de Niagara et couper la communication de la vallée de l'Ohio; 3,000 hommes pour marcher sur le fort Duquesne, et enfin 2,000 pour faire une diversion du côté de Québec, en remontant la rivière Kénébec, traversant les Alléghanys et descendant la rivière Chaudière qui tombe dans le St. – Laurent à quelques milles de cette ville, et tenir ainsi tout le centre du Canada en alarmes. Ces milices devaient former, avec d'autres petits corps volans placés sur les frontières, une armée d'environ 25,000 hommes ou le double de celle des Français, outre les troupes régulières. Mais malgré cette grande augmentation de forces, et les flottes nombreuses qui couvraient les mers de ce continent, nous allons voir que la campagne de 1756 fut encore plus malheureuse pour l'Angleterre que les deux campagnes précédentes.

      CHAPITRE II.

      PRISE D'OSWÉGO ET DE WILLIAM-HENRY.

      1756-1757

      Alliances indiennes; les cantons iroquois protestent de leur neutralité. – Préparatifs militaires. – Bandes canadiennes en campagne tout l'hiver (1755-56); destruction du fort Bull et dispersion d'un convoi de 400 bateaux ennemis. – Commencement de désunion entre le gouverneur et le général Montcalm au sujet de l'entreprise sur Oswégo. – Siège de cette place. – La garnison abandonnée du général Webb capitule. – Butin que l'on fait. – Les sauvages tuent un grand nombre de prisonniers; on ne parvient à les arrêter qu'avec beaucoup de peine. – Les fortifications d'Oswégo sont rasées. – Joie que cette victoire répand en Canada, – Les Anglais suspendent toutes leurs opérations pour le reste de la campagne. – Les Indiens ravagent leurs provinces. – Les Canadiens enlèvent Grenville à 20 lieues de Philadelphie. – Disette en Canada. – Arrivée des Acadiens qui mouraient de faim. – Ils se dispersent dans le pays. – Demande de secours en France. – Augmentation rapide des dépenses. – Montcalm suggère d'attaquer l'Acadie au lieu des forts Edouard et William-Henry. – Pitt monte au timon des affaires en Angleterre; nouveaux efforts de cette puissance en 1757. – Elle forme et on abandonne en Chemin le dessein de prendre Louisbourg, protégé par la flotte de l'amiral Dubois de la Mothe. – Des bandes canadiennes tiennent la campagne pendant l'hiver; M. de Rigaud, à la tête de 1,500 hommes, détruit les environs du fort William-Henry. – Les tribus indiennes restent fidèles à la France, qui envoie des secours. – Prise de William-Henry après un siège de 6 jours. – La garnison, forte de 2,400 bommes, met bas les armes. – Les prisonniers sont encore attaqués à l'improviste par les sauvages, qui en massacrent plusieurs, les pillent et les dispersent. – Le fort William-Henry est aussi rasé. – La disette va en augmentant en Canada. – Murmure des troupes. – Les dissentions deviennent plus visibles entre les chefs de la colonie. – Succès variés de la France dans les autres parties du monde. – Elle ne peut envoyer que quelques recrues en Amérique. – L'Angleterre y porte son armée à 50,000 hommes dont 22,000 réguliers, pour la campagne de 1758.

      Dans l'hiver M. de Vaudreuil porta son attention sur l'importante affaire des alliances indiennes, surtout celle avec les cinq nations, qui cherchaient à conserver la neutralité et à faire respecter l'intégrité de leur territoire. Il reçut avec une grande distinction la députation nombreuse qu'elles lui envoyèrent, et les assura que son plus grand désir était de rester en bonne intelligence avec elles. Ces délégués satisfaits se retirèrent en renouvelant leurs protestations pacifiques. C'est en partie pour ne pas indisposer ces peuples que le gouverneur fit raser les fortifications d'Oswégo, après que l'on se fût emparé de cette place.

      La saison des opérations arrivait, mais l'ennemi qui avait appris à être plus circonspect, ne montrait pas le même empressement pour se mettre en campagne, que l'année précédente. La levée de ses troupes avait éprouvé aussi beaucoup de délais inévitables. Une difficulté d'étiquette vint les accroître. D'après des règles de guerre faites à Londres, les officiers de l'armée régulière devaient avoir la préséance sur ceux de la milice coloniale. Cette distinction causa un mécontentement universel parmi la libre et fière population américaine. Elle repoussa avec dédain l'infériorité que l'on voulait lui imposer, et lord Loudoun fut obligé de donner satisfaction à une exigence qui n'était que légitime. Il laissa subsister l'organisation militaire qu'elle s'était attribuée au commencement de la guerre. En Canada les mêmes difficultés se présentèrent; mais la sagesse du gouvernement les fit cesser aussitôt. M. de Vaudreuil, qui était l'ami et le protecteur des Canadiens, ne voulut pas que l'on portât la moindre atteinte à leurs droits et à l'usage établi.

      Cependant l'inactivité des Anglais, qui étonnait, permit de mettre à exécution un projet né dans l'esprit du gouvernement français dans le temps de la construction d'Oswégo, qu'il avait toujours regardée depuis comme un acte hostile, comme une menace; Le gouverneur ayant cette entreprise à coeur, n'avait fait que l'ajourner l'année précédente; et dans la prévision de sa réalisation prochaine, les préparatifs étaient faits pour l'exécuter. Des partis avaient été tout l'hiver en campagne, entre Albany et ce fort, afin de détruire les petits postes qu'on y aurait élevés et de harceler sans cesse les communications. Dans le mois de mars M. de Léry, à la tête de 324